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AA 2023 Un moment fort des AA2023 : comment Mo Ibrahim a interpellé le président de la Banque mondiale (vidéo)

Le 16 octobre 2023 à 10h38

Modifié 16 octobre 2023 à 16h22

VERBATIM. Aux Assemblées annuelles du FMI et de la Banque mondiale, Mo Ibrahim, président de la fondation éponyme, a interpellé, sans mâcher ses mots, le président de la Banque mondiale, Ajay Banga. Des reproches prononcés au nom de l’Afrique.

À l’occasion des assemblées annuelles du FMI et de la Banque mondiale, ce mercredi 11 octobre, et lors d’une session consacrée à l’Afrique en tant que moteur de l’innovation, un échange a eu lieu entre le président de la Banque mondiale, Ajay Banga, et Mo Ibrahim, président de Mo Ibrahim Foundation.

Un échange franc et quelque peu tendu, durant lequel Mo Ibrahim a posé des questions au président Banga, et a surtout formulé des reproches au nom de l’Afrique. Ces reproches, adressés en particulier à la Banque mondiale, comportent des critiques fortes. Voici l’essentiel de ses déclarations.

L’intégralité de l’échange à partir de 4:08:49

“Après la guerre en Ukraine, tout le monde s’est tourné vers l’Afrique pour investir”

“C’est un événement africain par excellence et, en tant qu’Africain, l’une des questions que je voudrais vous poser est que nous avons 600 millions de personnes en Afrique qui ne bénéficient pas d’électricité. Il y a peu d’investissement et peu d’éducation. Que comptez-vous faire pour ces gens ?”, demande Mo Ibrahim au président de la Banque mondiale.

Il enchaîne en rappelant que 39 institutions européennes de bienfaisance avaient assuré qu’elles ne financeraient pas de projets à base d’énergies fossiles en Afrique. Ce qui est, pour Mo Ibrahim, “une idée stupide”.

Il reproche à l’Europe d’importer du gaz russe et la moitié du gaz africain. “L’Allemagne a fermé ses centrales nucléaires et a mis en place trois mesures pour le charbon, l'électricité et l’énergie nucléaire, et nous devons utiliser notre gaz pour aider ces 600 millions de personnes sans électricité. Il n’y a pas de solution universelle, la situation change avec le temps”, poursuit-il.

“Après la guerre en Ukraine, tout le monde s’est tourné vers l’Afrique pour voir où investir, au Sénégal par exemple”.

“Obama avait dit que les États-Unis allaient fournir l’électricité à l’Afrique. Où est cette électricité quelques années plus tard ? Je ne vois pas d’Afrique éclairée, mais une Afrique noire”.

Il s’adresse ensuite à Ajay Banga : “Vous avez dit que si l’environnement est favorable, vous allez venir et investir. Ici, je vais vous prendre à témoin”.

“Ce qui me vexe, c’est que ces gens viennent nous faire la leçon, alors que 22 pays africains ont pour principale source l’énergie renouvelable. Donnez-moi un seul continent avec ce ratio”.

“Le deuxième problème auquel nous faisons face en Afrique, c’est le coût du capital, que ce soit pour le secteur public ou privé. Le coût du capital est paralysant”.

“Les agences de notation nous ont condamnés”

“Tous les pays africains – 54 pays – ont une très mauvaise notation. En tant qu’Africain, est-ce correct pour moi d’exiger de la transparence ? Comment ces agences de notation qui se trouvent en Afrique du Sud, et qui n’ont jamais mis les pieds dans les autres pays africains, peuvent-elles pérorer au sujet de l’Afrique ? Sur quelle base font-elles leur travail ? Est-ce que quelqu’un pose la question à ces agences ? Et qui doit la poser ? Nous, Africains, devons la poser !”.

“Ces agences de notation nous ont condamnés. Nous devons payer 4 à 5 fois plus cher en termes de taux d’intérêts. Comment font-elles pour accorder ces notes ? Ces mêmes agences de notation offrent des services de conseil aux pays qu’elles ont elles-mêmes condamnés. Est-ce de la bonne gouvernance ? N’y-a-t-il pas un conflit ici ? Vous venez m’offrir des services de conseil alors que vous me condamnez à l’avance ? Elles doivent nous rendre des comptes !”.

“L’Afrique souffre de ces taux d’intérêt. Si le ratio dette-PIB est de 43%, le FMI a un rôle à jouer. Vous savez que le ratio dette-PIB du G7 est de 137% ? Qu’est-ce que c’est que ça ?”.

“Il en va de même pour le secteur pharmaceutique (…). Nous devons briser les barrières entre les pays. L’intégration est trop lente. Nous devons avoir une circulation plus fluide des capitaux et des biens. C’est notre combat. Les sociétés civiles nous appuient, et je peux vous assurer que nous menons un combat”.

“Tout le monde pense que la banque est trop petite, et que vous n’êtes pas à la hauteur de la tâche. Comment allez-vous résoudre ce problème ?”.

“La mission de la banque est d’éradiquer la pauvreté au niveau planétaire (…). Ce que les donateurs ont fait sous prétexte d’éradiquer la pauvreté n’a visiblement pas fonctionné. Le G20 a demandé à un groupe d’experts de produire un rapport que j’ai lu, et il vous demande 800 milliards de dollars par an. Comment ce montant peut-il provenir des banques multilatérales de développement ?”.

“Balayez devant votre porte en matière de gouvernance”

“Ce que l’on reproche souvent (à la Banque mondiale, ndlr), c’est la lenteur : le Sri Lanka et la Zambie sont dans une situation terrible, et cela vous prend deux ans pour organiser une réunion des créanciers, etc. Et aux États-Unis, quand il y a eu le problème de la Silicon Valley Bank, cela a été réglé en un week end”.

Pour clôturer cet échange, Mo Ibrahim a adressé un message à Ajay Banga. “Si votre banque était cotée en bourse, où que ce soit dans le monde, sa cotation aurait été supprimée ; parce que votre Conseil ne vaut rien. D’abord, vous n’avez pas de directeur indépendant, et les actionnaires principaux contrôlent tout. Vous vous réunissez deux fois par semaine. (…) Mais alors, quand avez-vous le temps de faire votre travail ?”.

“Le coût est de plus de 100 millions de dollars par an pour le fonctionnement du Conseil. Votre mission consiste à atténuer la pauvreté, et cette somme permettrait de sauver un million d’enfants chaque année en Afrique. La gouvernance doit commencer chez vous. Vous devez d’abord balayer devant votre porte en matière de gouvernance.”

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