
Ancien diplomate, docteur en sciences politiques.

Entêtement diplomatique et mort subite
Partager :
-
Pour ajouter l'article à vos favorisS'inscrire gratuitement
identifiez-vousVous possédez déjà un compte ?
Se connecterL'article a été ajouté à vos favoris -
Pour accéder à vos favorisS'inscrire gratuitement
identifiez-vousVous possédez déjà un compte ?
Se connecter
Le 14 avril 2025 à 16h04
Modifié 14 avril 2025 à 16h04Toutes les formes d’entêtement, qui réunissent les ingrédients de l’orgueil aveugle et de l’impuissance, sont mortelles. Cependant, l’entêtement diplomatique est de loin celui qui provoque la mort subite.
Dans le film égyptien وحدة بوحدة (1984), que l’on peut traduire par “On ne peut rien perdre pour attendre”, Salah Fouad (Adel Imam), qui travaille pour le compte d’une agence de publicité, lance à l’intention de la représentante d’une agence rivale, Maïssa (Merivet Amine), un canular selon lequel son agence va lancer un produit appelé الفنكوش.
Le PDG de l’agence (Gamil Rateb), un néophyte en matière de gestion d’entreprise, est jaloux des performances de Salah Fouad dont les méthodes peu orthodoxes attirent les critiques des autres agences. Il prend l’initiative de commander le tournage de spots sur ce produit fétiche sans s’en référer à Salah, qui était hors Le Caire. Un drame, car de produit, il n’en existe pas.
Il fallait se débrouiller une sortie et trouver un produit à appeler الفنكوش. Un produit est inventé sur la base d’une combinaison de substances bizarres par un chimiste extravagant. Ce dernier produit alors un spiritueux concentré. Le succès est immédiat.
Cependant, il fallait garder le produit en vie comme moyen de pression sur les autres agences. Le drame, c’est que Salah a cru pouvoir utiliser indéfiniment ce type de subterfuge. Peine perdue, car les importateurs des spiritueux interviennent, exercent des pressions et présentent un deal à Salah qu’il accepte sans hésiter. Le mensonge a fait long feu.
La référence à cette histoire traduit un lien indirect avec l’adage qui dit que les gens inventent des mensonges, les véhiculent et finissent par croire qu’ils présentent la vérité. Cela m’amène à l’objet de ce papier : L’ENTETEMENT.
L’entêtement en politique est un défaut qui, à force de se perpétuer, finit par ronger de l’intérieur la personne qui en fait son mode de comportement. Il ne permet pas de négocier pour trouver un terrain d’entente. Il encourage la castration intellectuelle. Il entretient l’adversité. Et, comble d’ironie, il finit par faire détruire les acteurs qui en font un usage abusif.
Espace safe haven, espace cimetière
L’entêtement est autrement plus dangereux, quand il est associé à la myopie diplomatique. La lecture erronée de l’échiquier géopolitique se base sur des paramètres dépassés qui font croire aux acteurs que cet échiquier est statique et que les mouvements ou agitations qui s’y produisent ne sont qu’un effet d’optique.
Un tel comportement est la résultante de plusieurs facteurs. Premièrement, la surestimation par l’acteur étatique de son rôle sur des échiquiers multiples dont il ne maitrise pas le mode opératoire. Il n’introduit pas dans sa perception de ce rôle les niveaux d’analyse requis, notamment la multiplication des formes d’intervention sur des fronts variables en termes de tension, de portée et de durée dans le temps.
Deuxièmement, la lecture approximative de la situation. Le contexte est soit passé sous silence, soit n’est pas observé à sa juste valeur. Le cafouillage qui en résulte étonne les adversaires, les indispose et, en définitive, les pousse à organiser la riposte en connaissance de cause.
Troisièmement, l’acteur étatique est sujet à plusieurs formes de pression. Cela le force à chercher des palliatifs pour y faire face avec l’espoir de gagner du temps et d'entrevoir des solutions de rechange provisoires. Dans la plupart des cas, la solution la plus facile à ses yeux est la projection d’une image truffée de préjugés et d’amalgames. Il recourt au bluff pour assaisonner le plat de son choix.
