En pleine enquête de sauvegarde sur ses produits, Maghreb Steel se targue de ses réalisations

Sara El Hanafi | Le 28/11/2019 à 15:37

Maghreb Steel a ouvert à la presse les portes de son complexe industriel de laminage à chaud de Bled Solb, près de Mohammedia, ce 27 novembre. L'entreprise se voulait rassurante quant à son activité et sa viabilité, tout en présentant un outil industriel dont elle se dit fière. Il reste néanmoins des interrogations.

Alors qu’une audition publique du ministère du Commerce et de l’Industrie est prévue ce 19 décembre dans le cadre de l’enquête de sauvegarde sur les importations de tôles laminées à chaud, Maghreb Steel, le principal bénéficiaire des éventuelles mesures de sauvegarde qui découleront de cette enquête, a invité ce 27 novembre divers organes de presse à son complexe industriel de laminage à chaud de Bled Solb près de Mohammedia.

Une tentative de médiatisation pour légitimer les éventuelles mesures de sauvegarde? Cette éventualité ne peut pas être écartée sachant que le management qui a reçu la presse, n'a rien annoncé de nouveau. Pour le journaliste, la visite en elle-même valait le détour, les installations sont impressionnantes et le process parfois spectaculaire.

Ce site phare a nécessité 5 milliards de dirhams d’investissement et a été mis en service entre 2010 et 2012. Il dispose d’une capacité de production dépassant 1 million de tonnes : "C’est plus que la consommation totale du Maroc et ceci est le problème structurel de Maghreb Steel," reconnaît Hatim Senhaji, Directeur général de la compagnie.

"Cet investissement s’est fait à partir de 2007, alors que l’on planifiait d’exporter la moitié de la production. Mais depuis, le monde a changé et l’export du laminé à chaud est devenu plus compliqué", a-t-il ajouté.

Alors que l'enquête de sauvegarde en question est toujours en cours et pourrait prendre jusqu'à 12 mois, Maghreb Steel a décroché une mesure de sauvegarde provisoire sur le laminé à chaud. Maghreb Steel dispose également d'une mesure de sauvegarde sur un autre produit, le laminé à froid, produit dans l'usine de Tit Mellil.

Mais en dépit de cet arsenal de protection, et en dépit des diverses mesures présentées pour optimiser la production, avec des réductions importantes en énergie ; les performances financières ne sont pas au rendez-vous. Le motif avancé par le management est la conjoncture difficile que connaît l’acier à travers le monde, notamment la montée du protectionnisme dans des marchés comme les Etats-Unis ou l'Europe, poussant les producteurs à écouler leurs stocks dans des marchés moins protégés. Un recul de la demande est également constaté, affirme la même source.

Cela étant, bien que l'entreprise cumule les déficits, Hatim Senhaji se targue d’être dans une situation financière moins précaire qu’auparavant: "En dépit de cette période difficile et d'un marché en bas de cycle, nous avons démontré que nous pouvons être résilients et générer des cash flows positifs. Nous terminerons donc l’année sur un niveau proche de celui de 2018", avance-t-il.

En 2018, et bien que déficitaire, Maghreb Steel affichait un modeste Ebitda de 80 millions de dirhams. L’entreprise valorise cet indicateur qui permet de mesurer véritablement l’activité de l’entreprise. Mais cela n’empêche que les déficits globaux s’accumulent et que l’endettement ne diminue pas depuis des années. Le niveau de l'Ebitda est sans commune mesure avec l'endettement de l'entreprise, voire avec les frais financiers.

Des ambitions pour tout le marché

Pour améliorer sa situation, Maghreb Steel ambitionne d’attaquer de nouveaux marchés mais d'abord d'augmenter la taille du marché marocain de l’acier, comme évoqué par auparavant par son management. Cela permettrait à l’entreprise de ne pas rester en sous-production.

"Notre développement est très lié au développement de l’industrie, et plus il y a de l’industrie qui s’installe au Maroc mieux c’est pour nous", indique Hatim Senhaji. "Nous ciblons également les projets d’infrastructures, comme les ports ou les tours qui consomment énormément d’acier".

Notre interlocuteur indique toutefois que les projets d’infrastructure ne consomment pas de l’acier en bobine produit par Maghreb Steel mais plutôt de la tôle déjà transformée, produite en aval: "Il faudra donc travailler en écosystème. Ce sont des projets qu’il faudra adresser à plusieurs opérateurs".

Hatim Senhaji pense également que le développement industriel au Maroc permettra de générer plus de ferraille, un intrant nécessaire à l'activité de Maghreb Steel: "La ferraille que l'on collecte au Maroc n'est pas suffisante pour les trois aciéries qui existent à savoir nous, Sonasid et Univers Acier. Elle couvre à peu près le tiers de nos besoins si l'on tourne à fond. Nous devons donc importer de la ferraille", explique-t-il.

