Cette année, Aïd al-Adha entre traditions, sécheresse et pressions économiques

ROUND UP. Prévu le 17 juin prochain selon le calcul astronomique, Aïd al-Adha sera de nouveau célébré dans une conjoncture particulière, marquée par la persistance de l’inflation. Cette année encore, des voix s’élèvent pour espérer son annulation. Une décision très peu probable car elle aurait des répercussions négatives sur le monde rural déjà miné par la sécheresse..

Cette année, Aïd al-Adha entre traditions, sécheresse et pressions économiques

Le 1 mai 2024 à 14h00

Modifié 1 mai 2024 à 9h42

ROUND UP. Prévu le 17 juin prochain selon le calcul astronomique, Aïd al-Adha sera de nouveau célébré dans une conjoncture particulière, marquée par la persistance de l’inflation. Cette année encore, des voix s’élèvent pour espérer son annulation. Une décision très peu probable car elle aurait des répercussions négatives sur le monde rural déjà miné par la sécheresse..

Déjà lourdement impactés par l’inflation, à une quarantaine de jours de la fête du sacrifice, les ménages, en particulier les couches précaires ou précarisées qui craignent une hausse des prix du cheptel, espèrent une décision d’annulation de l’Aïd.

Si à ce stade nul ne peut se prononcer sur cette question, des sources professionnelles sondées par Médias24 s’attendent à une légère augmentation de 5% à 10% par tête par rapport à l’an passé, où les prix étaient déjà élevés. D’autres sources s’attendent à ce que le kilogramme soit vendu entre 70 et 80 DH. Le prix de la bête dépendra ainsi de son poids.

Pour maintenir les prix sur le marché, le ministère de l’Agriculture a mis en place de nombreuses mesures, notamment la subvention de l’importation d’environ 600.0000 têtes.

Inflation persistante et pouvoir d’achat en baisse

Toute décision dans ce contexte concernant l'annulation ou le maintien de l’Aïd est un arbitrage entre plusieurs contraintes. Aucune n’est parfaite, chacune ayant un prix.

Au-delà de l’aspect religieux de cette fête, il s’agit aussi d’un événement très coûteux pour les Marocains, notamment dans le contexte économique actuel. Les ménages sont lourdement impactés par l’inflation, leur pouvoir d’achat est en baisse.

En effet, les trois dernières années ont été marquées par l’inflation, notamment pour les produits alimentaires. Entre 2019 et 2023, le prix de la viande a enregistré une hausse annuelle moyenne de 5% (7,2% entre 2021 et 2023). Par contre, l'inflation est devenue très modérée depuis le début 2024:  fin mars 2024, le taux moyen d'inflation du 1er trimestre a été limité à 1,2%.

En ce qui concerne le pouvoir d’achat des consommateurs, le rapport du budget prévisionnel du Haut-Commissariat au plan pour 2024 estime que la crise de l’inflation, persistante depuis la mi-2022, continuerait d’impacter la situation des ménages, frappant de manière disproportionnée les foyers à faibles revenus. Cette situation a considérablement réduit leur pouvoir d’achat et les a exposés à des difficultés croissantes pour répondre à leurs besoins essentiels.

Toujours selon la même source, l’inflation globale en moyenne annuelle a atteint des niveaux de 6,6% en 2022 et 6,1% en 2023. Ces deux années, 2022 et 2023 continuent d’impacter fortement les ménages, en particulier les catégories socio-professionnelles les plus démunies, pour lesquelles le sacrifice est un événement majeur.

Les agriculteurs impactés par la sécheresse, le cheptel en baisse

Toutefois, plusieurs facteurs montrent qu’il est impératif de maintenir le sacrifice. Le principal reste le manque à gagner pour le monde rural, estimé à plusieurs milliards de dirhams.

Malgré la situation difficile des ménages en 2023, leurs dépenses totales s’étaient élevées durant Aïd al-Adha à 18 MMDH, selon le HCP. La plupart de ces fonds ont été transférés au niveau des zones rurales, permettant ainsi aux agriculteurs de couvrir les dépenses des autres activités agricoles, en particulier celles se rapportant aux préparatifs de la prochaine campagne. Ce transfert de 18 MMDH vers le monde rural est une aubaine pour des régions fortement épuisées par les sécheresses consécutives.

L’autre facteur important à prendre en considération est relatif à la campagne agricole 2023-2024, qui se déroule dans des conditions climatiques globalement défavorables, caractérisées par un déficit pluviométrique et des chocs thermiques. La récolte céréalière devrait être faible par rapport à l’an passé, ce qui contraint les professionnels à recourir massivement à l’importation pour répondre au besoin national.

Les agriculteurs subissent ainsi une cinquième année de sécheresse, alors que l’élevage constitue leur source principale de subsistance et leur banque. Le nombre de têtes continue de baisser, impacté notamment par le renchérissement des coûts de production. Une décision d’annulation du sacrifice de l’Aïd ne fera ainsi que favoriser l’exode rural.

Important transfert d’argent de la ville vers la campagne

"Pour donner un ordre de grandeur, on estime à un peu plus de 10 millions de têtes le nombre de petits ruminants au Maroc", nous explique un professionnel du secteur, joint par Médias24. "Un peu plus de cinq millions sont consommés durant le jour de l’Aïd et le reste est consommé sur toute l’année".

"La viande de l’Aïd est généralement plus chère en raison de la symbolique de cet événement. Le même mouton peut être vendu 3.000 DH durant toute l’année, contre 4.500 DH le jour de l’Aïd. C’est donc une vente très intéressante pour les agriculteurs, qui permet ainsi de transférer de grands montants d’argent de la ville vers la campagne".

"Outre les agriculteurs, plusieurs autres catégories bénéficient de cet évènement", nous confie notre interlocuteur, notamment "les transporteurs et les engraisseurs".

En effet, tout un écosystème gravite autour de la fête du sacrifice. Cet évènement rapporte de l’argent à plusieurs métiers annexes, notamment les bouchers, qui parviennent à générer des revenus supplémentaires.

Selon nos informations, environ 6,8 millions de têtes devraient être identifiées cette année. L’opération d'abattage du mouton le jour de l’Aïd coûte entre 150 et 250 DH par tête selon les régions ; une activité qui engendre entrer 750 millions de DH et 1,250 MMDH si l’on suppose que seules 5 millions de têtes seront abattues. Il en est de même pour la découpe de la carcasse.

Nous pouvons également citer, comme métiers annexes, le transport des moutons, la vente des ustensiles de cuisine, l’aiguisement des couteaux, ainsi que la vente de barbecues et des aliments de bétail. Cette activité est également marquée par un engouement pour les équipements électroménagers, en particulier les réfrigérateurs, dont la consommation augmente durant la période de l’Aïd. Il s’agit donc, pour la plupart, de métiers éphémères qui n’apparaissent que durant la période de l’Aïd.

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