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Séisme : le travail de recensement et de diagnostic raconté par des experts sur le terrain

Le recensement et le diagnostic des logements endommagés par le séisme d’Al Haouz se poursuivent. Architectes, topographes, laboratoires et ingénieurs… tous les corps de métier sont mobilisés sur le terrain pour mener à bien cette mission, sous la supervision des ministères de l’Intérieur et de l’Habitat. L'objectif visé est de démarrer la reconstruction dans les plus brefs délais, mais en évitant de répéter les erreurs du passé.

Séisme : le travail de recensement et de diagnostic raconté par des experts sur le terrain

Le 25 septembre 2023 à 18h13

Modifié 25 septembre 2023 à 21h16

Le recensement et le diagnostic des logements endommagés par le séisme d’Al Haouz se poursuivent. Architectes, topographes, laboratoires et ingénieurs… tous les corps de métier sont mobilisés sur le terrain pour mener à bien cette mission, sous la supervision des ministères de l’Intérieur et de l’Habitat. L'objectif visé est de démarrer la reconstruction dans les plus brefs délais, mais en évitant de répéter les erreurs du passé.

"Concrètement, sur le terrain, nous contribuons au diagnostic de l’état des bâtisses dans les douars sinistrés, repérons les matériaux locaux qui peuvent être utilisés dans la reconstruction, ou encore ceux qui peuvent être recyclés, et nous apportons notre concours pour établir des cartes d’aléas afin d’aider les pouvoirs publics à prendre les bonnes décisions relatives à la reconstruction des habitations endommagées", nous explique un professionnel sur le terrain.

L’étape actuelle se situe entre le relèvement et la reconstruction définitive

"Il y a déjà eu un désenclavement quasi total des routes claasées (principales, provinciales, régionales) et une bonne partie des pistes rurales, qui a facilité les secours, étape durant laquelle tous les moyens humains et technologiques ont été mobilisés par les Forces armées royales et le ministère de l'Equipement. À présent, nous sommes en pleine étape de relogement d'urgence, qui sera suivie par celle de la reconstruction. Mais d’abord, place au recensement de la population, et au diagnostic des logements touchés par le séisme", ajoute notre source.

"Nous sommes en train de réaliser un recensement pour aider les autorités à prendre des décisions en rapport avec la reconstruction, et agir le plus rapidement possible. Il s’agit là du premier volet d’intervention sur le terrain, lequel se situe séquentiellement entre la première étape de relèvement et la dernière, celle de la reconstruction définitive des ménages. L'étape actuelle est extrêmement importante, dans la mesure où elle permettra de connaître quelles sont les zones à éviter dans la reconstruction, mais aussi d’analyser des modes de construction sur ces zones."

Et de souligner : "Nous sommes en plein automne. L’hiver est à nos portes, et nous pouvons à tout moment avoir des pluies torrentielles et des averses qui peuvent effacer les traces, ce qui rendra difficile l’inventaire. Nous mettons donc les bouchées doubles pour achever le recensement le plus rapidement possible."

Parmi les équipes mobilisées sur le terrain, figure la Fédération marocaine du conseil et de l’ingénierie (FMCI), dont une délégation pluridisciplinaire formée d’une vingtaine d’ingénieurs s’est rendue sur place le 18 septembre 2023.

"Nous sommes en train de diagnostiquer les maisons complètement ou partiellement détruites par le séisme", nous fait savoir son président Nabil Benazzouz, joint par Médias24. "Des observations sont également faites sur l’état du site, l’environnement des constructions et leur accès."

L’équipe de la FMCI, composée de structuralistes, d’hydrauliciens, de géophysiciens et de géotechniciens notamment, dont la tournée préliminaire d’exploration emprunte un parcours où le séisme a le plus frappé, a été devancée par les équipes du Laboratoire public d’essais et d’études (LPEE), membre important de la Fédération, qui avaient été mobilisées une dizaine de jours auparavant, soit directement après le séisme.

"Cette tournée sera suivie d’autres visites prochaines, qui permettront de fournir un éclairage et donneront lieu à des observations et constats consignés dans les rapports d’étape, perpétuellement enrichis et compilés au sein de la Fédération, qui seront mis progressivement à la disposition des pouvoirs publics."

