Exclusif. La rivalité entre jihadistes menace la sécurité internationale

Chercheur à la Quilliam Foundation de Londres, Charlie Cooper juge que l’actuelle rivalité entre les partisans de l’Etat islamique et Al-Qaida "va aggraver la situation sécuritaire". Avec les hommes d’Al-Baghdadi conquérants et Al-Qaida marginalisé depuis quelques mois, la concurrence risque d’être violente.  

Exclusif. La rivalité entre jihadistes menace la sécurité internationale

Le 2 juillet 2014 à 14h21

Modifié le 11 avril 2021 à 2h36

Chercheur à la Quilliam Foundation de Londres, Charlie Cooper juge que l’actuelle rivalité entre les partisans de l’Etat islamique et Al-Qaida "va aggraver la situation sécuritaire". Avec les hommes d’Al-Baghdadi conquérants et Al-Qaida marginalisé depuis quelques mois, la concurrence risque d’être violente.  

Selon Cooper, "l’augmentation de la violence extrémiste est prévisible à terme car c’est le moyen dont disposent les mouvements extrémistes pour marquer leur différence et leur présence sur le terrain et donc recruter et disposer de ressources".

Depuis la chute de Mossoul le 10 juin dernier, "le leader d’Al-Qaida Ayman Al-Zawahiri est contesté", indique Cooper. "Maintenant Al-Baghdadi et Al-Zawahiri vont vouloir se montrer plus combatifs l’un vis-à-vis de l’autre et de leurs adversaires communs". Dans son entretien avec Médias 24, Cooper utilise l’expression anglaise "to outjihad each other", que l’on peut traduire par "dépasser l’autre en jihad", pour signifier la vigueur prévisible de la compétition à venir.

Différentes informations non authentifiées de source indépendante, affirment que Aqmi, Al Qaida du Maghreb Islamique, vient de faire allégeance au nouveau "calife", tout en formulant par la même occasion de vives critiques contre Zawahiri et Al Qaida, accusés de mollesse.

Selon l’expert jordanien Hassan Abou Hanieh interrogé par le New York Times, "il est clair qu’au sein de la première et de la deuxième génération qui a lancé Al-Qaida, la plupart soutiennent Al-Zawahiri, mais la nouvelle génération est plus radicale et plus proche de l’EIIL".

Autre fait qui met Al-Qaida dans une situation inconfortable selon Cooper, "l’organisation de Ben Laden avait l’établissement de l’Etat islamique sur son agenda depuis plus d’une décennie et elle a échoué à le faire. L’EIIL l’a fait". Depuis la prise de Mossoul le 10 juin dernier, la direction de l’Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL) devenu ensuite l’Etat islamique (EI) et califat le 30 juin dernier appelle Al-Qaida à lui faire allégeance.

Depuis dimanche dernier, les hommes d’Al-Baghdadi estiment qu’ils sont les seuls à représenter les musulmans suite à la proclamation du califat. "Nous rappelons aux musulmans qu’avec cette déclaration du califat, il est dans l’obligation de tout musulman de faire allégeance au calife", indiquait Abou Al-Adnani porte-parole d’Al-Baghdadi .

Selon Cooper joint au téléphone par Médias 24 à son bureau à Londres, "les hommes d’Al-Baghdadi ont commencé à construire leur propre hôpital dans l’est syrien et ils démantèlent les services de sécurité existants là où ils passent. Ils construisent également des boulangeries semi-industrielles et encouragent tout ce qui a trait à la société civile".

Patrick Cockburn qui écrit de Bagdad pour The Independent indique que "de nombreux leaders sunnites à l’intérieur et à l’extérieur de l’Irak ont critiqué ou moqué la proclamation du califat, mais cela aura beaucoup d’attrait pour des millions de jeunes sunnites pour lesquels le statu quo politique et économique ne leur promet que chômage et pauvreté". Dès le 1er juillet sur les réseaux sociaux, les appels à rejoindre l’EI ont commencé.

Du côté de la violence politique et du terrorisme, Cooper juge que "les opérations spectaculaires au Moyen-Orient ou dans un pays occidental ne vont pas forcément avoir lieu dans les prochaines semaines car une grande opération du genre 11 septembre a besoin de plusieurs mois de préparation".

Par ailleurs, l’émergence de l’EI et la "proclamation du califat" crée du soutien à Al-Baghdadi et à ses hommes mais fait apparaître de nouveaux ennemis. Parmi eux se trouve Al-Qaida mais aussi Jebhat al-Nusra en Syrie qui qualifie l’Etat d’Al-Baghdadi de "califat-Twitter".  

Les regards de différents experts se portent également à l’heure actuelle sur ce que pourrait être la stratégie des troupes d’Al-Baghdadi au cours des prochaines semaines. Constatant que l’Etat islamique contrôle un territoire qui s’étire de la périphérie d’Alep en Syrie sur 670 km vers la province irakienne de Salaheddine à l’est, une étendue équivalente à la superficie du Royaume-Uni (243.000 km²), Charles Lister du Brookings Doha Center à Doha estime, sur BBC News, que "l’EI cherche à consolider ses positions aux frontières de la Syrie et de l’Irak" et "à tirer profit de sa réputation du moment pour dominer les groupes armés concurrents dans des zones qui ont une valeur militaire stratégique et en termes de ressources". 

"En Syrie, note Charles Lister, l’EI domine la lucrative région du nord-est et cherche à contrôler la zone frontière avec l’Irak autour de Deir Ez-zour et Hassakeh. En Irak, les points faibles du gouvernement à proximité de Bagdad constituent les cibles actuelles". Aujourd’hui l’EI est également le groupe combattant le plus riche de la région avec plus d’un milliard de dollars en caisse et des champs de pétrole du nord-est syrien qu’il exploite.

Pour l’analyste Aaron Zelin du Washington Institute et créateur du site jihadology.net, "l’annonce du rétablissement du califat peut constituer un nouveau succès pour l’Etat islamique (…). Ou cela pourrait marquer le début de la fin de la seconde tentative de l’Etat islamique de contrôler un territoire en moins d’une décennie". La première fois, c’était dans l’ouest irakien à la faveur des revers subis par Al Qaida face aux troupes américaines et irakiennes en 2004-2005.

Vous avez un projet immobilier en vue ? Yakeey & Médias24 vous aident à le concrétiser!

Si vous voulez que l'information se rapproche de vous

Suivez la chaîne Médias24 sur WhatsApp
© Médias24. Toute reproduction interdite, sous quelque forme que ce soit, sauf autorisation écrite de la Société des Nouveaux Médias. Ce contenu est protégé par la loi et notamment loi 88-13 relative à la presse et l’édition ainsi que les lois 66.19 et 2-00 relatives aux droits d’auteur et droits voisins.

Médias24 est un journal économique marocain en ligne qui fournit des informations orientées business, marchés, data et analyses économiques. Retrouvez en direct et en temps réel, en photos et en vidéos, toute l’actualité économique, politique, sociale, et culturelle au Maroc avec Médias24

Notre journal s’engage à vous livrer une information précise, originale et sans parti-pris vis à vis des opérateurs.