Quatrièmement, l’acteur étatique s’emmure dans une citadelle virtuelle et fabrique un passé historique imaginaire. Il recourt aveuglément à la méthode de l’appropriation des symboles culturels et civilisationnels des autres, notamment des voisins immédiats.
Les psychiatres parlent dans ce cas d’une dissonance causée par une saccade de déni dangereuse. Dès lors, la subtilisation des symboles appartenant aux autres est entretenue par une mémoire délibérément amnésique. Il en résulte que même l’imagination prend froid et se désolidarise avec les douches froides rituelles dont l’acteur incriminé est sujet à longueur de journée.
Comment appuyer cette lecture concrètement parlant ? Les citadelles sont construites pour se défendre contre les agressions étrangères. Elles sont accompagnées par l’installation de barrières pour stopper la progression des adversaires en cas d'attaque. Entre l’Afrique du Nord et l’Afrique subsaharienne, le Sahara a joué le rôle d’une barrière naturelle. Cependant, il a constitué un espace d’échange de toutes sortes. La colonisation a utilisé cet espace à des fins hégémoniques.
En quittant théoriquement cet espace, au lendemain de la vague des indépendances entre la fin des années 1950 et les années 1980, les puissances coloniales ont légué une lourde responsabilité aux nouveaux États indépendants. La passation se serait déroulée dans des conditions où la vassalité n’aurait pas été enterrée de manière définitive.
Plus concrètement, un espace aussi vaste que le Sahel et le Sahara aurait été confié à des puissances intermédiaires, lesquelles ont été autorisées à désigner des acteurs étatiques mineurs pour gérer les aspects sécuritaires déterminés en fonction d’une obligation de résultat. La répartition des rôles a été savamment réfléchie ; en ce sens que les acteurs mineurs choisis ont été eux-mêmes des créations étatiques nouvelles, c’est-à-dire sans passé historique incontesté en tant qu’entités indépendantes avant la conquête coloniale.
Le choix n’était pas innocent. Des pays comme la Libye ou l’Algérie ont été cooptés pour assumer ces rôles. C’est ainsi que Mouammar Kadhafi, de Libye, n’avait, depuis 1969, date du renversement de la monarchie des Senoussi, d’autre rêve que de construire ce qu’il appelait "Les États-Unis du Sahara".
Ce projet remonte à la période coloniale durant laquelle l’idée de la création d’un espace saharien berceau de « la nation touarègue » avait été envisagée. Les ambitions de Kadhafi lui avaient fait miroiter l’idée de devenir roi des rois africains, pour utiliser sa propre expression imagée.
L’Algérie, pour sa part, a utilisé cet espace à la fois en tant que barrière et comme recul stratégique. Étant elle-même vulnérable et une cible du séparatisme touareg tel que promu par Kadhafi et les partisans de l’idée de « diviser pour régner », l’Algérie s’est inscrite dans une vision hégémonique entretenue, plus concrètement durant les années 1970. En effet, durant ces années, le principe de l’intangibilité des frontières dont elle a bénéficié au lendemain de son indépendance commençait à être contesté.
Le souci majeur des décideurs algériens a été que les territoires dont leur pays a hérité ne puissent jamais être réclamés par les pays voisins. Les accords que l’Algérie a conclus avec le Mali, le Niger, la Mauritanie et le Niger en 1983 entrent dans le cadre de cette vision.
Prenons le cas du Mali. La situation, comme me l’avait confié un diplomate malien, a été que les différents gouvernements maliens, depuis le renversement de Modibo Keita (1960-1969), avaient eu le couteau algérien sur la gorge. Et ce n’est pas pour rien que la révolte des dirigeants maliens actuels constitue une manifestation d’un ras-le-bol politique, diplomatique et sécuritaire contre l’Algérie qui sent l’ascendance géopolitique lui filer entre les mains.