Des cartes d’aléas pour éviter les zones à risque lors de la reconstruction

"Parallèlement à cette approche, des équipes de la Fédération participent, avec les autres professionnels sur place, aux opérations demandées par les pouvoirs publics, comme le recensement nécessaire à l’indemnisation des populations, la réflexion dans le processus de reconstruction et bien d’autres aspects connexes", nous explique Nabil Benazzouz.

Et notre première source requérant l'anonymat d'ajouter : "Dans ce recensement, il y a deux volets importants. Un premier a caractère administratif, qui donne lieu au deuxième aspect qui est plutôt technique. Différents professionnels sur le terrain, à savoir des architectes, des bureaux d’étude et de conseil, des topographes et des laboratoires, diagnostiquent les maisons totalement ou partiellement effondrées, ainsi que les matériaux locaux qui peuvent être utilisés dans la reconstruction, afin d'orienter celle-ci vers un paradigme différent, résilient aux catastrophes naturelles, mais aussi durable d’un point de vue environnemental. Il va falloir optimiser, quitte même à recycler les décombres pouvant être récupérés."

"Le second volet porte sur la réalisation de cartes d’aléas (du séisme, des inondations, des éboulements et des glissements de terrain...), en coordination avec les ministères de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire. Ces cartes sont très importantes, puisque pour pouvoir reconstruire, il est important de faire une ébauche des zones interdites de construction."

Une partie des dégâts ont été créés par l'effet de site

"Sur le terrain, nous avons remarqué que les habitants des douars construisent sur des failles tectoniques, ou encore des zones où il y a des falaises importantes. Certes, le séisme a fait beaucoup de dégâts, mais beaucoup de ces derniers sont créés par l’effet de site dû soit  à la géotechnique au sol, soit à la topographie ou les deux. Ces cartes sont donc importantes pour sauver les gens du séisme, mais aussi des inondations et d'autres catastrophes."

Les habitants ont construit sur des failles tectoniques, ou encore des zones où il y a des falaises importantes

Autre remarque importante relevée par notre interlocuteur : "Les règles parasismiques ne sont pas respectées dans les constructions au niveau des montagnes, et les méthodes utilisées sont archaïques. Je ne parle pas des constructions traditionnelles, mais des gens qui ont perdu le savoir-faire local et qui construisent leurs habitats en mélangeant la terre avec le ciment et autres."

"Ce séisme doit être un point de rupture pour corriger les erreurs urbanistiques du passé"

"Il faut par ailleurs respecter les coutumes de ces douars, dans la mesure où on ne peut obliger les habitants à se rassembler dans un seul endroit."

Au total, cinq provinces sont concernées par le recensement actuel. Il s'agit d'Al Haouz, Chichaoua, Taroudant, Azilal et Ouarzazate.

"J’espère que cette catastrophe sera un point de rupture pour corriger les erreurs urbanistiques passées", souligne notre source.

"Le diagnostic est toujours en cours et les équipes de volontaires de la FMCI se relayent au fur et à mesure sur le terrain, avec des points focaux installés à Marrakech, en coordonnant les interventions dans les différentes zones sinistrées.", précise pour sa part Nabil Benazzouz.

"Plusieurs unités sont recensées par jour, et les équipes sont renforcées de telle sorte à pouvoir contribuer valablement et dans les délais exigés à l’opération de recensement demandée par les pouvoirs publics."

Selon les derniers chiffres dévoilés le 22 septembre dernier par Fouzi Lekjaa, ministre délégué chargé du Budget, 2.930 douars ont été lourdement touchés par le séisme. Selon nos informations, chaque douar compte entre 20 et 30 maisons en moyenne. Si l’on fait le calcul, le nombre de maisons se situe entre 58.000 et 87.000. Les différentes équipes de professionnels peuvent inspecter jusqu'à 2.000 maisons par jour. Il leur faudra donc environ trois à quatre semaines pour tout finaliser. Au niveau de certaines maisons, complètement détruites, le diagnostic ne prend pas beaucoup de temps selon nos sources.

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