Sothema : la couverture universelle va quintupler la consommation moyenne de médicaments à l'horizon 2030

Lamia Tazi et Mohamed Tazi, DG et Directeur exécutif support de Sothema
| Le 15/2/2024 à 17:20
Le top management de Sothema est revenu sur les réalisations du groupe et les principaux leviers de croissance qui se dressent cette année. Avec l'arrivée de la Couverture sociale universelle, la consommation moyenne des médicaments, de l'ordre de 400 dirhams par habitant par an, pourrait tripler, voire quintupler d'ici six ans. Le groupe prévoit une vingtaine de lancements de produits cette année.

Après une crise pandémique qui a frappé le monde entier il y a quatre ans, le secteur pharmaceutique a pris une importance clé dans les politiques nationales, plaçant sa souveraineté à l'ordre du jour.

Le groupe Sothema a depuis pris une place centrale dans le projet de production locale de vaccins. Le groupe national avait collaboré avec Sinopharm lors de la première phase du projet, qui consistait à assurer la capacité de remplissage en flacons en salle blanche pour le vaccin anti-Covid 19, répondant à l’impératif sanitaire immédiat.

Le groupe a par la suite rencontré des difficultés d'approvisionnement en matières premières, liées à la guerre en Ukraine, mais a su montrer une forte résilience. Désormais, quels sont les challenges à relever et à quoi ressemble l'avenir pour Sothema ? Médias24 a posé trois questions au top management du groupe.

Médias24 : Comment s'annoncent les performances du groupe Sothema en 2023 ? Par la même occasion, pouvez-vous nous dire quels sont les grands chantiers qui s’ouvrent en 2024 ?

Sothema : Les chiffres pour l’année 2023 n’étant pas encore clôturés et consolidés, je ne peux donc vous communiquer qu’une estimation qui devrait normalement être proche de la réalité de cet exercice. En effet, en termes de chiffres d’affaires, Sothema devrait terminer l’exercice 2023 avec une croissance positive.

La Couverture sociale universelle (CSU) va tripler, voire quintupler la consommation moyenne de médicaments à l'horizon 2030

Quand on la situe dans le contexte ayant prévalu en 2023, et qui continue de prévaloir encore pour cet exercice, nous pourrons conclure qu’il s’agit bien d’une bonne performance. En raison des crises géopolitiques mondiales et de l’effondrement des lignes logistiques, l’industrie pharmaceutique nationale a souffert aussi bien d’une fluctuation des cours des intrants, à savoir les API (Active Pharmaceutical Ingredients), les excipients et les articles de conditionnement, que de l’instabilité des taux de change.

Malgré ce contexte difficile, Sothema a fait preuve d’une résilience et d’une agilité qui lui ont permis de bien préparer son outil de production à l’éventualité de cadences soutenues en période de forte demande publique et/ou privée. Nous avons éprouvé cela pendant la période du Covid-19 et nous avons fait la preuve de notre adaptabilité. Cela s’explique, entre autres, par nos investissements précurseurs et l’introduction de nouvelles méthodes et technologies comme l’industrie 4.0, le Lean Manufacturing, etc. Nous continuons sur cette lancée et nous prévoyons de maintenir notre excellence opérationnelle. Il faut également ajouter que la vague inflationniste sans précédent que connaît le monde, et dont le Maroc n’est pas à l’abri, a eu un certain effet ralentisseur sur les dépenses des ménages.

Cette situation a commencé à changer grâce à la généralisation de la Couverture sociale universelle (CSU) qui ajoutera 22 millions d’assurés supplémentaires, ce qui représente la perspective la plus prometteuse pour l’industrie pharmaceutique nationale. La CSU engendrera une hausse significative de la consommation moyenne de médicaments, qui devra passer de 400 dirhams par habitant, par an, au triple, voire au quintuple à l’horizon 2030.

Vu que la généralisation de la CSU se traduira par une augmentation considérable des hospitalisations prises en charge par l’Etat, nous pensons qu’elle aura un effet d’entraînement sur nos volumes d’affaires réalisés sur les soins hospitaliers et ceux des maladies chroniques, des gammes de traitement dont nous sommes l’unique player, voire le leader sur le marché. Je pense notamment aux sérums, à l’héparine, à l’insuline, aux traitements biologiques et aux thérapies hormonales, etc.