Le ras-le-bol politique, diplomatique et sécuritaire des dirigeants maliens se situe dans la droite ligne de leur rejet de la politique française dans la région. Et donc, le rejet de la sous-traitance géopolitique que l’Algérie (et la Libye sous Kadhafi) a mise en œuvre depuis quatre décennies au moins. Une conclusion s’impose à ce stade de l’analyse : le Sahel, qui était un safe haven pour l’Algérie en tant qu’intermittent stratégique, devient un cimetière pour ses ambitions hégémoniques.
Lors d’une discussion amicale avec des diplomates avérés de pays d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale, une observation a été dégagée selon laquelle la tentation hégémonique dont fait preuve l’Algérie ne trouve pas d’explication autre que la fuite en avant. Une fuite qui balise le terrain à ce pays pour regagner le musée de l’histoire sans gloire.
Mes interlocuteurs n’ont pas pu s’empêcher de rire du communiqué du ministère des Affaires étrangères algérien qualifiant le gouvernement provisoire malien de junte militaire sans légitimité politique et en utilisant une terminologie frisant la vulgarité. Alger véhicule ainsi une leçon de morale politique entachée d’une sinuosité qui produit l’incohérence et omet de nettoyer chez-soi au préalable.
L’explication en est que les décideurs de ce pays auraient raté l’opportunité d’être une puissance régionale fédératrice. Toutefois, revers de la médaille, pour le faire, il eût été nécessaire d’avoir des repères historiques solides. L’Algérie n’en a pas. Les seuls dont elle peut se vanter ont été produits par les pays voisins, qui, eux, ont une histoire politique et diplomatique avérée.
Narratif insipide, déni suicidaire
À la suite de l’enclenchement de la crise entre le Mali et les péripéties que l’on connait allant jusqu’au rappel des ambassadeurs pour consultation, les observateurs des affaires africaines ont été surpris du langage utilisé dans certains communiqués ou insertions médiatiques en Algérie.
Entre Néron et Machiavel, les décideurs sages choisissent ce dernier pour pouvoir gagner du temps sans perdre au change. Les politicologues et les historiens des idées politiques se réfèrent à Néron pour expliquer les politiques auxquelles recourent les détenteurs du pouvoir pour échapper à la vindicte populaire et éviter de se faire éjecter. Ils optent pour la terre brûlée. Ils font comme Néron. Ils brûlent la cité et se barricadent derrière des citadelles de justifications sans grande conviction. Ils se font brûler avec.
Les politicologues et les historiens des idées politiques ont un faible pour Machiavel qui a proposé un paradigme qui réussit magistralement la combinaison entre la ruse et le réalisme politique pour obtenir gain de cause et neutraliser les adversaires des détenteurs du pouvoir. Il les met en garde contre l’orgueil, l’égoïsme et l’aveuglement.
Le génie des dirigeants digne de ce nom réside dans la faculté et l’intelligence d’adaptation aux circonstances. L’adaptation est importante pour leur permettre de rediriger leurs boussoles en connaissance de cause. Cela peut être plus facile pour un dirigeant individuel qui prend ses décisions de manière autoritaire et les impose aux autres acteurs en situation de subordination.
Cependant, l’adaptation est plus difficile, sinon impossible, quand on se retrouve devant un pouvoir oligarchique dont les acteurs jouent au ping-pong pour garder une certaine distance entre eux en matière d’exercice de l’ascendant intégral. Le risque dans cette configuration est que, du fait que le pouvoir est compact, il devient hermétique.
La lutte au sein du système de prise de décision où l’oligarchie entretient la confusion fait que les acteurs qui commencent à se faire larguer adoptent le modèle Néron : la terre brûlée et "après moi, le déluge".
Il y a aussi une autre option qui se résume dans la maxime de "Laisser le temps au temps" (expression empruntée à Cervantès dans Don Quichottes de la Manche, 1605 et 1615), sans abandonner l’option réalisme. Le pari se joue sur le contexte immuable et sur la capacité des acteurs à faire preuve de résilience dans la défense de ce qu’ils estiment être l’intérêt national de leur pays.
