Taxe sur les produits sucrés : l’effet sur les prix ne se ressentira qu’en 2025

Le gouvernement a proposé dans le PLF l’instauration d’une TIC sur les produits à base de sucre selon un schéma progressif sur trois ans. D’après une source de la profession, l’effet de cette taxe sera très limité les deux premières années. En revanche, une hausse générale des prix des biscuits, des confiseries, de la confiture et autres produits concernés sera visible dès la troisième année si le texte n’est pas modifié au niveau du Parlement.

Taxe sur les produits sucrés : l’effet sur les prix ne se ressentira qu’en 2025

Le 2 novembre 2022 à 19h19

Modifié 2 novembre 2022 à 19h19

Le gouvernement a proposé dans le PLF l’instauration d’une TIC sur les produits à base de sucre selon un schéma progressif sur trois ans. D’après une source de la profession, l’effet de cette taxe sera très limité les deux premières années. En revanche, une hausse générale des prix des biscuits, des confiseries, de la confiture et autres produits concernés sera visible dès la troisième année si le texte n’est pas modifié au niveau du Parlement.

Les produits sucrés subiront à partir de 2023 une TIC sur la base de la teneur en sucre de chaque produit. Cette taxe progressera en 2024 pour atteindre ses niveaux cibles en 2025.

Les produits concernés, selon la liste proposée par le PLF 2023, sont les biscuits, les confiseries, le chocolat, les barres chocolatées, le chocolat en tablette et en poudre, les autres chocolats fourrés et pâtes à tartiner, les yaourts à boire (présentés comme boissons), les desserts lactés, le lait concentré, les confitures et marmelades.

Le calcul de la TIC se fait sur la base de la teneur de chacun de ces produits en sucre.

Pour les biscuits par exemple, une taxe de 70 dirhams pour 100 kg sera payée lorsque le produit dépassera une teneur en sucre de 50 grammes pour 100 grammes de produits.

Cette taxe évoluera comme proposé par le gouvernement en 2024 pour une application pleine à partir de janvier 2025, pour atteindre au bout de la troisième année 210 dirhams pour une teneur en sucre de plus de 30 grammes.

La teneur en sucre baisse et le montant de la taxe augmente. L’objectif affiché étant de pousser les industriels à utiliser moins de sucre pour éviter de payer la TIC, et in fine, de pousser les citoyens à consommer moins de sucre pour des raisons de santé publique. Et tout particulièrement pour “lutter contre les maladies non transmissibles qui occasionnent des dépenses de santé extrêmement importantes”, peut-on lire dans la présentation générale du PLF.

Ce tableau ci-dessous montre comment cette taxe évoluera pour l’ensemble des produits concernés :

La taxe ne produira pas forcément l’effet escompté, selon un professionnel du secteur

L’objectif est donc de créer un effet sur les prix pour renchérir ces produits et réduire de facto leur consommation. Un objectif implicite était aussi escompté : celui de prendre d’une main ce que l’État donne de l’autre, via la subvention au sucre. Mais ce dernier objectif n’est visiblement pas celui que cible le gouvernement, puisque la caisse de compensation sera complètement réformée d’ici 2024 à travers le remplacement des subventions générales par des aides directes via le RSU. Le problème de la récupération de la subvention au sucre ne se posera plus en principe.

Une source du patronat, acteur du secteur agro-industriel, nous confirme que l’objectif du gouvernement n’est pas de générer des recettes supplémentaires, mais qu’il est d’abord éducatif. Mais il nous explique aussi que le moyen choisi par l’État n’est pas forcément le plus efficace pour atteindre cet objectif.

“Le but de cette réforme est d’encourager les citoyens à éviter la surconsommation de saccharose (sucre industriel). Toutefois, on oublie que 80% de la consommation de saccharose n’est pas d’origine industrielle, mais provient du sucre de bouche utilisé pour le thé, le café ou les gâteaux préparés à la maison”, souligne notre source. Selon elle, le moyen choisi par l’État est assez détourné et n’est pas forcément le plus efficace pour induire un effet sur la consommation de sucre. “Cette réforme va certes marquer les esprits, mais ne sera pas à même d’atteindre cet objectif de santé publique”, ajoute notre source.

