Samir: voici ce qui pourrait être reproché aux deux dirigeants Al Amoudi et Ba Amar

Abir Labied | Le 14/11/2017 à 18:40

Les autorités judiciaires au Maroc n’excluent pas l’extension de la liquidation de Samir au patrimoine personnel de ses deux ex-dirigeants Al Amoudi et Ba Amar. Une deuxième option s’offre à la justice: l’action en comblement du passif.

Si la justice marocaine décide de poursuivre l'ex DG et l'ex-président, sur quoi se baserait-elle?

LeBoursier a lu le rapport d'expertise judiciaire sur la situation de la Samir. Voici les éléments essentiels qui pourraient engager la responsabilité de ces deux dirigeants. Cette expertise à notre sens n'a pas été suffisamment approfondie, elle a été réalisée dans un délai très court début 2016.
 

Ce que l'on peut retenir du rapport d'expertise quant à la gestion des dirigeants concerne:

>La distribution de dividendes fictifs:

Entre 2007 et 2014, Samir a procédé à la distribution de dividendes, d’un montant global de 594 MDH, financée intégralement par des facilités bancaires. Ceci est illégal étant donné que la distribution des dividendes aux actionnaires se fait sur la base des bénéfices nets réalisés (après soustraction des pertes liées aux années précédentes). D’ailleurs, c’est ce qu’en dit la loi -17-95 relative à la S.A (article 330).

En effet, les états financiers de la société ne présentent aucun bénéfice susceptible d’être distribué. Au contraire, l’entreprise est en difficulté depuis 2011 et n’arrive ni à couvrir ses besoins d'exploitation ni à honorer ses engagement vis-à-vis des créanciers. De ce fait, la distribution de ces dividendes par la Samir menace son existence juridique et nuit aux droits des créanciers. A cet effet, l’article 331 de la loi précitée considère que chaque bénéfice distribué non conformément à la loi est dit «dividende fictif».

D’ailleurs, cette distribution de dividendes a contribué à aggraver la situation de la société, qui est passée d’une capacité d’autofinancement (CAF) positive s’élevant à 1,48 MMDH en 2012 à une CAF négative de 3,09 MMDH à fin 2014 (recul de 309%). Cette situation a suivi une trajectoire baissière jusqu’à fin juin 2015.

>La réévaluation des actifs immobilisés:

En 2014, la Samir a comptabilisé un écart de réévaluation de 4,16 MMDH dans ses comptes, suite à une réévaluation de ses actifs immobilisés portant la part de ceux-ci dans le total actif à 60%. L'opération a engendré une compensation avec la perte réalisée pendant la même année (contraire aux principes comptables marocains), s’élevant à 3,42 MMDH.

Ainsi, il faut noter que d’après l’analyse de l’équilibre financier, mentionnée sur le rapport, une opération de réévaluation d’actifs n’est prise en considération que s’il s’agit d’une cession d’entreprise ou d'une vente d’actifs. Ainsi, selon les analystes, l’opération doit être annulée.

>L'accroissement déséquilibré et «dangereux» des investissements face au manque de ressources stables:

La structure financière de la société fait ressortir des difficultés de trésorerie de liquidité depuis 2007. Ceci est expliqué par l’insuffisance des capitaux propres et par le financement des investissements en ayant recours aux moyens de financement à court terme. Les besoins de trésorerie sont d'ailleurs devenus tels que la raffinerie a emprunté de l'argent à ses propres clients!!

Par ailleurs, il est à noter que la Samir continuait d’investir tout en sachant qu’elle n’arrivait même pas à couvrir ses besoins d’exploitation (qui étaient financés par les banques).

Dans ce sens, il faut préciser que la rentabilité économique de la Samir avait reculé de 12% entre 2012 et 2013 suite au lancement de nouveaux investissements sans évaluer le rendement des anciens.

De plus, sur la période s’étalant entre 2007 et 2015, la Samir a investi considérablement dans la modernisation de ses équipements (financée principalement par des crédits bancaires). De ce fait, la gestion de la Samir est encore une fois remise en question.

>Le reclassement des crédits douaniers et d'autres dettes fournisseurs (Glencore et BP Oil) :

Le crédit douanier (crédit dit d'enlèvement) s’élevant à 7,63 MMDH ainsi que les dettes vis-à-vis des deux créanciers Glencore et BP Oil, s’établissant respectivement à 1,1 MMDH et à 630 MDH, ont été réorganisés par la Samir en vue de les intégrer dans la classe du financement permanent (dettes à long terme), ce qui impacte l’indépendance financière de la société et affaiblit la part de ses dettes de financement permanent. 

Selon les analystes, il fallait les reclasser en dettes d’exploitation (dettes à court terme).

>S’agissant de la trésorerie nette de la société, celle-ci est négative sur la période allant de 2012 à 2015.

Rappelons que le rapport d’expertise met en évidence la situation des dettes communiquée par l’entreprise, s’élevant à 29,9 MMDH. Ainsi, il faut noter que ce chiffre ne prend pas en considération le redressement fiscal ni les pénalités à verser à l’Office des changes.

En effet, le montant de l’endettement, établit par l’Etat, avoisine les 45 MMDH. Selon nos sources, seuls 35 MMDH environ ont validés par le tribunal de commerce.

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