Bourse : un début de nouveau cycle d’investissement est observé chez les investisseurs étrangers (Bachir Tazi)

Ph. Médias24
| Le 12/5/2023 à 9:47
Depuis plus de dix ans, la présence des investisseurs étrangers sur le marché marocain était en recul constant. Mais ces derniers mois, ils reviennent sur le marché. Bachir Tazi, directeur général de CFG Capital Markets, nous expose les raisons du caractère cyclique des investissements étrangers et confirme leur retour depuis le début de l’année.

Le 9 mai, l’Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC) a publié les chiffres clés du marché en 2022. L’occasion de voir comment a évolué la position des investisseurs étrangers sur le marché.

Il en ressort qu’à fin 2022, les investissements des étrangers et MRE conservés au Maroc ont atteint 156 MMDH, soit une baisse de 25% par rapport à fin 2021. Fin 2022, l’écrasante majorité (91,8%, ndlr) de ces investisseurs étrangers détenaient des parts stratégiques dans les entreprises de la cote, à savoir plus de 4% du capital.

De plus, 8,2% des investissements étrangers étaient des parts minoritaires dans les entreprises de la cote, soit un total de 12,8 MMDH. Cette part a progressé par rapport à fin 2021, où seulement 6,9% des investissements étaient dirigés vers des parts minoritaires, pour un montant cependant plus élevé de 14,3 MMDH. En 2022, 51% des investisseurs étrangers provenaient du Moyen-Orient et 42,5% étaient européens.

Comment cette présence étrangère a-t-elle évolué au fil des années ? Et comment se comporte-t-elle aujourd’hui ?

Une baisse progressive de la présence des investisseurs étrangers depuis 2013

Le marché boursier marocain a vu la présence des investisseurs étrangers reculer progressivement depuis plus d’une dizaine d’années. Deux indicateurs sont à suivre sur ce sujet. Premièrement, la participation dans le volume total. "Malheureusement, cette contribution n’a fait que baisser ces dernières années. Alors que nous étions sur une moyenne de 15% les années précédentes, ce chiffre a progressivement reculé à 13%, puis 11%, et a atteint 8% à fin 2022. C'est la contribution la plus faible depuis une bonne quinzaine d’années sur la Bourse de Casablanca, si ce n’est plus", nous explique Bachir Tazi, directeur général de CFG Capital Markets.

In fine, cela traduit une baisse d’appétit des investisseurs étrangers envers le marché marocain. Le second indicateur clé qui renseigne sur le comportement des investisseurs étrangers à la Bourse de Casablanca, c’est la part de la capitalisation détenue par les étrangers.

Ici, ce qu’il est pertinent d'observer, ce sont les participations non stratégiques, à savoir minoritaires. "Ces dernières ont emprunté un chemin baissier durant toutes ces années. Elles se situaient entre 3% et 4% tout au long de la dernière décennie, et ont baissé jusqu’à atteindre 2,3% en 2022. La part de la capitalisation flottante détenue par les étrangers, quant à elle, a progressivement reculé pour passer à une moyenne entre 12% et 15% à 9% en fin d’année dernière", explique notre interlocuteur. Mais alors, comment expliquer ce désintérêt qui s’est installé au cours du temps ?

Un marché long qui manque de profondeur

Différents facteurs peuvent expliquer ce recul de la présence étrangère en bourse. Premièrement, le manque de papier et de profondeur de la cote casablancaise. "Nous sommes sur un marché dominé par les institutionnels marocains, qui pèsent 70% à 75% du volume et qui font des placements long terme. La réglementation et les mécanismes dont ils disposent ne leur permettent pas de jouer des cycles courts. Il y a une logique de buy and hold qui éteint la volatilité du marché", précise Bachir Tazi. Une caractéristique du marché qui peut refroidir les investisseurs étrangers, notamment en raison du manque de liquidité que cela peut créer.

Ce n’est pas le cas dans les marchés du Moyen-Orient par exemple, où la présence de family offices et des personnes physiques est largement supérieure. "Cela permet de créer de la liquidité sur les marchés, car ces investisseurs-là sont plutôt court et moyen terme et font des arbitrages permettant de créer de la liquidité", note notre interlocuteur.

L’une des autres caractéristiques structurelles du marché casablancais est qu’il est long. Cela veut dire qu’il est seulement possible d’y jouer les tendances haussières sur le moyen long terme. "On ne peut pas jouer sur les tendances baissières. Quand le marché baisse, personne ne peut prendre le pari de faire de la vente à découvert. En somme, personne ne peut shorter le marché. Quand le marché progresse, tout le monde est satisfait, mais quand il y a une tendance baissière, tout le monde se retire", explique Bachir Tazi.

Il existe également des facteurs conjoncturels au recul de la présence étrangère sur le marché boursier, notamment la sortie du Royaume de l’indice MSCI Emerging Markets en 2013. Désormais, le Maroc se trouve dans l’indice MSCI Frontier Markets, beaucoup moins prisé, visible et investi que l’Emerging Markets. "La part des actifs sous gestion dans le monde allouée aux Emerging Markets est très largement supérieure à celle de l’indice dans laquelle le Maroc se trouve actuellement", précise Bachir Tazi.

Un rebond des investissements étrangers est ressenti en YTD

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la sortie d’une partie des investisseurs étrangers n’a pas eu lieu en 2020 durant le Covid, mais en 2021 lors du rebond de la bourse.

Cela s’explique notamment par les arbitrages amenés par la hausse du dollar sur la période. "La hausse de la monnaie américaine provoque un effet d’arbitrage naturel. De plus, la période 2022, marquée par la hausse des taux et l’inflation, a engendré une aversion généralisée au risque", poursuit notre source. Ce retrait observé l’an dernier n’est donc pas propre au Maroc, mais à toute la catégorie Frontier et Emerging Markets. "Mécaniquement, les gérants de fonds vont réduire leur exposition et, de fait, le Maroc subit un dommage collatéral", poursuit-il.

Les investisseurs étrangers agissent par cycle. Ils privilégient la croissance et les placements de long terme. "Ils achètent une histoire, une equity story qui les intéresse et une optique de croissance, contrairement à certains investisseurs locaux qui, de par leurs contraintes réglementaires et opérationnelles, sont dans une logique court et moyen terme et de rendement immédiat", indique notre interlocuteur.

Aujourd’hui, pour le directeur général de CFG Capital Markets, nous sommes au début d’un nouveau cycle. En janvier 2023, la baisse du marché boursier a permis de faire baisser les multiples et a engendré une rentrée des investisseurs étranger sur la place casablancaise. "Cela a commencé par un regain qualitatif, avec des questions et des requêtes de la part des investisseurs étrangers. Ils viennent en roadshow bien plus souvent depuis début 2023. Après, vient la phase de concrétisation qui s’observe. Il y a un inflow net des étrangers, c’est clair, mais nous n’avons pas encore les chiffres au T1-23. Ils vont vers les valeurs intéressantes sur le moyen et long terme, avec une gouvernance établie et une belle equity story. Avec CFG Bank, nous avons organisé, depuis le début de l’année, plus de vingt roadshows sur le marché marocain", souligne Bachir Tazi.

Voici les raisons du rebond du MASI

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