Blé tendre : dans l'incertitude sur les intentions de l'État, les minotiers puisent dans leurs stocks

Le niveau des stocks de blé tendre, qui représente 80% de la consommation nationale de céréales, couvre moins de trois mois de consommation, contre environ six mois l’an passé, apprend-on de source professionnelle. Ce niveau risque de baisser encore si le flou persiste autour des montants de restitution versés par l’État aux minotiers.

Blé tendre : dans l'incertitude sur les intentions de l'État, les minotiers puisent dans leurs stocks

Le 28 mai 2023 à 16h00

Modifié 29 mai 2023 à 15h35

Le niveau des stocks de blé tendre, qui représente 80% de la consommation nationale de céréales, couvre moins de trois mois de consommation, contre environ six mois l’an passé, apprend-on de source professionnelle. Ce niveau risque de baisser encore si le flou persiste autour des montants de restitution versés par l’État aux minotiers.

La production céréalière nationale devrait atteindre près de 55 millions de quintaux en 2023, soit une amélioration de 62% par rapport à la campagne précédente. Toutefois, "celle-ci peut être compromise par les dernières pluies, qui peuvent impacter la qualité de certaines céréales qui n’ont pas été moissonnées, notamment dans les régions montagneuses", estime Abdelkader Alaoui, président de la Fédération nationale des minotiers (FNM).

"Les 55 millions de quintaux annoncés ne sont que des prévisions. Ceci étant, même avec cette production, le pays est contraint de recourir à l’importation pour combler les besoins de la consommation humaine et animale."

Les minotiers dans le flou

Le Roi Mohammed VI avait annoncé, le 19 mai en Conseil des ministres, le lancement d'un programme de soutien aux agriculteurs, avec une enveloppe budgétaire estimée à 10 milliards de dirhams. Elle sera notamment destinée à l’affectation de fonds pour l’importation du blé tendre, afin d’assurer l’approvisionnement normal du marché jusqu’en décembre 2023. Cependant, les minotiers se disent dans le flou depuis le début du mois de mai, étant donné que "l’Etat n’a pas encore annoncé les montants de restitution qui leur seront versés", nous explique Abdelkader Alaoui.

"L’objectif principal des minotiers est d’assurer l’approvisionnement dans leurs unités de manière continue, comme à leur habitude. Mais face aux nouvelles décisions prises par le ministère de l’Agriculture, nous n’avons plus de visibilité sur les montants de restitution."

En effet, dans un appel d’offres récent lancé par l’Office national interprofessionnel des céréales et des légumineuses pour l’approvisionnement des minotiers industriels en blé tendre (près de 1,27 million de quintaux) destiné à la fabrication des farines subventionnées, il est précisé que le différentiel de prix fera l’objet d’une régulation entre l’ONICL et le titulaire du marché. Cette régulation se fera après l’exécution de l’importation.

"Nous sommes en train de spéculer sur un marché international sur lequel nous n’avons aucune visibilité. Le ministère peut bien annoncer le montant de la restitution, et si celle-ci est méritée, elle est perçue par les importateurs. Dans le cas où les cours mondiaux baissent, il n’y aura pas de restitution." C’est une sorte de garantie.

De ce fait, "nous sommes en train de puiser dans nos stocks. Et sans aucune visibilité sur la restitution qui nous sera accordée en juin, les importations seront à l'arrêt. Les importations du mois de juillet risquent également d’être compromises. Cette situation est très dangereuse pour le stock national de blé tendre, d’autant plus que l’importation par bateau nécessite une préparation et une commande au moins 15 à 20 jours à l’avance".

Le stock actuel couvre moins de trois mois

Selon nos informations, le stock actuel de blé tendre couvre moins de 3 mois de consommation, contre cinq à six mois l’an dernier. Abdelkader Alaoui estime que "ce niveau risque de baisser d’une manière substantielle, si aucune mesure n’est mise en place".

"Le prix actuel de la récolte nationale s’élève à 300 DH par quintal, malgré sa qualité moyenne. Et même à des prix très bas, le blé arriverait de l’étranger aux alentours de 300 DH/q", alors que dans le contrat-programme avec les minotiers et les boulangeries, le prix du blé rendu moulin déterminé par l’Etat s’élève à environ 260 DH/q. Ce ne sont certainement pas les minotiers qui prendront en charge ce différentiel, vu le niveau de leurs charges déjà très lourd."

Ce flou risque également d’impacter le prix du pain subventionné par l’Etat, qui est actuellement de 1,20 DH, d'après notre source. Rappelons-le, ce dernier est à base de farine spéciale, produite à partir de blé tendre. C’est le prix de ce blé, acheté par les minotiers à 260 DH/q qui leur permet de vendre la farine, notamment aux boulangers, à un montant fixé à 350 DH/q et, par ricochet, à ces derniers de mettre en vente le pain classique à 1,20 DH la pièce. Cet équilibre risque donc d’être bouleversé.

"Auparavant, ce différentiel était ce 50 DH. Aujourd’hui, il peut être d'environ 30 DH, mais ce n’est pas rien quand la quantité est élevée, d'autant plus que les coûts d’emballage ont augmenté, ainsi que les coûts de l’énergie et autres, alors que le prix de la farine, lui, est resté à son niveau."

"On demande donc à être fixés sur le montant de la restitution, pour que les opérateurs puissent acheminer du blé en provenance de France ou d’ailleurs. Si ce flou persiste, il n’y aura pas d’importation, et même si importation il y a, les quantités seront très faibles. Au lieu d’essayer d’acheminer le maximum de stock comme nous l’avons fait durant les années précédentes, les importateurs vont travailler en flux tendu."

Rappelons par ailleurs que les importations de blé tendre se font à partir de France, d’Allemagne, de Pologne, de Roumanie et d’Amérique latine principalement.

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