Après l’épisode Adidas, comment le Maroc compte protéger son patrimoine culturel
Quelques jours après la résolution de l’affaire Adidas, où l’équipementier allemand a été accusé par le ministère de la Culture d’appropriation des motifs du zellige marocain au profit de l’équipe algérienne de football, le directeur du Patrimoine au ministère de la Culture révèle à Médias24 la nouvelle stratégie du Maroc en matière d’usurpation culturelle .
Après l’épisode Adidas, comment le Maroc compte protéger son patrimoine culturel
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Samir El Ouardighi
Le 19 octobre 2022 à 10h45
Modifié 19 octobre 2022 à 19h08Quelques jours après la résolution de l’affaire Adidas, où l’équipementier allemand a été accusé par le ministère de la Culture d’appropriation des motifs du zellige marocain au profit de l’équipe algérienne de football, le directeur du Patrimoine au ministère de la Culture révèle à Médias24 la nouvelle stratégie du Maroc en matière d’usurpation culturelle .
Visiblement satisfait des regrets publics de l’équipementier sportif, le directeur du Patrimoine nous confie que l’affaire Adidas a permis de montrer à l'ensemble de la planète que le Maroc prenait très au sérieux les tentatives d’appropriation culturelle, qualifiées de ligne rouge d’où qu’elles viennent.
"Un précédent qui fera jurisprudence"
Désormais, chaque fois qu’il y aura un sentiment d’usurpation d’un élément du patrimoine culturel marocain clairement identifié, comme le zellige, sans l’aval des autorités marocaines habilitées, il y aura une réaction automatique.
"A ce propos, il convient de féliciter le courage de notre ministre de la Culture qui a enfoncé une porte cadenassée depuis longtemps en créant un précédent utile pour l’avenir", commente Youssef Khiara, directeur du Patrimoine au ministère de la Culture.
"Les menaces répétitives, préméditées, sciemment organisées sur la propriété intellectuelle du savoir-faire marocain l’ont en effet poussé à s’impliquer personnellement et à adopter des mesures pour ne plus rien laisser passer à l’avenir", poursuit-il.
"Dans le passé, certains industriels ou maisons de couture s’inspiraient librement de notre héritage patrimonial sans que personne n’ose les défier ; l’affaire Adidas constitue donc un précédent, qui est un manifeste de prise de position à l’égard des usurpateurs et contrefacteurs", met en garde Khiara.
Réfutant l’expression de "guerre culturelle", utilisée par certains, il préfère le terme "protection juridique à l’échelle universelle contre l’usurpation d’un savoir-faire", comme celui des babouches, habits et bijoux marocains qui sont copiés dans le monde entier sans aucun bénéfice pour les artisans marocains.
"La lutte contre l’usurpation culturelle, une priorité ministérielle"
Pour protéger tout ce qui ne l’est pas encore, il affirme que la création récente d’un 'label Maroc' permettra d’élargir le champ des éléments patrimoniaux qui ne sont pas encore répertoriés aux côtés des 180 éléments immatériels majeurs, toutes catégories confondues, d’ores et déjà enregistrés.
Depuis son arrivée, "le ministre érige ce dossier au rang de priorité du mandat, en multipliant les réunions sur la thématique de l’appropriation culturelle".
"Face aux tentatives systématiques et délibérées d’usurpation de notre patrimoine national par certains, il a fait le choix de la fermeté", justifie l’archéologue médiéviste, regrettant que l’Algérie officielle soit le seul pays au monde à adopter une telle politique d’appropriation.
"Le palais El Mechouar, un exemple de partage du savoir-faire marocain"
"Sachant que l’affaire Adidas n’était pas gagnée d’avance, d’autres auraient préféré temporiser, car s’il est vrai que le palais El Mechouar de Tlemcen est en Algérie, les commanditaires de l'époque étaient cependant bien des sultans marocains qui ont fait appel à un savoir-faire de chez nous", tient à rappeler Youssef Khiara.
Lors de sa restauration en 2010, ce sont, encore une fois, des artisans marocains qui ont été sollicités par le défunt président Abdelaziz Bouteflika, qui avait d’ailleurs publiquement reconnu leur apport lors de l’inauguration officielle du bâtiment, en ruine avant leur intervention (voir vidéo).
Souhaitant mettre un terme à la polémique, notre interlocuteur met toutefois au défi les détracteurs du Maroc de trouver un seul atelier d’artisans ou même une entreprise de restauration, spécialisé dans la conception, la fabrication, la découpe et l’installation du zellige de Fès dans un édifice privé ou public en Algérie.
"Le Maroc et l’Algérie ont plus de points communs culturels que de différences"
"Alors que nous partageons aussi un patrimoine culturel avec la Tunisie, la Mauritanie ou encore l’Espagne, force est de constater que le seul pays avec lequel nous avons ce genre de problèmes artificiels, pour ne pas dire puérils, est malheureusement l’Algérie", avance le directeur du patrimoine.
"Avec toutes les autres nations, même lointaines, nous appréhendons les choses de manière scientifique et historique, car c'est un patrimoine commun qui doit être valorisé ensemble, sans sombrer dans le ridicule en essayant de s’approprier tout ce qui est beau en Afrique du Nord", explique Khiara.
"Pourquoi tenter de s’approprier des pans du notre patrimoine, alors que selon tous les grands experts, le leur est très riche (céramique, bijoux ...) ?"
"Ainsi au lieu de le mettre en valeur, ils sont dans un esprit de compétition perpétuelle comme les anciens leaders panarabistes Gamal Abdel Nasser ou Houari Boumédiène, qui voulaient, coûte que coûte, être les leaders politiques, économiques et même culturels du monde arabo-africain", conclut le scientifique, pour qui le Maroc a plus de points en commun avec l’Algérie que de différences majeures.
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