Flexibilité du dirham : le gouvernement franchira-t-il un nouveau pas en 2020 ? Avis d'experts
Le dirham a réussi le premier passage vers un régime de change plus flexible. Jouahri a annoncé un futur élargissement plus important de la bande de fluctuation mais n'a pas révélé de date. 2020 sera-t-elle l'année du deuxième élargissement ? Des acteurs du marché livrent leur analyse.
L’entrée en vigueur d'un régime de change du dirham plus flexible fête bientôt son second anniversaire. Pour la première étape de ce processus, la bande de fluctuation du dirham était passée de 0,6% (+/-0,3% de part et d’autre du cours central) à 5% (+/-2,5%).
Une première étape à travers laquelle la force du dirham a été démontrée, et où celui-ci ne s'est pas déprécié ; contrairement aux pronostics des autorités monétaires et financières aussi bien marocaines qu’internationales.
En parallèle, un marché interbancaire des devises solide s’est développé : Celui-ci n’a plus fait appel aux adjudications de Bank Al-Maghrib depuis mars 2018, soit trois mois seulement après l'entrée en vigueur du nouveau régime. C'était aussi l'un des objectifs de la première étape de la flexibilisation.
La monnaie nationale ayant réussi le test de la flexibilisation de son régime de change depuis bientôt deux ans, d’aucuns se demandent si 2020 serait l’année d’un élargissement supplémentaire de la bande de fluctuation ; surtout après la déclaration du gouverneur de la Banque centrale Abdellatif Jouahri lors du dernier point de presse suivant le Conseil trimestriel de Bank Al-Maghrib en décembre 2019, où il indiquait pour la première fois que le futur élargissement de la bande sera plus important que le premier.
Contactées par LeBoursier, diverses sources dans différentes salles de marchés de banques marocaines affirment que pour l’instant, elles n’ont pas d’échos à propos d’un éventuel passage à la seconde étape du processus de libéralisation du régime de change du dirham en 2020, ni sur la largeur de la nouvelle bande de fluctuation.
Nos sources indiquent toutefois qu’en se basant sur les exemples d’autres pays qui ont devancé le Maroc vers une libéralisation graduelle du taux de change de leurs monnaies, le second élargissement de la bande de fluctuation est souvent plus important que le premier: "Alors que pour le premier élargissement ,nous sommes passés de 0,6% à une bande de 5%, là nous pourrions monter jusqu’à une bande de 15%", nous confie un responsable au sein d’une salle de marchés d’une banque de la place.
Par ailleurs, quelques sources soutiennent les propos du Wali de Bank Al-Maghrib Abdellatif Jouahri, qui affirmait attendre que les éléments précurseurs de chocs économiques soient visibles avant de passer à la deuxième phase.
"L’élargissement de la bande de fluctuation du dirham face à un choc exogène comme la hausse du prix du pétrole, ou tout autre choc se caractérisant par une forte demande sur la devise, fera que cette demande là sera amortie vu que la devise sera plus chère par rapport au dirham. L’objectif ultime est donc de dissuader les opérateurs économiques à acheter celle-ci", affirme un de nos interlocuteurs.
Franchir le pas en situation "normale"
D'autres sourcres estiment toutefois que si le Maroc s’est engagé dans une libéralisation totale du régime de change du dirham sur un horizon temporel précis, le passage à la deuxième phase de ce processus ne doit pas tarder. Une de nos sources nous avait indiqué auparavant que lors des premiers échanges autour de la flexibilisation du dirham avec la Banque centrale, celle-ci parlait d'un délai de dix ans pour passer à une libéralisation totale du régime de change du dirham: "Pour que cela soit possible, tout en respectant une transition graduelle et ordonnée, il faut élargir la bande de fluctuation le plus tôt possible", a-t-il indiqué.
D'autant plus que le moment semble opportun pour franchir le pas, le dirham étant dans une situation favorable: "Si le dirham n’a jamais touché les extrémités de la bande de fluctuation actuelle, quelles sont les chances pour qu’il touche les extrémités d’une bande plus large? ", s'interroge notre source.
Pour notre interlocuteur, le dirham se trouve à un niveau assez confortable, alors que le Maroc est plus importateur qu’exportateur. Il ajoute qu'il faut implémenter la réforme tant "que nous ne sommes pas dans une situation où il y a un événement majeur qui va exercer une pression sur les réserves de change".
"Elargir davantage la bande de fluctuation dans une éventuelle situation de choc exogène reviendrait à réaliser les scénarios de pays qui ont été forcés à libéraliser leurs monnaies sous ces mêmes conditions, comme l'Egypte par exemple. Dans ce cas là, on ouvre la porte à une dépréciation du dirham", indique l'une de nos sources, qui recommande de franchir cette étape incessamment.
"Dans l’éventualité d’un choc exogène, les autorités n’auront pas le choix et seront obligées de flexibiliser davantage. Idéalement, il faut le faire dans une situation normale, pour que la transition soit indolore", ajoute-elle.
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