IPO : de hauts cadres relatent leur expérience face aux défis de la communication

Le 2 février, l’agence de communication Bonzaï organisait, dans ses locaux à Casablanca, la première édition des "Bonzaï Conversations" autour de la construction de la réputation financière d’une société pour se préparer à une IPO.
Lors de l’événement, différents hauts cadres de sociétés cotées ont fait part de leur expérience et des challenges auxquels ils ont été confrontés dans la préparation de la communication autour de leur réputation financière.
Communiquer pour éclairer sur la nature de son business model
L’un des intervenants était Omar Yacoubi. Le directeur général adjoint d’Aradei Capital a évoqué le cheminement de l’entreprise jusqu’à son introduction en bourse en pleine pandémie en décembre 2020.
"Il faut clairement, bien en amont, savoir s’entourer d’experts dans certains domaines que l’entreprise elle-même ne peut pas maîtriser. L’entreprise a son cœur business sur lequel elle se concentre et cherchera des piliers dans les autres domaines sur lesquels elle peut s’adosser pour préparer travailler son image et sa crédibilité. On parle des cabinets d’avocat, des agences de communication, etc.", explique le DGA d’Aradei Capital, qui confie que la préparation de la communication pour bâtir la marque s’est préparée quatre ans avant l’IPO.
Un délai nécessaire pour faire face à l'obstacle majeur lié à la méconnaissance de son business par certains investisseurs. "Une foncière n’est pas une entreprise de promotion immobilière, contrairement à ce que tout le marché marocain à l’époque pensait. Il a donc fallu avoir tous ces contacts permanents avec le marché pour faire comprendre quel était le business model d’une foncière, avec ses composantes opérationnelle et financière, et nous souhaitions aussi comprendre les attentes de ce marché", témoigne le DGA.
S'il ne songeait pas directement à l’IPO au début de l'aventure, "le groupe pensait à des plannings de programme d’investissement, couplés à des levées de fonds pour accompagner ces investissements", indique le DGA. Aradei a pu structurer son cadre institutionnel et son fonctionnement dès 2015, avec l’arrivée au capital de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD).
C’est également le cas du dernier arrivant à la bourse de Casablanca en 2022, Akdital. Une communication particulière a dû être menée, étant donné la nature sensible du secteur dans lequel le groupe évolue.
Akdital a travaillé à améliorer l’image du secteur de la santé privé
Le directeur de la communication et des relations publiques d'Akdital, Abdelkoddous Hafsi, relate la création d’une stratégie de marque deux ans avant l’IPO du groupe. "Il fallait construire une marque pour raconter une histoire, car nous travaillons dans un secteur très sensible et qui a pris beaucoup de place depuis le Covid."
La difficulté principale a été de contrer les idées présentes dans les esprits sur le secteur de la santé privée. "Il fallait commencer à construire une marque et poser ses fondements, et également à communiquer auprès du grand public pour raconter ce groupe, qui il est, ce qu’il cherche à faire, ses intentions, pour tenter de chasser les idées reçues que le secteur de la santé traîne depuis au moins deux décennies. Cela n’a pas été facile", explique le directeur de la communication.
Ce secteur, longtemps très opaque, a incité Akdital à se présenter comme une entreprise classique, avec un besoin d’investir, de se développer, etc. "Nous devions expliquer pourquoi nous étions une entreprise comme les autres et ouvrir nos portes. Inviter les leaders d’opinion et les médias pour leur faire voir comment cela se passe sur le ‘track record’ et les projets d’avenir", confie Abdelakoddous Hafsi.
Le groupe a œuvré à mettre en avant le besoin de développement d’infrastructure pour améliorer la qualité des soins apportés aux patients. "Les gens ne le savaient pas, et il fallait juste ouvrir la porte pour que cela devienne visible", poursuit-il. L’IPO est ensuite venue couronner cette totale volonté de transparence.
Retour sur l’IPO avortée de Cosmos Electro
Pour Fahd Bennani, président directeur général de Cosmos Electro, l’aventure a été plus mouvementée.
L’entreprise de distribution de produits électro-domestiques a pourtant suivi le parcours rêvé. Affichant une belle croissance de son activité, elle a pris part au programme Elite, lancé par la Bourse de Casablanca, dont l’objectif est d'accompagner des PME pour faire face aux exigences du marché et leur permettre de faire leur entrée en bourse.
Contrairement aux précédents secteurs évoqués, l'entreprise évolue dans un secteur très déstructuré. "Le programme Elite nous a permis de faire comprendre aux actionnaires, qui sont des business familiaux, que le plus important dans une entreprise n’est pas l’optimisation du résultat net, c’est la création de valeur. Comment expliquer à un actionnaire qu’en se structurant nous allons mieux performer, alors que l’intégralité du secteur est opaque et déstructurée ?, témoigne le PDG de Cosmos Electro. Le programme a donc permis de comprendre comment mieux utiliser les ressources.
Après avoir été initié à l'intérêt de la transparence et de la communication via le programme Elite, le groupe a entamé ses démarches pour effectuer son IPO jusqu’à l’éclatement d’un différend judiciaire.
"Nous étions en phase de décollage avec l’entreprise. Le réseau allait doubler en moins de quatre ans, le chiffre d’affaires avait triplé, et l’EBITDA avait été multiplié par quatre. En plein processus de préparation, une affaire judiciaire éclate sur un point de vente pour une question de loyers avec un bailleur. Dans un cadre de confiance et de transparence, une décision s’imposait tout de suite, à savoir arrêter un processus d’IPO pour lequel nous avions travaillé deux ans", confie le PDG.
L'information était en effet paru dans la presse et le point de vente avait été fermé (ce dernier représentait 15% du chiffre d'affaires de l'entreprise, ndlr). "Nous avons décidé de faire une pause pour régler ce problème, et faire un pas en arrière pour faire deux pas en avant", explique le PDG.
En dépit de la situation, la société a pu tirer profit de ses enseignements dans la communication financière pour afficher plus de transparence dans ses opérations. "Le travail effectué n’a pas servi que pour l’IPO, mais aussi à l’ADN de la société. Nous l’avons amenée à un autre stade de gouvernance. Des clôtures mensuelles forcées sont effectuées pour pouvoir piloter les opérations au jour le jour", conclut le PDG.
>>> Lire aussi : Cosmos Electro aux enchères, recours prévu pour suspendre l'opération

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