L’histoire nous enseigne que saisir les opportunités par des décideurs politiques éclairés s’avère un comportement intelligent et salutaire. Or, souvent, il est trop tard. Des exemples dans la périphérie arabe ont été légion durant les années 1990 et 2000.
En Irak, Saddam Hussein, le vent en poupe à cause d’une lecture confuse de la géopolitique durant les années 1980-1990, a été contraint entre 1991 et 1993, lors de la deuxième guerre du Golfe, et en 2003, à la veille de la troisième guerre du Golfe, de faire des concessions. Time out. S’il est vrai qu’il était conscient que, même s’il avait accepté les premières propositions de résolution du conflit avec le Koweït, cela n’aurait pas dissuadé les États-Unis d’envahir le pays, il avait tort de ne pas tenter le coup. Il a choisi Néron au lieu de Machiavel.
En Libye, Mouammar Kadhafi a cru, à un certain moment, qu’il avait une mission sacrée de remettre de l’ordre dans l’espace maghrébin et moyen-oriental. En fait, il s’agissait de créer un état de désordre politique et diplomatique permanent. Une fois qu’il s’est aperçu qu’il avait été utilisé, comme une sorte de dindon de la farce, il a voulu composer. Trop tard. Time out. Car la géopolitique des années 2000 avait changé.
En cherchant à acheter des dirigeants européens, et même à intervenir dans les processus électoraux intranationaux, il s’est tiré une balle dans la tête. Car il a dévoilé au grand jour sa vulnérabilité et son impuissance. Il avait basé son pouvoir sur un discours révolutionnaire qu’il avait vite abandonné. Entre Néron et Machiavel, il a choisi finalement Néron. Il s’est fait engloutir dans les cendres de son orgueil révolutionnaire tige de roseaux.
En Syrie, le souci de sauver une minorité alaouite au pouvoir a poussé la famille al-Assad à jouer de l’ambivalence au moment où il lui a été confié la mission de tenir le Liban divisé sous son emprise. La mémoire controversée de Bilad as-Sham (Le Grand Levant) a pesé dans la balance. La contrepartie aurait été, dans un premier temps, de s’inscrire dans la géopolitique des compromis telle qu’initiée au lendemain de la conclusion des accords de Camp David entre l’Égypte et Israël en 1978.
La contrepartie aurait été, dans un deuxième temps, de prendre le train en marche dans le processus de paix plus élargi au Proche-Orient résultant de la conférence de Madrid de 1991, des accords d’Oslo entre l’Autorité nationale palestinienne et Israël en 1993 et de l’accord de paix de Wadi Araba entre la Jordanie et Israël en 1994. L’avenir des plateaux du Golan était au centre des négociations sur un compromis en plusieurs étapes.
Des négociations secrètes entre la Syrie et Israël ont eu lieu, mais l’ambivalence citée plus haut a été la locomotive de la stratégie syrienne. Une perte de temps et d’opportunité. Néron ou Machiavel ? Ni l’un ni l’autre sous Hafez al-Assad, plutôt une naïveté politique cultivée par une alliance avec l’Iran et ses bras militaires dans la région. Avec Bashar al-Assad, Néron a été ressuscité, au lendemain du Printemps arabe. Une stratégie qui a fini par faire tomber le régime.
En Égypte, le référentiel historique du pays et sa position géographique stratégique étaient à la fois une bénédiction et une malédiction. Plusieurs guerres et incidents (1948, 1956, 1967 et 1973) ont laissé des séquelles. Toutefois, il est arrivé un moment où il fallait se mettre au diapason de la réalité sur le terrain. Anouar al-Sadat l’a fait au lendemain de la guerre d’octobre contre Israël en 1973.
Entre Néron et Machiavel, Sadat a choisi ce dernier contrairement à son prédécesseur Gamal Abdenasser. Il conclut un traité de paix avec Israël, récupère le Sinaï et balise le terrain à d’autres arrangements. Réalisme, idéalisme ou trahison, en politique seuls les résultats comptent.