En se basant sur les benchmarks internationaux, notre source, qui vend des produits à base de sucre au Maroc mais aussi à l’international, nous explique que cette taxe n’est pas le moyen le plus utilisé par les États pour réduire la consommation de sucre. Elle n’est pas appliquée en France, en Allemagne, aux Pays-Bas, en Belgique ; encore moins aux États-Unis qui ont un grand problème de santé publique lié à l’obésité par exemple.

“Aux États-Unis, il y a d’autres types de restrictions. L’État a décrété qu’il ne fallait pas exposer ces produits au jeune public. Dans les sorties de caisses, vous ne trouverez pas les produits à base de sucre dans les chaînes de distribution. Mais cela n’a pas produit les effets attendus, puisque l’on observe un autre comportement de consommation, celui des parents qui font désormais des stocks pour leurs enfants. Les volumes de consommation n’ont pas vraiment baissé”, relate notre professionnel du secteur.

La taxe, option choisie par le Maroc, pourrait également avoir peu d’effets. Notre interlocuteur se base en cela sur l’expérience du Danemark, qui fait partie des rares pays européens à taxer ces produits.

“Au Danemark, la taxe a induit une modification du comportement, mais pas dans le sens souhaité. Ce que l’on observe, c’est qu’on a fait des produits plus chers et qu’il y a davantage d’innovation qui donne une certaine forme d’attractivité à ces produits. La consommation de sucre n’a pas changé, et ce sont finalement les populations les plus démunies qui se sont retrouvées privées de ces produits.”

Pas d’impact attendu sur les prix en 2023 et en 2024

Venons-en justement au prix : quel effet cette taxe proposée dans le PLF aura-t-elle sur le prix de ces produits ?

Notre source estime qu’il y aura trois étapes selon le schéma de taxation graduelle proposé dans le PLF.

Lors de la première année (2023), aucun effet ne sera ressenti car la limite en sucre au-delà de laquelle la taxe sera appliquée est en deçà des niveaux actuellement utilisés par les industriels. Selon notre source, seuls 5% des produits pourraient être touchés par la taxe.

La deuxième année, l’effet restera limité. “On a normé les produits et chaque filière concerné a proposé une diminution de la teneur en sucre dans le temps. Celle qui est proposée par l’administration des douanes est à un niveau déjà relativement bas par rapport aux utilisations actuelles”, confie notre source.

Le problème se posera lors de la troisième année, où 99% des produits seront touchés par la TIC, explique notre source. C’est cette étape qui est contestée par les opérateurs.

“À partir de 2025, le niveau en sucre serait significativement bas et demanderait des efforts très particuliers et pas toujours possibles au niveau des formulations industrielles”, souligne ce professionnel du secteur.

Y aura-t-il un amendement patronal de cette étape ? Pas forcément, explique une source de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) : “Pour les deux premières étapes, les industriels ont décidé de suivre les recommandations du ministère des Finances et du ministère de la Santé. Pour la troisième étape, il y a des résistances, car le secteur ne voit pas comment il va atteindre les objectifs fixés par l’administration. Certains espèrent que ces objectifs seront redéfinis ou au moins étalés dans le temps. Mais la CGEM ne va pas proposer d’amendements dans ce sens et laissera les professionnels, représentés par la Fenagri (Fédération nationale de l’agroalimentaire, ndlr), se mobiliser au niveau du Parlement s’ils le souhaitent.”

La CGEM ne va donc pas proposer des amendements à la deuxième chambre contre ce projet. Surtout, nous confie notre source patronale, que les deux premières années ne posent pas problème et que cette taxe ne créera pas de distorsion dans le marché par rapport aux produits importés ou à l’informel.

“Normalement, les produits importés seront taxés également selon le même principe. Il n’y aura pas de distorsion au niveau du marché. Idem pour l’informel, qui n’est pas très présent dans ces filières ou qui est généralement de petite taille. La fabrication de ces produits est assurée essentiellement par des grandes sociétés transparentes. Il y aura certes un petit coup de pouce pour les entreprises qui ne jouent pas le jeu, mais ce ne sera pas significatif”, estime notre source de la CGEM. Elle tient toutefois à préciser que le gouvernement devra expliquer comment cette taxe sera appliquée, pour éviter justement de créer un biais à la concurrence et d’encourager ainsi l’informel.

“Le projet ne dit pas comment se fera cette taxation, comment le contrôle sera fait ; il n’indique pas non plus les amendes qui seront appliquées en cas de non-respect par les entreprises informelles notamment. Au niveau de la surveillance du marché, les choses ne sont pas encore bien claires”, conclut notre interlocuteur.

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