Ciments du Maroc : La stratégie du groupe racontée par Matteo Rozzanigo (DG)

B.B | Le 23/1/2022 à 16:41
Après un fort rebond en 2021, la croissance de la consommation de ciment devrait retrouver des niveaux normatifs cette année. La concurrence sera plus rude cette année, mais le groupe table sur son fort positionnement dans les provinces du sud et l’ouverture de son centre de broyage à Nador pour accompagner sa croissance. Les hausses du petcoke ont affecté les marges sur le second semestre 2021 mais aucune dégradation additionnelle n’est attendue cette année.

En 2021, la consommation de ciment a connu un rebond de 14,8% à près de 14 millions de tonnes. Cette hausse a été catalysée par la reprise économique et la reprise nationale des chantiers après une année 2020 fortement ralentie par le confinement et la crise sanitaire.

Ciments du Maroc, l’un des acteurs majeurs du secteur a pu capitaliser de la bonne reprise l’an dernier. Au premier semestre 2021, le groupe affichait un résultat net en forte hausse de 202,6% à 586 MDH. Au troisième trimestre, son chiffre d’affaires était de 2.619 MDH en progression de 7% par rapport à la même période l’an dernier. Le groupe est notamment parvenu à maintenir un niveau satisfaisant de marge sur la première moitié de l’année malgré la forte hausse des intrants, notamment le combustible petcoke.

En 2022, des opportunités et des menaces se dessinent notamment à travers l’ouverture du nouveau centre de broyage à Nador et l’ouverture de l’usine de LafargeHolcim Maroc à Agadir, dans les provinces historiques de Ciments du Maroc. Pour décrypter l’évolution du marché et la stratégie du groupe cette année, LeBoursier d'entretenu avec le directeur général du groupe, Matteo Rozzanigo.

Retour à une croissance sectorielle normative

Une croissance exceptionnelle de la consommation de ciments a été observée en 2021, causée principalement par un effet rebond. « Nous avons été surpris du niveau de consommation cette année et la bonne récupération qui a eu lieu. Notre prévision n’était pas de récupérer ce que l’on avait perdu en 2020 » annonce le PDG du groupe. Mais comment l’opérateur anticipe-t-il 2022 ?

Ce niveau n’est naturellement pas soutenable à moyen-long terme. Cette année, des niveaux normatifs de croissance sont attendus. En effet, la consommation de ciments est assez liée à la progression de l’économie marocaine. « L’évolution de la consommation du ciment au Maroc est intimement liée au développement de l’activité économique, aux politiques des pouvoirs publics, et aux investissements publics/privés dans l’infrastructure, le résidentiel et le non résidentiel. Compte tenu du contexte général, nous avons bon espoir que la croissance en 2022 pourra être positive, probablement à plus de 3% » confie Matteo Rozzanigo.

Hormis cela, il n’y a pas de facteurs spécifiques relatifs à la croissance. Beaucoup de projets d’envergure sont cependant prévus et pourraient booster la consommation de ciments. « C’est le cas par exemple du port de Dakhla qui est un projet d’envergure, mais ce n’est pas encore effectif, donc nous ne les prenons pas en compte dans les prévisions » explique le dirigeant.

Malgré un retour à un rythme de croissance ‘normal’, le groupe compte utiliser ses piliers de croissance pour renforcer son positionnement, notamment géographique.

Accompagner le fort dynamisme des provinces du sud

Le groupe peut compter sur une forte présence dans les provinces du Sud, notamment avec ses usines à Safi, Marrakech et Agadir. Mais le groupe a également renforcé son positionnement à travers différentes acquisitions.

« Nous avons monté une dynamique très forte dans les provinces du Sud où nous sommes leader. Nous avons acquis les activités d’Atlantic Ciment qui porte le projet de construction et d’exploitation d’une usine de production de ciment intégrée dans la province de Settat et de Cimsud avec une unité de broyage à Laâyoune. Nous avons noté une forte croissance de la demande dans les provinces du Sud et pour nous, cette dynamique va continuer grâce à des projets privés et des projets d’infrastructures » nous explique Matteo Rozzanigo.

Ces dernières acquisitions permettront premièrement d’accompagner le développement des provinces du sud sur lesquelles le groupe détient une expertise. Deuxièmement, le projet d’usine de ciment intégrée de Settat jouera un rôle stratégique à moyen terme. « Settat, c’est une grande carrière avec un équivalent de 50 années de réserve de clinker. Pour nous, c’est une opportunité de réaliser une nouvelle unité de production quand la demande marocaine sera en plus grande croissance » explique-t-il.

Le centre de broyage de Nador permettra de se positionner dans le Nord

Néanmoins, les provinces du sud sont désormais soumises à la concurrence du plus grand cimentier national, LafargeHolcim Maroc qui a ouvert une cimenterie à Agadir pour venir concurrencer Ciments du Maroc dans ses terres historiques. In fine, Ciments du Maroc perdra des parts de marché, mais compte desservir les provinces du nord avec l’ouverture de son nouveau centre de broyage à Nador, d’un investissement de 330 MDH, qui ouvrira en juillet prochain.

« Cela nous permettra de compenser l’impact de la nouvelle usine de LafargeHolcim Maroc et cela nous permettra de devenir un acteur marocain présent sur l’ensemble du territoire » nous confie le PDG du groupe. Ce centre de broyage permettre au groupe d’accéder à un nouveau marché tout en effectuant des économies logistiques.

L’objectif étant d’y broyer du clinker avec d’autres minéraux notamment du calcaire, naturellement présent dans la région de Nador. Cette étape est l’ultime étape dans la fabrication du ciment. « L’avantage logistique d’avoir le centre de broyage à côté du marché final, c’est une grande économie sur le coût du transport. Cela nous permet d’utiliser le clinker produit à Agadir, l’envoyer à Nador, le mélanger avec les minéraux locaux pour en faire du ciment que nous vendons sur le marché local » explique Matteo Rozzanigo. En effet, comme nous indiquait un analyste de la place sur le secteur cimentier, « c’est un matériau qui est très complexe à transporter et qui est très coûteux à exporter ».

En 2021, le processus de fabrication a été affecté pour l’ensemble des cimentiers, notamment avec la hausse des cours du petcoke. Rognant sur les marges, cette tendance se poursuivra-t-elle cette année ?

Pas d’érosion additionnelle des marges prévue en 2022

Le groupe, comme tous les cimentiers a également fait face en 2021 à la forte hausse des cours du petcoke (combustible dérivé du pétrole, ndlr). Néanmoins, sur le premier semestre, le groupe a affiché une bonne résilience de ses marges avec des taux même supérieurs à ceux de 2020. Malgré l’envolée des coûts de petcoke, la marge d’EBITDA consolidé du groupe s’établit à 45,6% (vs. 44,6% sur S1-2020).

Cependant, le PDG du groupe nous explique que la hausse du coût des intrants s’est principalement répercutée durant le second semestre 2021. « La hausse s’est principalement fait ressentir durant le second semestre, mais pas uniquement sur cet aspect. Il y a également eu une progression des coûts logistiques associés. Le coûts des transports en conteneur a également augmenté. Mais nous commençons à voir des baisses déjà depuis le mois de janvier. En 2022, je pense qu’il y aura un impact sur l’année 2022, mais ce ne sera pas supérieur à ce qui a été observé en 2021 » explique-t-il. Une érosion additionnelle des marges n’est donc pas prévue cette année.

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