Entre Néron et Machiavel, il y a une troisième option qui est celle de "Laisser le temps au temps" et de jouer sur ses propres atouts et les atouts des adversaires. Le Maroc l’a fait respectivement avec feu le roi Mohammed V, feu le roi Hassan II et encore mieux avec le roi Mohammed VI. Le principe est de ne pas fermer la porte au dialogue et aux négociations, mais de s'en tenir à une fermeté soft. Briser la glace, tendre une main, mais garder l’autre main sur la gâchette.
À l’instar de l’Égypte, la position stratégique du Maroc cultive les convoitises et attise les rivalités. Elle impose en conséquence de disposer de la souplesse requise pour s’adapter et organiser la défense. Le Maroc a su, en dépit de l’adversité de toutes parts, faire usage de ce que Joseph Nye appelle tantôt soft power, tantôt smart power.
Finalement, le Maroc est en train de gagner la bataille contre un ensemble d’acteurs proxies, à la fois étatiques et non étatiques. Avec la détermination et la croyance en la justesse de sa cause, il trace les contours d’un espace géopolitique qui le met en valeur sans le pousser à sombrer dans l’orgueil ou céder à la tentation de devenir un intermittent stratégique asymétrique.
États-proxies et États recruteurs de proxies
Depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, le recentrage des alliances internationales a promu les études se rapportant aux déterminants de la puissance, à la conception, à la mise en œuvre de la politique étrangère des États. D’autres études ont été consacrées à la désignation des acteurs qui orientent la décision sur le plan national et international. C’était plus ou moins clair dans la mesure où la classification entre les amis et les adversaires a été très claire.
Le concept allié et adversaire a ensuite évolué pour échafauder un concept qui est devenu un pilier de certaines doctrines militaires, en l’occurrence l’acteur-proxy dans sa double dimension : le proxy étatique et le proxy recruteur de proxies.
Pour mieux jouer ce rôle, les concepteurs du paradigme estiment qu’il est nécessaire de maintenir les espaces géopolitiques fragiles en état d’instabilité permanente. C’est ce que des acteurs africains et arabes ont fait durant plus de quatre décennies sans qu’ils en fussent conscients. Ces acteurs proxies ont bénéficié d’une marge de manœuvre limitée, mais suffisante pour être sous les feux de la rampe et semer le désordre.
Pour reprendre les exemples de certains d’entre eux déjà cités, on peut retenir le cas de Saddam Hussein qui a été utilisé entre 1980 et 1988 pour entrer en guerre contre l’Iran devenu République islamique en 1979. L’Iran, lui-même, sous la dynastie Pahlavi, a été utilisé pour jouer le rôle de gendarme de l’Occident au Moyen-Orient avant d’être balayé par une révolution orchestrée à partir de l’extérieur pour affaiblir les monarchies du Golfe et maintenir l’emprise sur les richesses dont regorgent leurs sous-sols.
La Libye où Mouammar Kadhafi a été utilisé pour se débarrasser de la monarchie des Senoussi qui était moins flexible aux exigences des compagnies pétrolières occidentales. L’arrivée de Kadhafi au pouvoir en 1969 a été un projet américain.
La Syrie où Hafez al-Assad a été utilisé dans l’entretien des luttes idéologiques fratricides, non seulement contre l’Irak, mais aussi contre l'Egypte. Ce fut une politique de diversion bien orchestrée par les héritiers de Laurence d’Arabie (Thomas E. Lawrence, 1888-1935), à laquelle Hafez al-Assad n’avait pas fait attention.
L’Égypte a été utilisée selon le même schéma. Gamal Abdenasser a cru qu’il pouvait façonner le monde arabe à sa manière. Il n’était pas conscient du fait que l’objectif principal derrière le nationalisme arabe soutenu en sourdine par des centres de décisions en Occident et en Union soviétique (grâce aux orientalistes avérés) était de raviver la question des minorités ethniques et religieuses et celle des frontières héritées de la colonisation.