Il ajoute: "Si demain nous avons un troisième constructeur automobile, d'un seul coup nous aurons sur le marché jusqu'à 100.000 tonnes de chutes générées, en plus des 600.000 qu'on estime avoir aujourd'hui". Des sources indépendantes estiment de leur côté que la ferraille au Maroc ne dépasse pas 200.000 à 300.000 T. par an. A vérifier donc.

Des discussions avec Renault et une homologation avec PSA

Pour ce qui est de l’automobile, Hatim Senhaji explique que les choses se déroulent de façon différente par rapport aux autres marchés:" Ce sont des contrats de six mois à un an, ce ne sont pas des clients qui achètent de l’acier au fil de l’eau", explique-t-il.

Il ajoute qu’à ce jour, Maghreb Steel ne dispose plus de contrat de ce type avec Renault, mais que des discussions sont en cours dans le sens de la signature d’un nouveau contrat. Pour PSA, l’aciérie est en cours d’homologation.

"Ce sont des process qui peuvent durer un an ou deux ans, car les industriels automobiles veulent s’appuyer sur des fournisseurs solides pour répondre à leurs besoins. Avec Renault, l’homologation a mis un an et demi, avec un certain nombre d’audits. Pour PSA, c’est en cours".

Hatim Senhaji indique toutefois que la part de l’automobile dans le chiffre d’affaires de l'entreprise reste relativement faible: "Mais lorsqu’on fait des projections sur cinq ou dix ans, nous pensons que cela peut représenter une part plus importante. En général, l’automobile représente 25 à 30% du chiffre d’affaires de l’acier plat dans le monde".

 

Vous avez un projet immobilier en vue ? Yakeey & Médias24 vous aident à le concrétiser!

Si vous voulez que l'information se rapproche de vous

Suivez la chaîne Médias24 sur WhatsApp
© Médias24. Toute reproduction interdite, sous quelque forme que ce soit, sauf autorisation écrite de la Société des Nouveaux Médias. Ce contenu est protégé par la loi et notamment loi 88-13 relative à la presse et l’édition ainsi que les lois 66.19 et 2-00 relatives aux droits d’auteur et droits voisins.
lire aussi
  • | Le 25/4/2024 à 15:04

    Maroc Telecom : des résultats au 1er trimestre conformes aux prévisions et des menaces persistantes

    Le groupe a affiché une légère hausse de ses revenus et une stagnation de sa profitabilité à fin mars. Ces résultats sont sans surprise. Le groupe, dans le sillage de la Coupe du monde 2030, devra fortement investir dans la 5G qui se fait encore attendre. La menace de l'amende est toujours présente, malgré l'appel de la décision judiciaire dans son litige avec Wana.
  • | Le 25/4/2024 à 10:01

    Maroc Telecom. Hausse des revenus au 1er trimestre, profitabilité stable

    Le groupe affiche une légère hausse de ses revenus à fin mars 2024, poussés par les filiales Moov. La profitabilité globale du groupe reste stable sur la période à 1.528 MDH. Les revenus au Maroc reculent de 1,3%, notamment du fait de la baisse du Mobile.
  • | Le 24/4/2024 à 14:10

    L'or à des niveaux historiques, Managem en profitera

    L'once d'or flirte désormais avec les 2.400 dollars. Du jamais vu. Cette hausse va à contre-courant de la situation macroéconomique actuelle. Factuellement, l'accélération de la hausse du cours ne trouve pas de raison fondamentale, excepté les inquiétudes géopolitiques au Proche-Orient. Managem, dont la moitié des revenus proviennent de l'or, devrait profiter de cette bonne dynamique des prix.
  • | Le 24/4/2024 à 9:03

    Bitcoin : hausse attendue d'ici la fin de l'année grâce au halving

    Historiquement, le halving tire le cours du bitcoin à la hausse. Cependant, cet effet n'est pas instantané. D'ailleurs, le cours du bitcoin n'a que peu évolué depuis le dernier halving en date du 20 avril. L'offre baissera de facto et les prix à moyen terme seront tirés à la hausse si le niveau de demande actuelle demeure soutenue par les ETF.
  • | Le 23/4/2024 à 12:10

    Le groupe Atlantique en passe de prendre un nouveau virage avec l’entrée de CDG Invest dans son capital

    La filiale d’investissement de CDG est entrée dans le tour de table du groupe Atlantique en acquérant 20% du capital. Une opération qui permettra au groupe éducatif d’accélérer sa croissance et son développement. Le président du groupe Atlantique, Rachid M’Rabet, en a dévoilé les contours lors d’une conférence de presse organisée à l’occasion, le mardi 22 avril.
  • | Le 22/4/2024 à 16:56

    Le MASI euphorique sur certains secteurs comme l'immobilier et le BTP

    Les deux valeurs du secteur BTP, TGCC et Jet Contractors, affichent des progressions respectives en bourse de 70% et 117% en YTD. Les cours bénéficient de l'accueil favorable du marché concernant les résultats 2023, ainsi que de bonnes perspectives de développement dans le cadre de la Coupe du monde 2030 et des grands projets d'infrastructure.