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L’Autorité marocaine du marché des capitaux sous la loupe de la Cour des Comptes

Le dernier rapport annuel de la Cour des comptes contient une mine d’informations et d’analyses sur les dysfonctionnements des institutions publiques. Nous nous intéressons en particulier au rapport consacré à l’Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC). Synthèse.

L’Autorité marocaine du marché des capitaux sous la loupe de la Cour des Comptes

Le 8 mars 2023 à 10h45

Modifié 8 mars 2023 à 18h08

Le dernier rapport annuel de la Cour des comptes contient une mine d’informations et d’analyses sur les dysfonctionnements des institutions publiques. Nous nous intéressons en particulier au rapport consacré à l’Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC). Synthèse.

"Tout vient à point à qui sait attendre." Un adage qui pourrait s’appliquer au dernier rapport annuel de la Cour des comptes. Le rapport de 2021 vient en effet d’être publié au Bulletin officiel ce mardi 7 mars, après qu’il a été publié, selon le document succinct en français, en décembre 2022 et dans sa version arabe intégrale, le 2 novembre 2022.

Comme à son habitude, le nouvel opus contient son lot d’informations et d’analyses, parfois explosives, sur la gestion des finances publiques et sur certaines stratégies, programmes, chantiers de réformes et établissements publics. Dans cette dernière catégorie, c’est l’Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC) qui a particulièrement intéressé les juges et auditeurs de la première présidente de la Cour, Zineb El Adaoui. L’AMMC a été évaluée sous le prisme de "sa performance dans la réalisation de ses principales missions, particulièrement en matière d’autorisation, de contrôle, de surveillance, d’enquête et de sanction", note le rapport.

Une collecte d’information non normalisée

Au niveau de l’exercice des fonctions, le rapport relève que "le contrôle de l’information financière est limité par le manque d’une régulation indépendante des auditeurs externes en plus des insuffisances liées à la gestion des facteurs de risques qui n’est pas encore entièrement encadrée". Le rapport note par ailleurs que "les critères d’appréciation des informations financières manquent de précision".

Dans sa réponse, l’AMMC argue que le dispositif de contrôle a été actualisé en 2019 et complété par le dernier amendement de la loi sur la SA (publiée au Bulletin officiel en 2019), qui vise particulièrement le renforcement du régime de protection des investisseurs. Elle relève par ailleurs que des dispositions de mise à jour des procédures ont été prises dès la publication de la circulaire 03-19 relative à l’appel public à l’épargne. Une mise à jour toujours en cours, selon la réponse de l’AMMC. Elle ajoute que cette actualisation compte combler les lacunes en lien avec des procédures qui ne sont plus en phase avec la réalité du marché et le cadre normatif. L’AMMC précise que cette mise à jour fera l’objet d’une circulaire visant à règlementer les métiers du conseil, aujourd’hui entre les mains du ministère des Finances, en vue de la publier au Bulletin officiel.

Concernant les autorisations de produits, la Cour des comptes souligne que bien que des procédures nouvelles aient été mises en place en 2019 et 2020, celle-ci ne sont pas encore validées. "En plus, les travaux d’instruction des dossiers d’autorisation ne sont pas suffisamment consignés, ce qui ne permet pas de renseigner sur leur teneur." Une critique à laquelle l’AMMC répond en affirmant qu’elle a lancé "des projets structurants de réformes", en particulier la refonte de son référentiel documentaire, qui doit être finalisée au premier trimestre 2023.

Contrôles et surveillance à améliorer

Les auditeurs de la Cour des comptes se sont aussi penchés sur la mission de contrôle exercée par l’AMMC. Ils relèvent que "le contrôle de l’information financière est non formalisé. En outre, l’AMMC ne recourt pas aux sanctions des irrégularités constituant des infractions aux dispositions légales et réglementaires". Elle se contente de la "sensibilisation des opérateurs". Il est également signalé que les rapports d’inspections tardent généralement à être communiqués. Ainsi, selon les constats de la Cour, 70% des rapports de surveillance n’ont pas été notifiés à temps. Les retards peuvent durer entre un et trois ans.

L’AMMC répond que dans les cas où les contrôles relèvent des irrégularités, des dossiers spécifiques sont institués et soumis au comité de suivi de contrôle. Dans les cas où les irrégularités constatées ne génèrent pas de préjudices aux investisseurs, l’AMMC, dans une démarche d’accompagnement des acteurs, se contente de mesures correctives et de sensibilisation.

Globalement, la Cour des comptes relève la non-régularité des contrôles, l’absence d’une démarche basée sur le risque et les insuffisances de la cartographie des risques adoptée. La Cour des comptes souligne également que "la sanction des manquements à la réglementation n’est pas toujours prononcée", surtout en cas de dépassement des ratios prudentiels et du non-respect des obligations de communication prévues par la loi. L’AMMC se défend, selon le rapport de la Cour des comptes, en affirmant que ces cas spécifiques seront traités dans le cadre des réformes en cours ou à venir.

Au niveau de la surveillance des marché des capitaux, le rapport relève le "périmètre d’action limitée" ainsi que "l’absence de règles en matière de détection et de qualification des cas potentiels qui pourraient constituer des infractions boursières".

Une situation qui influe sur les enquêtes menées par l’AMMC qui, selon le rapport, "manquent d’approfondissement". Certaines enquêtes sont bouclées prématurément "sans pour autant prendre en considération plusieurs faits marquants qui étaient à la base de déclenchement de la procédure". La Cour relève que les critères de clôture, tout comme ceux relatifs aux décisions de non-transmission des affaires instruites au collège des sanctions, ne sont pas claires. Sur ce point, l’AMMC précise que depuis sa restructuration en 2018, elle a mis en place des procédures internes supplémentaires afin d’encadrer et de renforcer les règles d’ouverture et de clôture des enquêtes.

Les sanctions non appliquées

Concernant plus spécifiquement les sanctions prononcées, la Cour relève que le non-traitement des délits boursiers engendre leur prescription. Par ailleurs, le plafond des sanctions ne peut dépasser les 200.000 dirhams. Ce qui, de l’avis de la Cour, est "peu dissuasif au regard du volume des activités et des montants des transactions". L’AMMC a tout de même précisé que ces plafonds seront soumis à "analyse" dans le cadre des amendements en cours d’étude de la loi. La Cour relève aussi que "certains manquements dûment constatés n’ont pu faire l’objet d’aucune recommandation de sanction, faute de fondement juridique", en particulier les opérations de pensions et de prêts de titres.

A partir de ces constats, la Cour propose plusieurs recommandations. En voici quelques-unes :

- Activer l’adoption d’un référentiel documentaire constitué de procédures formalisées et régulièrement adaptées et de guides spécifiques en couvrant tous les processus relatifs aux métiers de l’Autorité, notamment en matière d’autorisations, de contrôles, de surveillance, d’enquêtes et de sanctions.

- Améliorer la documentation et la traçabilité des activités de l’Autorité afin d’en permettre l’uniformisation, la maîtrise et l’auditabilité, et de développer davantage la gestion par les risques en développant une cartographie des risques régulièrement mise à jour en vue d’une meilleure optimisation des activités de l’Autorité.

- Encadrer la désignation des membres nommées intuitu personae au niveau du conseil d’administration et des membres du collège des sanctions, tout en renforçant la composition de ce dernier. En ce qui concerne les activités de support, la Cour recommande notamment d’améliorer la coordination et développer les synergies entre les différentes structures de l’Autorité en vue d’une meilleure exploitation des informations dont elles disposent.

 

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