Hyperaspis trifurcata, une coccinelle au secours des cactus du Royaume
La coccinelle trident est en mesure d’éradiquer en cinq ans la cochenille qui ravage les cactus du Royaume, dont les fruits sont particulièrement appréciés des Marocains. Toutefois, l’efficacité de ce traitement écologique et peu onéreux dépend de la constitution d’un élevage de l'insecte originaire du Mexique.
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Chady Chaabi
Le 28 mai 2023 à 16h13
Modifié 4 mars 2024 à 15h56La coccinelle trident est en mesure d’éradiquer en cinq ans la cochenille qui ravage les cactus du Royaume, dont les fruits sont particulièrement appréciés des Marocains. Toutefois, l’efficacité de ce traitement écologique et peu onéreux dépend de la constitution d’un élevage de l'insecte originaire du Mexique.
Le Maroc a fait un pas décisif dans sa quête d’un remède à la cochenille, un ravageur qui a fait des dégâts considérables dans les champs de cactus ces dernières années. Ce jeudi 25 mai à Agadir, la Fondation Dar Si Hmad a dévoilé un nouveau traitement biologique réputé infaillible contre la cochenille : la coccinelle trident.
Hormis dans certaines zones épargnées du nord et du sud du pays, la cochenille a en effet décimé les cactus du Royaume, au point que ces derniers n'assurent plus un approvisionnement suffisant du marché national. Bien que cette plante à fleurs tolère la sécheresse, elle est sans défense face à la cochenille (Dactylopius Opuntia) dont les attaques rapides et répétées sont dévastatrices.
Avant l’apparition de cet insecte au Maroc en 2014, les 150.000 hectares produisaient entre 1,2 et 3,5 millions de tonnes de figues de barbaries, avec un rendement compris entre 8 et 25 tonnes/hectare. Et ce, pour un revenu situé entre 20.000 et 40.000 DH par hectare.
Mais à l’image de l’année dernière, la saison d'été va sans doute accentuer la pénurie de figues de barbarie dans le pays, augmentant de facto leur prix qui était compris entre 1,50 et 3 DH l’unité en 2022. Cet aspect économique souligne l’importance de la récente découverte annoncée par la Fondation Dar Si Hmad, en collaboration avec l’Institut national de recherche agronomique (INRA).
Une espèce identifiée en 2017
En réalité, cette découverte ne date pas d’hier. C’est une mission d’exploration effectuée en 2017 au Mexique, par des chercheurs de l’INRA, qui en est à l’origine. "A l’époque, nous avions identifié trois espèces de coccinelles qui font la prédation de la cochenille", nous explique le Dr Rachid Bouharroud, chercheur et expert en entomologie et lutte intégrée des cultures.
Les résultats obtenues lors de cette mission n’ont pas été exploités. Il a fallu attendre cinq années pour que le dossier soit remis sur la table, dans le cadre du projet d'expérimentations écologiques de lutte biologique intégrée contre la cochenille, mené par la Fondation Dar Si Hmad, avec l'appui du Programme de microfinancements du fonds pour l’environnement mondial.
À ce titre, l’INRA a été contactée par la fondation afin d’apporter son expertise dans la recherche de solution biologique à la prolifération de la cochenille. "Nous leur avons proposé d’importer la coccinelle trident du Mexique", se souvient le Dr Bouharroud, qui était d’ailleurs membre de l’équipe de chercheurs derrière la création de six variétés de cactus résistantes à la cochenille.
Avec le concours d’une société spécialisée dans l’élevage d’insectes prédateurs à Agadir, la Fondation Dar Si Hmad s’est procuré 1.000 coccinelles trident. Mais auparavant, il a fallu obtenir l’accord de l’Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA), qui a exigé un confinement strict ayant duré deux mois. C'est ainsi que l’expérimentation a débuté en octobre 2022.
"Nous avons reçu les 1.000 individus pour réaliser des essais dans le domaine de l’INRA d’Agadir et dans la région d’Ait Baâmrane", indique le Dr Bouharroud. Dans un premier temps, l’expérience a été lancée dans des zones restreintes pour évaluer l'adaptabilité de la coccinelle.
"Certains lâchers ont été effectués dans des serres en filet et d’autres en plein champ. Dans les deux cas, la coccinelle s’est très bien adaptée à son environnement, et la cochenille a été éradiquée à 100% dans un rayon de 100 mètres", assure notre interlocuteur.
La coccinelle trident s’adapte à plusieurs climats
Cette expérience a également connu un franc succès dans d’autres pays. La coccinelle trident a d’abord été lâchée en Israël, avant d'être observée dans d’autres pays, comme la Jordanie. Et à "Sidi Ifni, nous avons constaté une très bonne régénération, car les racines des cactus sont encore intactes", se félicite le Dr Bouharroud.
"Nous avons également opéré des lâchers dans plusieurs sites, répartis entre les zones montagneuses et le littoral, où l’amplitude thermique est différente. L’idée était d’évaluer l’efficacité et l’adaptabilité de cette coccinelle dans plusieurs environnements. Il s’est avéré que la coccinelle s’adapte parfaitement à toutes les conditions climatiques."
En effet, contrairement à d’autres insectes qui ont été étudiés, celui-ci survit aussi bien dans le littoral qu'en montagne, une caractéristique déterminante dans la lutte contre la cochenille. Et pour cause, dans les régions montagneuses, "il est impossible de traiter chimiquement la cochenille car le cactus y est difficile d’accès", explique le chercheur de l'INRA.
Si le traitement chimique épandu par avion est une solution sur le papier, il est à proscrire sur le terrain, car il peut avoir "des répercussions négatives sur l’environnement et les habitants. De toute façon, en montagne, les avions ne sont pas capables d’atteindre des altitudes très basses", poursuit-il.
20% à 25% moins onéreux qu'un traitement phytosanitaire
L’aspect financier est aussi l’un des atouts majeur de ce traitement biologique. En comparaison aux traitements phytosanitaires, il est 20% à 25% moins onéreux. "Les économies pourraient être encore plus importantes grâce au développement de l'élevage en masse. Sans compter les avantages en termes de préservation de l’écosystème. Car les produits phytosanitaires polluent le sol et ont des effets négatifs sur l’apiculture."
Justement, la production en masse de cette coccinelle répondra aussi à d'autres défis. D’abord, la coccinelle trident ne se nourrit que de la cochenille. "Quand cette dernière est éradiquée, le prédateur meurt de faim", souligne le Dr Bouharroud.
Sachant que la cochenille peut réapparaître, il est donc capital de posséder un élevage de cette coccinelle afin de parer à cette éventualité. Ensuite, la généralisation de ce traitement à l’échelle nationale ne peut se faire qu’après une production en masse du coléoptère.
Un besoin urgent, d’autant que les cactus de la région du Rif ne sont plus épargnés autant que par le passé. "La cochenille a commencé à s'attaquer aux champs de cactus dans le Nord. Tout n’est pas perdu, mais la lutte biologique doit commencer le plus tôt possible. Globalement, pour régénérer les cactus du Royaume, il faut compter cinq ans, à partir du jour où l’opération est lancée."
En tout cas, l’efficacité de la coccinelle trident a séduit les agriculteurs de la région d'Ait Baâmrane. Une fois disponible en grande quantité, il conviendrait d’inclure les associations dans l’opération de distribution. "Les associations ont un contact direct avec les agriculteurs, raison pour laquelle le projet de la Fondation Dar Si Hmad a réussi", conclut le Dr Rachid Bouharroud.
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Le 28 mai 2023 à 16h13
Modifié 4 mars 2024 à 15h56