L’Algérie est de loin l’exemple le plus édifiant. Ayant pris naissance en 1962, elle a assuré son existence moyennant un certain nombre de concessions dont le public est désormais conscient. L’un des rôles de proxy dont elle a été chargée a été de maintenir le Maghreb et l’Afrique subsaharienne dans une situation d’instabilité chronique.
La question des frontières et l’engagement dans une politique de dénigrement des pays qui ont une longue tradition étatique ont été le fer de lance de la politique étrangère algérienne, notamment à partir de 1965, date du renversement du président Ahmed Ben Bella par le colonel Houari Boumediene. Or, présentement, l’Algérie, l’acteur-proxy, a atteint la limite d’âge et doit prendre sa retraite.
L’institution militaire ne peut aucunement l’accepter. Alors, peut-être, les éléments qui tirent les ficelles dans les coulisses seraient-ils tentés d’être plus convaincants que Néron. Ils sont conscients que l’Algérie est plus que jamais isolée. Il est loin, le temps où, inconsciemment, une partie de la classe politique considérait l’Algérie comme un département d’outre-mer (DOM). Elle se basait sur le fait de bénéficier de privilèges qui lui ont été consentis en vertu des accords d’Evian et des accords additionnels de 1968 et 1994.
La question du Sahara marocain, dont l’Algérie a fait son cheval de Troie, est en passe d’être résolue sur la base du plan marocain d’autonomie. Un plan d’autonomie inscrit dans la politique globale de la régionalisation avancée dans laquelle le Maroc décide de sérieusement s’engager pour boucler la boucle. Non, ENTETEMENT. Non, DENI. Non, Over my dead body. Ou peut-être, pourquoi ne pas chercher une échappatoire pour gagner du temps ? La Tunisie. Oui, la Tunisie est le seul pays qui reste à l’Algérie pour faire croire aux Algériens qu’elle a encore son mot à dire dans la géopolitique de l’Afrique et de la Méditerranée.
Des Tunisiens mettent en garde contre un plan sordide que certains centres de décision en Algérie auraient confectionné pour transférer des populations des camps de Tindouf vers la Tunisie. Ces populations sahraouies disposent de passeports et de cartes d’identité algériennes et elles peuvent facilement obtenir des cartes de séjour. Des milliers de personnes auraient déjà été autorisées à s’établir en Tunisie.
Car la même politique, qui avait été mise en œuvre à l’endroit de la Mauritanie depuis quatre décennies déjà, n’a pu aider à obtenir les résultats escomptés. En effet, de nombreux dirigeants du Polisario ont obtenu la nationalité mauritanienne à la suite de la signature de l’accord de paix entre Mohamed Khouna Ould Haidalla et la pseudo-rasd, en 1979. De même, la stratégie de déplacer massivement une grande partie des populations des camps de Tindouf vers le nord de la Mauritanie que l’Algérie avait tentée à partir de 2020, a pour l’instant échoué.
Naturellement, ces acteurs proxies ont eu recours à la sous-traitance et ont soit créé, soit soutenu des proxies non étatiques. Certains de ces derniers ont été à l’origine du chaos dont leurs pays souffrent présentement. Or, il est loin le temps où le nirvana d’une gloire virtuelle faisait planer sur les cieux de la puissance éphémère et facilitait l’entretien de la politique du déni.
En somme, une politique qui ne fait pas de projections et encore moins de remises en cause des politiques suivies jusqu’alors est une politique stérile et dangereuse. Quand une saccade de tuiles tombe sur les têtes des décideurs nonchalants (ou trop confiants en la capacité de marchandage de leur pays), ils lorgnent Néron au lieu de Machiavel et répugnent, en conséquence, à la maxime de "Laisser le temps au temps". Ils se font aspirer par le sable mouvant de leur ENTÊTEMENT susceptible de provoquer leur MORT SUBITE.
Vous avez un projet immobilier en vue ? Yakeey & Médias24 vous aident à le concrétiser!