Ce que l’on sait de la vague d’arnaques sur WhatsApp au Maroc

Une arnaque se répand comme une traînée de poudre chez les utilisateurs de WhatsApp au Maroc, qui reçoivent depuis la mi-août des messages d’anonymes leur promettant des rémunérations alléchantes en échange de la publication de commentaires sur les réseaux sociaux.

Ce que l’on sait de la vague d’arnaques sur WhatsApp au Maroc

Le 24 octobre 2023 à 16h13

Modifié 25 janvier 2024 à 16h56

Une arnaque se répand comme une traînée de poudre chez les utilisateurs de WhatsApp au Maroc, qui reçoivent depuis la mi-août des messages d’anonymes leur promettant des rémunérations alléchantes en échange de la publication de commentaires sur les réseaux sociaux.

"Depuis la mi-août, une arnaque nationale sévit sur WhatsApp", alerte Amine Ghzal, expert en cybersécurité contacté par Médias24. Ce dernier a échangé avec 50 victimes présumées d’escroqueries en ligne, qui l’ont approché à la suite de l'alerte qu'il a publiée sur LinkedIn.

Cette "arnaque nationale" repose sur plusieurs étapes. L’approche et le mode opératoire sont les mêmes : "Un message est d’abord envoyé via WhatsApp à différents numéros probablement piochés via des applications comme Number Book et True Caller, proposant de visionner des vidéos YouTube, d’attribuer une note à des hôtels ou de faire des commentaires sur Google Maps, en échange d’une rémunération qui avoisine les 8 dirhams par tâche", explique Amine Ghzal.

L’indicatif du numéro de téléphone qui envoie ce genre de messages provient généralement de pays étrangers, notamment d’Afrique centrale ou du Sud, "mais ces dernières semaines, les utilisateurs de WhatsApp reçoivent de plus en plus de messages de numéros marocains", fait remarquer Amine Ghzal.

30 dirhams par commentaire en ligne

Médias24 a reçu ce type de messages d’un numéro marocain et s’est prêté à l’exercice dans deux conversations distinctes. L'interlocuteur anonyme semble être en ligne sur WhatsApp de façon ininterrompue.


Bien qu’il ait envoyé son premier message en anglais, le correspondant maîtrise également l’arabe classique, langue dans laquelle, à notre demande, nous avons poursuivi la discussion.

La personne avec laquelle nous échangeons explique qu’il s’agit principalement d’évaluer sur Facebook des lieux de voyage, des activités sportives et des marques afin d’augmenter la visibilité des produits sur internet. Elle nous propose de réaliser ce travail en échange d’une rémunération de 30 dirhams par tâche accomplie. Ensuite, si l’on réussit à accomplir toutes nos tâches journalières, un bonus de 3.000 DH nous sera envoyé, mais il faudra d’abord télécharger Telegram et créer un identifiant − étape à laquelle nous nous sommes arrêtés.

Notre interlocuteur anonyme nous explique que le versement de la rémunération s'effectue par virement bancaire instantané. Il suffit d’envoyer une capture d’écran de notre commentaire ou réaction à une publication pour recevoir incessamment ce virement, promet-il. Concernant les autres données d’identité personnelle, en dehors du nom, de l’âge et des coordonnées bancaires, aucune autre information n’est requise, et nulle vérification de la majorité légale n’est faite.

De WhatsApp à Telegram, le "niveau supérieur"

"Une fois ces simples tâches réalisées, on passe au niveau supérieur", reprend Amine Ghzal. Plus précisément, l’escroc demande à sa cible de partager ses coordonnées bancaires et de créer un compte Telegram afin de pouvoir échanger via cette plateforme. Ensuite, les arnaqueurs vendent à la victime l’illusion d’être "employée" en la mettant en contact avec un assistant, un expert et un service financier, poursuit-il. Jusque-là, la plupart des victimes sont très peu méfiantes.

L’arnaque passe au niveau supérieur une fois les victimes investies dans des discussions sur Telegram. "En effet, il s’agit d’investir de l’argent sur cette plateforme, en effectuant des virements sur un compte marocain fourni par les escrocs, et de recevoir en échange 300% de la somme", fait savoir Amine Ghzal.

"Les escrocs font tout pour mettre en confiance les utilisateurs qu’ils comptent arnaquer, surtout dans les premières étapes. Sur Telegram, les transactions des membres du groupe sont visibles ; on peut même retirer à tout moment l’argent gagné via les virements effectués."

Copie d’un document partagé sur le groupe Telegram avec le détail des virements effectués et des gains reçus.

"Après trois virements en moyenne, la personne arnaquée est supprimée du groupe de discussion Telegram et ne peut plus récupérer la dernière somme investie, généralement assez conséquente. Bien sûr, on ne leur dira jamais qu’elles ont été arnaquées, car les escrocs restent en contact avec leurs victimes et leur donnent la possibilité de récupérer l’argent investi, mais sous plusieurs conditions, pour la plupart très onéreuses, notamment des taxes à payer ou des frais d’assistance." De quoi démotiver les victimes.

Des poursuites judiciaires lancées

L’escroquerie en ligne via WhatsApp se mue en une machine bien huilée. Selon Amine Ghzal, environ 5.000 messages sont envoyés chaque jour par les escrocs. Les gains de ces réseaux d’escroquerie s’élèvent à 500.000 dirhams par jour. Quant aux victimes, leurs profils sont très différents. Elles ont généralement entre 27 et 40 ans et sont issues de la classe moyenne, voire aisée. La majorité sont des étudiants, d’autres des employés de supermarché, et d’autres encore des ingénieurs.

Parmi les 50 victimes qui ont contacté Amine Ghzal, vingt ont déposé une plainte auprès du procureur du Roi. Médias24 a consulté la copie d’une plainte déposée par une victime au tribunal de première instance de Kénitra, datée du 3 octobre 2023.

Cette dernière a été arnaquée de 4.880 dirhams selon les mêmes étapes décrites plus haut. On peut d’ailleurs identifier sur le document les numéros de compte sur lesquels les virements ont été effectués.

Dans sa plainte, la victime explique avoir reçu un premier message le 29 septembre dernier de la part de "Wavemaler Maroc-global Media Agency", dans lequel on lui demande de s’abonner à quelques comptes YouTube en échange de 4 dirhams par abonnement. La victime a effectivement reçu sa rémunération, puis a commencé à faire des virements de 200 dirhams pour recevoir en échange 260 dirhams, qu’elle parvenait à retirer de son compte bancaire.

Ensuite, il était question d’envoyer 500 dirhams "pour passer au niveau supérieur". Sauf que cette fois-ci, la victime n’a pas été rémunérée sur cette transaction. On lui a demandé d’envoyer une somme supplémentaire de 4.380 dirhams pour "finaliser son passage au niveau supérieur", puis une autre à hauteur de 8.880 dirhams en guise d’"étape finale". La victime a finalement été radiée du groupe lorsqu’elle a refusé d’envoyer les 8.880 dirhams, lit-on dans la copie de la plainte.

Il semble que ce nouveau procédé d'arnaque use des réseaux sociaux comme levier pour appâter les victimes, avant de les inclure dans un système qui s'apparente à la pyramide de Ponzi. Il reste encore plusieurs zones d'ombre dans cette affaire, sur lesquelles Médias24 reviendra.

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