Bourse : Voici pourquoi certaines petites ou moyennes capitalisations sont léthargiques
Certaines entreprises cotées en bourse ne sont que très peu voire pas du tout échangées. Il ne s’agit pas nécessairement de petites capitalisations ou d’entreprises en difficulté. Parfois, ce sont des capitalisations de taille moyenne d’entreprises qui génèrent des milliards de dirhams de revenus.
A titre d’exemple, l’année dernière, en bourse, certaines valeurs n’ont côté qu’une dizaine de fois dans l’année et certaines ont connu des volumes d’échanges de quelques dizaines ou centaines de milliers de dirhams. DLM, en grande difficulté, a coté sur 3 séances en 2023 avec un total de 7.344 dirhams échangés. Mais d’autres sociétés en situation stable comme Balima ont traité sur 22 séances pour un total d’environ 44.000 dirhams ou encore de plus grande capitalisation comme Oulmès avec une volumétrie d’à peine 2,6 MDH sur l’année entière. D’autres entreprises rejoignent ces rangs, comme Zellidja, Unimer, Promopharm, SRM, ou encore Stroc Industrie.
Mais pourquoi certaines valeurs sont-elles boudées par les investisseurs et n’enregistrent que peu ou pas d’échanges sur le marché ? Contacté sur le sujet, Bachir Tazi, directeur général de CFG Marchés, nous explique les facteurs expliquant le manque de dynamisme en bourse de certaines valeurs.
Les institutionnels font le marché et cherchent l’efficience
Il est à noter dans un premier temps qu’au Maroc, contrairement à certains autres pays, ce sont les investisseurs qualifiés (marocains ou étrangers, ndlr) qui font le marché (compagnie d’assurances, caisse de retraite, OPCVM… ndlr). "Si l’on prend une moyenne historique, les investisseurs qualifiés représentent entre 80% et 85% du volume traité sur la bourse de Casablanca, et donc sont les premiers acteurs sur les tendances long terme", précise Bachir Tazi.
Et ces derniers ont une force de frappe très importante sur la cote casablancaise. "L’industrie des OPCVM pèse globalement 550 MMDH dont 45 MMDH sur les OPCVM actions. Si on prend ces 45 MMDH et que l’on ajoute une proportion de la poche actions des OPCVM diversifiés, on atteint 65 à 70 MMDH. A cela, il faut encore ajouter ce qui est investissable chez les autres investisseurs qualifiés. D’après les derniers rapports, on peut estimer les AUM (Assets Under Management, actifs sous gestion) de cette catégorie d’investisseurs entre 600 et 700 MMDH. Si on applique une pondération de 20% ou 25% à investir potentiellement sur le marché action, on ressort avec 150 MMDH. Au total on a près de 220 MMDH, ce qui est plus de 1,25 fois le montant du flottant total de la Bourse de Casablanca", analyse notre interlocuteur.
Ces derniers, pour leurs placements et leurs stratégies d’investissement, sont à la recherche de marché efficient. Mais qu’est-ce que cela veut dire ? "Un marché efficient est un marché qui est d’abord profond, liquide avec la possibilité d’agir rapidement et sans avoir à impacter la tendance court terme d’un actif. Pour cela, il faudrait qu’il y ait une diversité de sous-jacents et des intervenants selon leurs tailles, leurs stratégies d’investissement et horizon de placement", explique le DG de CFG Marchés.
Ces investisseurs sont également à la recherche de transparence financière et d’informations claires. "Un marché efficient se caractérise également par un accès équitable, fiable et de qualité à l’information publique. L'information publique par les émetteurs doit être accessible à tous les intervenants, quelles que soient leurs tailles ou leurs natures, est doit être diffusée de manière rapide et fiable", poursuit notre interlocuteur. En général, ces deux facteurs de liquidité et profondeur ainsi que de transparence contribuent à refléter au mieux la réalité économique des entreprises cotées.
L’illiquidité a plusieurs causes et entraîne un manque de dynamisme
Dans le marché boursier national, certaines valeurs, comme indiqué avant, ont de véritables problèmes de dynamisme. Cela vient notamment du fait de leur illiquidité.
Si l’on se focalise sur cette notion, on peut dire qu’elle est liée à deux problèmes. "Premièremen, on peut faire face à un souci de taille à savoir le fait que la valeur n’ait pas atteint une taille critique faisant qu’elle n'est pas visible pour les investisseurs et ne pèse pas une pondération décente dans le benchmark pour que cela suscite l’intérêt de l’implémenter", explique Bachir Tazi.
Cette problématique peut venir du fait que l’IPO est survenue trop tôt dans l’histoire de l’entreprise par exemple ou bien que la taille était convenable mais qu’avec le temps et les performances du cours sur le marché, cette taille s’est réduite et devenue donc peu attractive pour l’investisseur institutionnel. "Mais parfois, la valeur est juste illiquide car il n’y a pas assez de flottant. Le flottant peut être insuffisant dès l’IPO ou bien être réduit suite à des rachats de titres des investisseurs historiques par exemple", explique-t-il.
L’institutionnel marocain est structurellement acheteur dans la durée. Il est dans une logique de buy and hold du fait notamment qu’il n’existe pas de mécanisme permettant de vendre ou profiter des tendances baissières sur le long terme. Dans les faits, un institutionnel achète et attend des performances positives.
Une communication financière lacunaire
L’autre facteur qui créé un manque de dynamisme pour certaines valeurs, c’est la communication financière insuffisante et le manque de curiosité de certains investisseurs qualifiés.
"L’information est une responsabilité partagée entre tous les intervenants. Certains émetteurs ne considèrent probablement pas la communication financière comme une donnée stratégique qui va permettre à l’action de vivre de façon efficiente sur le marché secondaire. Ils ne pensent pas à professionnaliser la communication financière", explique Bachir Tazi.
Mais le manque de transparence ou de régularité dans la communication financière n’est pas toujours la faute de l’émetteur. Les parties prenantes dans la chaîne de l’information sont nombreuses. "Les intermédiaires en bourse et les conseillers financiers ont aussi leur part de responsabilité, en développant mieux les départements Recherche, en offrant un Corporate Access de qualité à leurs clients, et en accompagnant les émetteurs sur le marché secondaire post IPO", poursuit-il.
Au-delà, le manque de dynamisme d’un titre en bourse peut provenir d’un désintérêt de l’investisseur causé par un manque de curiosité. "Les investisseurs sont parfois également dans une forme de facilité et ne sortent pas des sentiers battus pour s’intéresser à des entreprises qu’ils connaissent peu pour en savoir plus sur le business model, et donc déceler des opportunités d’investissement, se renseigner sur des entreprises qu’ils connaissent peu pour en savoir plus sur le business model", conclut-il.
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