Jihadistes de Sebta: “Cheikh Google” pointé du doigt

La justice espagnole vient de finaliser l’instruction d’un dossier de jeunes de Sebta partis combattre en Syrie en 2012. Les documents de la justice retracent leurs parcours. De 14 au départ, ils ne sont plus que six. Huit sont morts en Syrie, dans les combats ou lors d’attaques-suicides.

Jihadistes de Sebta: “Cheikh Google” pointé du doigt

Le 7 décembre 2014 à 10h55

Modifié le 7 décembre 2014 à 10h55

La justice espagnole vient de finaliser l’instruction d’un dossier de jeunes de Sebta partis combattre en Syrie en 2012. Les documents de la justice retracent leurs parcours. De 14 au départ, ils ne sont plus que six. Huit sont morts en Syrie, dans les combats ou lors d’attaques-suicides.

Leur voyage avait commencé le 7 avril 2012. Via Algésiras et Malaga, le groupe s’envolera dans un premier temps pour Antakya après une escale à Istanboul. Les enquêteurs espagnols ont pu identifier le premier hôtel qui les a accueillis, Mozaic, puis l’hôtel Ceylan. C’est là, indique El Pais, qu’ils ont tenu une première réunion avec un groupe arrivé de Casablanca.

Rachid le taxi

Parmi les huit jihadistes sebtaouis partis en Syrie, Rachid Wahbi est le plus connu. Il habitait le quartier El Principe situé sur une colline à l’entrée de l’enclave. Majoritairement musulman, El Principe est un quartier très urbanisé et des rues étroites. L’école y est espagnole mais la langue de la rue, l’arabe. Au milieu du quartier se dresse la mosquée Al Oumma, «la caracolas» (Les escargots) comme tout le monde l’appelle ici.

Depuis le départ de Rachid Wahbi et de ses amis Mustapha Layachi et Mustapha Mohamed de Sebta vers la Syrie en avril 2012, ceux-ci ont été surnommés les «soldats de Sebta» par la presse espagnole.

Pour les membres de l’association islamique qui gère la mosquée, «rien ne dit que ceux que l’on présente comme morts sont décédés. Nous n’avons aucune preuve». Les associatifs craignent la stigmatisation de leur communauté. Ils ne souhaitent pas que le monde extérieur établisse un lien entre les jeunes qui partent en Syrie, leur mosquée et leur quartier.

Ce vendredi 5 décembre à la grande prière, la mosquée est bondée. Près d’un millier de Sebtaouis y prient sur deux étages. Une salle est réservée aux femmes.

Le sermon ce vendredi porte sur le sens de la foi et la solidarité. L’imam demande aux croyants de vivre leur foi de manière généreuse, d’aider ceux qui sont dans le besoin et ceux qui récoltent des fonds pour construire des maisons de Dieu.

Selon un membre de l’association, «Sebta compte 20 mosquées, c’est-à-dire des lieux de prière avec un imam préposé qui y fait des sermons». La ville compte 90.000 habitants dont les deux-tiers sont musulmans ou d’origine marocaine.

Les leaders associatifs et religieux ici sont comme confrontés à la difficulté de faire passer un message de modération et de raison. «L’échec scolaire est très important parmi les jeunes de Sebta et parfois nous ne sommes même pas sûrs qu’ils comprennent le sens du sermon. Nous avons pensé traduire les sermons en espagnol mais nous craignons que certains nous disent qu’on ne peut traduire en langue étrangère le sens du Coran».

Rachid Wahbi  n’avait  aucun antécédent judiciaire à Sebta avant son départ pour la Syrie. Il était marié, père de deux jeunes enfants  et était propriétaire d’un taxi et d’une licence d’une valeur de 200.000 euros.

Deux mois après son arrivée en Syrie, Rachid Wahbi conduira un camion-suicide en juin 2012 au cœur d’une garnison de l’armée syrienne: 130 militaires seront tués. La vidéo a été mise en ligne sur le site du ministère espagnol de l’Intérieur en avril 2013 lorsque Madrid a annoncé les premières arrestations de jihadistes espagnols et leur inculpation pour faits de terrorisme.

“Cheikh Google“

Il faut un peu de temps pour que la parole se libère. Les membres de l’association qui s’occupe de la gestion de la mosquée Al Oumma expriment  leur incompréhension et leur désarroi face aux départs de jeunes.

Ils citent le cas d’une jeune femme de 21 ans, issue d’une famille bourgeoise du quartier d’El Sardinero. Elle aussi est récemment partie en Syrie, sans prévenir,  du jour au lendemain. «Nos sermons n’y peuvent rien.  “Cheikh Google“ est plus fort que tout. Internet et les réseaux sociaux font un travail de persuasion et de recrutement redoutable. Les jeunes qui partent viennent de tous les milieux sociaux».

La date du procès de ce premier réseau de jihadistes espagnols n’a pas encore été fixée. Médias 24 a pu apprendre que Madrid souhaite demander à Rabat l’extradition de Omar El Haddouchi, condamné dans le cadre de l’enquête sur les attentats de Casablanca de mai 2003 puis grâcié.

 Pour Madrid, El Haddouchi figure parmi les hommes qui ont incité les jeunes de Sebta à partir en Syrie. Les Espagnols notent que la Casa de Espana de Casablanca figurait parmi les cibles principales des attentats du 16 mai 2003.

Des récentes études marocaines, espagnoles ou américaines montrent que Sebta, Mélillia et les villes voisines de Tétouan ou de Nador constituent des foyers importants du jihadisme. Un tiers des jihadistes espagnols sur un total de 500 viennent de Sebta et de Mélillia, et un tiers des jihadistes marocains sur un total de 1.500 viennent des villes du Nord: Tétouan, Fnideq, Tanger, Nador.

Lors d’une intervention à la mi-novembre lors d’un forum sur le terrorisme global organisé par l’Institut El Cano à la Casa Arabe de Madrid, le secrétaire d’Etat espagnol à la sécurité Francisco Martinez indiquait que «la principale menace globale à l’Espagne provenait de ce que l’on appelle l’Etat islamique».

Lors de ce forum, Francisco Martinez avait demandé «à ne pas associer Sebta et Mélillia avec les endroits problématiques», admettant «qu’il fallait agir là il y avait un potentiel de radicalisation, en travaillant avec les communautés locales, notamment les communautés musulmanes, pour repousser le concept d’un islam violent».


 

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