Pourquoi des femmes rejoignent-elles Da'ech?

Elles ont rejoint, en Syrie ou en Irak, le groupe Da'ech. Selon deux chercheurs, cela s'explique souvent par des traumatismes personnels, une quête existentielle contrariée ou l'adhésion à une utopie islamiste idéalisée.

Pourquoi des femmes rejoignent-elles Da'ech?

Le 19 septembre 2017 à 12h00

Modifié le 19 septembre 2017 à 12h00

Elles ont rejoint, en Syrie ou en Irak, le groupe Da'ech. Selon deux chercheurs, cela s'explique souvent par des traumatismes personnels, une quête existentielle contrariée ou l'adhésion à une utopie islamiste idéalisée.

Près de 10% des quelque cinq mille combattants européens qui ont rejoint, au cours des dernières années, Da'ech et son "califat" autoproclamé sont des femmes. Pour tenter d'expliquer la séduction qu'exerce sur elle le groupe terroriste, le psychanalyste, Fethi Benslama, et le sociologue, Farhad Khosrokhavar, ont étudié une soixantaine de cas.

"Nous avons cherché à comprendre pourquoi elles voulaient partir rejoindre le califat de Da'ech" explique à l'AFP Farhad Khosrokhavar, co-auteur du livre "Le jihadisme des femmes", sorti mi-septembre au Seuil.

"Une partie ont subi des traumatismes, réels ou imaginaires, mais l'engagement d'autres, surtout les très jeunes filles, s'explique par l'impatience de devenir adultes, de sortir de cette situation d'adolescence prolongée qui est souvent leur lot dans nos sociétés occidentales", ajoute le sociologue.

L'utopie jihadiste, le monde idéal prôné dans sa propagande par Da'ech, leur fait miroiter un rôle d'épouse de combattant, drapé des atours d'un prince charmant courageux et sincère, et de mère de "lionceaux", la prochaine génération de jihadistes, endoctrinés dès leur plus jeune âge.

"Une fois qu'elle se sont retrouvées sur le terrain, dans des conditions difficiles voire terribles, qui n'avaient rien à voir avec ce qu'elles pensaient trouver, beaucoup ont été désespérées, certaines ont tenté de revenir, quelques unes y sont parvenues, d'autres ont été tuées. La plus grande partie d'entre elles ont déchanté", dit M. Khosrokhavar.

"On aimerait bien qu'elles disparaissent"

"Da'ech est tout sauf tendre avec les femmes", écrivent en ouverture de leur ouvrage les deux chercheurs. "Traitement inégalitaire, enfermement dans des demeures closes où elles doivent attendre de futurs époux, interdiction de sortir seule dans la rue, imposition du voile intégral, inégalité criante des droits entre hommes et femmes. Tous les ingrédients qui offensent une conscience moderne sont là".

Malgré ça, la propagande de Da'ech parvient à toucher une corde sensible chez certaines, souvent jeunes voire très jeunes, qui trouvent dans ce carcan de règles, de normes et d'interdictions un anti-modèle au sein duquel elles parviennent à une sorte d'épanouissement, au moins dans un premier temps.

"L'islamisme radical qu'a répandu la propagande de Da'ech a promu le mythe d'une nouvelle féminité intégrale", expliquent Fethi Benslama et Farhad Khosrokhavar, "en même temps que la moralisation des rapports hommes/femmes et l'affirmation de normes surrépressives qui ont séduit un certain nombre d'adolescentes et de jeunes femmes en crise identitaire".

En raison des revers militaires successifs que connaît Da'ech en Syrie et en Irak, plusieurs centaines d'Occidentales, compagnes de jihadistes, et leurs enfants sont désormais prisonniers, notamment en Irak et en Turquie. Leur sort, dans les mois à venir, pose problème, assure Farhad Khosrokhavar.

"Côté européen, on n'est pas très enthousiaste à l'idée de leur retour", dit-il. "On aimerait bien qu'elles disparaissent de la scène. Mais il faudra bien prendre en charge celles qui reviendront".

"Elles sont souvent traumatisées, et leurs enfants surtout posent problème. Certains ont subi un lavage de cerveau, il faut vraiment s'en occuper sinon on aura beaucoup de traumatismes, et dans l'avenir on pourra avoir de jeunes écervelés qui pourront tuer pour un oui ou pour un non ou faire des tentatives d'attentats", dit-il.

"Il faut prendre ce problème à bras-le-corps: je sais bien que ça coûte cher, qu'on n'a pas de modèle établi pour la déradicalisation, mais on ne peut pas ne pas tenter. Il faut tâtonner, monter des dispositifs pour les prendre en charge", ajoute-t-il.

"Et il y a aussi celles qui sont totalement endurcies, qui y croient encore. Comme pour les hommes, il faut distinguer entre les repenties, les endurcies, les indécises et les traumatisées".

(Avec AFP)

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