En 2024, nous prévoyons de lancer une vingtaine de nouveaux produits, avec un chiffre d’affaires prévisionnel de 110 MDH

- Quels sont les principaux leviers de développement cette année ? Y a-t-il de nouveaux produits qui arriveront sur le marché, d'éventuels projets de croissance externe, etc. ?

- En termes de leviers de développement, on peut citer le Time to Market qui représente plus qu’une fonction implémentée dans notre organisation ayant pour but d’accélérer la mise sur le marché de nouveaux produits, mais plutôt une véritable culture d’entreprise que nous essayons de promouvoir à tous les échelons de la société.

En 2024, nous prévoyons de lancer une vingtaine de nouveaux produits, avec un chiffre d’affaires prévisionnel de 110 MDH. Nous prévoyons aussi de passer à 50 nouvelles molécules dans notre pipeline pour les trois prochaines années. Pour tous ces lancements, il s’agit de produits à valeur ajoutée avec un focus sur les traitements biologiques destinés aux pathologies chroniques et lourdes. En rendant ces traitements disponibles et accessibles, Sothema apporte une solution aussi bien au système de santé publique qu’aux professionnels de santé du secteur privé.

Sothema a annoncé en 2023 l’ouverture de deux bureaux scientifiques, à Abidjan et à Riyad 

Au niveau international, le marché africain est devenu crucial pour l'activité de Sothema, avec environ une trentaine d'autorisations de mise sur le marché (AMM) en cours de déploiement dans la région. Cependant, ces autorisations sont tributaires des lenteurs réglementaires qui caractérisent le secteur pharmaceutique à l'échelle mondiale (il faut généralement de 2 à 3 ans pour obtenir l'autorisation de lancement d'un nouveau produit). Une situation qui devrait s’améliorer après l’implémentation de l’Agence africaine du médicament, et l’entrée en vigueur de la stratégie d’harmonisation réglementaire entre pays africains, annoncée lors de divers sommets de l’UA.

Dans cet ordre d’idées, Sothema a annoncé en 2023 l’ouverture de deux bureaux scientifiques, respectivement à Abidjan, en Côte d’Ivoire, et à Riyad, en Arabie saoudite. Ces deux marchés représentent un véritable levier de croissance.

En termes de croissance externe, Sothema poursuit l’implémentation de sa stratégie entamée depuis quelques années avec un cabinet international spécialisé, notamment en Afrique de l’Est. Des pourparlers avec des partenaires potentiels, institutionnels et privés, sont en cours en vue d’implanter des filiales en Afrique de l’Est, ou encore d’acquérir des unités pharmaceutiques dans ces territoires.

En plus de l'Afrique de l’Est, des opportunités de croissance externe concrètes ont été identifiées au Maroc et en Europe. Celles-ci permettront d'augmenter les capacités de production et d'explorer de nouveaux marchés.

 

- Pouvez-vous nous expliquer le challenge de la disponibilité des dernières molécules en Afrique, comme la directrice générale l’avait évoqué aux Assemblées annuelles du FMI et de la Banque mondiale en octobre dernier ?

- Les dernières molécules restent inaccessibles en Afrique en raison de la barrière du prix qui est largement supérieur au pouvoir d’achat du patient africain, ainsi qu’aux capacités budgétaires des pays africains, surtout ceux qui sont dépourvus de systèmes de prévoyance sociale. Par exemple, les traitements oncologiques les plus récents sont loin d’être à la portée des Africains en raison de leurs prix exorbitants. Cela exclut de facto les patients africains des opportunités de guérison représentées par les dernières thérapeutiques.

C’est pour résorber ce gap que Sothema s’illustre en investissant massivement dans l’accessibilité des thérapies dites "élitistes". À titre d’exemple, le fait que Sothema a mis sur le marché, en 2017, deux produits oncologiques issus de biotechnologie à des tarifs largement inférieurs aux molécules originales a permis de multiplier par six le nombre de patients marocains du cancer ayant pu accéder au traitement grâce aux économies réalisées sur les achats de nos biosimilaires.

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