La sortie du Trésor à l’international saluée par les experts du marché de la dette

En levant 2,5 milliards de dollars à des taux corrects, selon les conditions actuelles du marché, le Maroc a réussi une belle opération, selon plusieurs experts sondés par Médias24. Ces derniers pensent même que le Trésor aurait pu lever davantage et mieux profiter de cette fenêtre de tir qui s’est ouverte en ce début mars.

Ph. MEDIAS24

La sortie du Trésor à l’international saluée par les experts du marché de la dette

Le 5 mars 2023 à 17h21

Modifié 5 mars 2023 à 17h21

En levant 2,5 milliards de dollars à des taux corrects, selon les conditions actuelles du marché, le Maroc a réussi une belle opération, selon plusieurs experts sondés par Médias24. Ces derniers pensent même que le Trésor aurait pu lever davantage et mieux profiter de cette fenêtre de tir qui s’est ouverte en ce début mars.

Le 1er mars, le Trésor a bouclé une levée de 2,5 milliards de dollars sur les marchés de la dette internationale. La levée a été structurée en deux tranches : une première, d’un montant de 1,25 milliard de dollars, sur 5 ans, à un taux de 5,95% ; une seconde, du même montant (1,25 milliard de dollars), pour un taux de 6,50%.

Comparée aux taux marocains, l’émission en dollars paraît chère. Sur le marché primaire des bons du Trésor, les titres à 5 ans sont libellés, selon la dernière courbe des taux, à 4,08%. Pour la maturité 10 ans, les taux primaires sont de 4,56%.

Mais, selon un expert du marché, la comparaison entre les conditions du marché intérieur et extérieur n’a aucun sens. Car le Trésor avait tout simplement besoin de lever une dette en devises. Et pour ce faire, il doit obéir aux conditions de ce marché.

"La question des taux est un non-sujet. Quand vous sortez sur le marché international ou même national, vous êtes obligés de suivre les conditions du marché. Le plus important, c’est d’atteindre les objectifs fixés par la sortie, en collant au maximum aux conditions du marché. Et c’est ce qui a été fait", explique notre source.

Le Maroc se compare à des émetteurs Investment Grade

Pour lui, le Trésor aurait même dû lever plus que les 2,5 milliards de dollars, puisque la demande sur les titres Maroc a été forte et que le Trésor et ses conseillers financiers ont pu gratter quelques points de base par rapport au pricing initial proposé à l’ouverture des souscriptions.

"La loi de Finances prévoit des levées en devises de l’ordre de 60 milliards de dirhams. Le Trésor a levé 2,5 milliards de dollars pour une demande qui a dépassé les 11 milliards de dollars. Je me demande pourquoi il n’a pas levé plus, au vu des conditions favorables du marché à l’instant où la sortie a été réalisée", s’interroge notre expert.

Un autre expert du marché abonde dans le même sens et souligne que si comparaison doit être faite, elle doit se faire non pas entre les taux internes et les taux internationaux, mais sur le benchmark des pays émergents.

Pour sa levée en dollars, le Maroc a pu effectivement obtenir des spreads (prime de risque) de 190 points de base (pb) sur le 5 ans et 260 pb sur le 10 ans. C’est d’abord mieux que les spreads fixés lors de l’ouverture des souscriptions, qui étaient fixés à 235 pb pour le 5 ans et 300 pb pour le 10 ans. Ce qui montre, selon notre source, une capacité de négociation dont peu de pays émergents disposent actuellement et qui s’explique, selon lui, par l’appétit des investisseurs pour le papier Maroc.

Notre source signale par ailleurs le différentiel entre la prime de risque appliquée au Maroc par rapport au benchmark des pays similaires.

"La moyenne des spreads pour la dette des pays émergents est de l’ordre de 350 pb en moyenne pour le 10 ans. Avec un spread de 260 pb sur la même maturité, le Maroc a fait un joli coup. Notre pricing du risque tend plus vers des émetteurs Investment Grade [notation que le Maroc n’a pas, ndlr] que vers des émetteurs comparables au Maroc. Ce qui, en soi, est une bonne chose", relève notre expert des marchés internationaux.

Le choix du dollar a été pertinent, selon les experts

Cette performance (forte demande et taux corrects) s’explique, selon nos sources, par deux éléments : la qualité du papier Maroc, pays qui dispose de bons fondamentaux économiques et qui est considéré comme un pays fiable par les prêteurs – "l’un des rares de la région", souligne une de nos sources. Mais aussi par le choix de la devise, le dollar américain.

"Le choix d’une sortie en dollars est intelligent. Si on avait fait une levée en euros, les conditions auraient été plus chères. Il existe actuellement une forte abondance de la monnaie américaine sur les marchés, contrairement à l’euro. Les investisseurs ont donc besoin de papier pour placer leurs dollars et éponger leur stock. Cette abondance est due d’abord à l’hélicoptère monétaire ouvert par les Etats-Unis au moment de la crise du Covid, mais également au fait que la Russie, malgré l’embargo et les sanctions, a pu continuer de commercer en utilisant d’autres monnaies, ce qui a maintenu le stock de dollars sur les marchés à un niveau élevé", explique notre expert.

Voilà donc les deux éléments qui expliquent la forte demande sur le papier Maroc. Une demande qui a dépassé les 11 milliards de dollars quand le Maroc ne demandait qu'un milliard. Une envie des investisseurs de diversifier leurs portefeuilles en achetant un papier nouveau, celui du Maroc, pas risqué et rémunérateur, tout en plaçant les excédents en dollars sur des maturités moyennes et longues.

Le Trésor a fait d’une pierre trois jolis coups

La nouvelle a également réjoui les acteurs locaux du marché des bons du Trésor, en proie à de fortes tensions depuis le début de l’année.

"En levant ces 2,5 milliards de dollars, le Trésor réduit la pression sur le marché local qui n’arrive toujours pas à suivre sur les maturités moyennes et longues. Cela étant dit, cette levée ne doit pas pousser le Trésor à s’absenter sur le marché des bons du Trésor, car il y a une demande locale qui doit continuer à être servie", signale un gérant marocain.

Ou comment faire d’une seule pierre trois jolis coups :

- financer les besoins du Trésor, qui sont budgétisés à 60 milliards de dirhams pour l’année 2023 ;

- renforcer les réserves de devises en dollar, garantie de la souveraineté financière et monétaire du pays ;

- soulager la pression sur le marché local de la dette, où les investisseurs craignent plus que tout une nouvelle hausse des taux, notamment sur les maturités moyennes et longues.

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