Voici le système de taxation des produits à base de sucre envisagé pour 2023
Biscuits, chocolats, confiseries, glaces, laitages… Les industriels de l’agro-alimentaire pourraient payer dès 2023 une TIC progressive sur les produits transformés à base de sucre, si la proposition est adoptée dans le PLF 2023.
Voici le système de taxation des produits à base de sucre envisagé pour 2023
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Mehdi Michbal
Le 30 août 2022 à 19h25
Modifié 30 août 2022 à 19h42Biscuits, chocolats, confiseries, glaces, laitages… Les industriels de l’agro-alimentaire pourraient payer dès 2023 une TIC progressive sur les produits transformés à base de sucre, si la proposition est adoptée dans le PLF 2023.
- La TIC sur les produits transformés à base de sucre devrait figurer dans la prochaine mouture du PLF 2023
- Un barème progressif qui dépend du taux du sucre utilisé dans le produit.
- Une période transitoire de 3 ans sera proposée avant d’arriver au format final.
En discussion depuis de longues années, le sujet de la TIC sur les produits transformés à base de sucre sera probablement instauré en 2023. Il devrait figurer dans la prochaine mouture du PLF attendue pour la mi-octobre, selon nos sources.
Le principe général de cette TIC fortement envisagée dans le prochain projet de loi de finances est le suivant : cette taxe ne sera pas uniforme, mais dépendra du taux de sucre utilisé dans chaque produit.
Pour les produits contenant moins de 20% de sucre, aucune taxe ne sera payée. La taxe n’est redevable qu’à partir du dépassement de ce seuil. Et son taux sera progressif selon un barème qui sera rendu public dans le PLF. Le taux maximal sera appliqué dès qu’un produit dépassera 50% en contenu.
Mais une période transitoire de trois ans est prévue avant d’arriver à ce format final.
En 2023, première année d’entrée en vigueur de la nouvelle TIC, le seuil d’exonération sera de 40%. Il baissera en 2024 à 30% avant de passer à 20% en 2025, nous apprennent nos sources.
Prendre d’une main ce que l’on donne de l’autre...
L’instauration de la TIC sur les produits industriels à base de sucre vise deux objectifs principaux.
Le premier est de permettre à l’Etat de reprendre d’une main ce qu’il donne en subventions au sucre pour soutenir le pouvoir d’achat des ménages les plus vulnérables.
La subvention sur le sucre versée par la caisse de compensation a atteint sur les cinq dernières années une moyenne de 3,4 milliards de dirhams, selon une étude présentée en mars dernier par le ministère des Finances au Parlement, pour une quantité consommée d’une moyenne de 1,2 million de tonnes. Or, 25% de cette quantité est consommée par les industries agroalimentaires, comme le précise la même étude.
La TIC vise ainsi ces 25% qui ne doivent pas, en principe, bénéficier des aides de la caisse de compensation.
Ce n’est pas la première fois que l’Etat recourt à ce mécanisme pour récupérer les subventions au sucre. Entre 1999 et 2006, l’Etat récupérait, selon le département des Finances, pas moins de 400 millions de dirhams par année chez les agro-industriels qui utilisent le sucre subventionné comme intrants. Un mécanisme instauré par le gouvernement El Youssoufi qui a été abandonné en 2007, sous le gouvernement El Fassi, sur toutes les industries, à l’exception des limonadiers qui ont continué à payer la TIC. Les montants récupérés par l’Etat sont passés depuis à 70 millions de dirhams.
Le retour de la TIC sous sa forme actuelle permettra de corriger cette aberration et renflouera un peu les caisses de l’Etat pour les prochaines années budgétaires.
Mais un grand professionnel du secteur nous déclare que les raisons qui ont poussé le gouvernement El Fassi à abandonner cette taxe sont toujours présentes et qu’il ne voit pas l’intérêt de sa réinstauration : « La TIC sur les produits transformés avait à l'époque boosté les ventes de l’informel, ce qui a motivé sa suppression. Le secteur informel est toujours présent et s’est même renforcé, sans parler des produits importés et de la contrebande. L’instauration de cette taxe grèvera la compétitivité du secteur organisé et profitera essentiellement à l’informel et aux importateurs, sauf si le gouvernement prend des mesures parallèles en instaurant la même TIC sur les importations et en luttant contre l’informel », explique un producteur.
Une TIC pour limiter les maladies non contagieuses, vraiment ?
Dans tous les cas, cet argument du mauvais ciblage de la subvention au sucre n’est pas celui qui est mis en évidence pour justifier le retour de la TIC par le gouvernement Akhannouch, qui préfère y aller par un argument de santé publique. S’appuyant sur les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui font un lien direct entre la consommation de sucre et la prolifération des maladies non contagieuses, comme l’obésité, le diabète et autres maladies devenues courantes de nos temps, l'exécutif vise principalement, à travers cette taxe, comme nous le révèlent des sources sûres, à réduire la consommation globale de sucre dans le pays pour protéger la santé des citoyens. C’est le principal objectif ciblé par l’instauration de cette taxe, soutiennent nos sources.
Et le format de la taxe (progressive selon le taux d’usage de sucre avec une exonération totale sous le seuil de 20%), montre bien que l’idée est de pousser au maximum les industriels à réduire l’utilisation de sucre dans leur processus de production.
Intuitivement, on peut penser que cette TIC, qui agira à la fois sur la quantité de sucre utilisé dans le chocolat, les confiseries, les biscuits, les yaourts et autres laitages, mais aussi sur le prix de ces produits qui risque d’augmenter sur le temps, réduira effectivement la consommation de sucre par les citoyens et agira de facto sur leur exposition aux différentes maladies non transmissibles. Mais ce raisonnement est contesté par la Fédération nationale de l'agroalimentaire (Fenagri), à partir d'une étude financée et réalisée sous la houlette du ministère du Commerce et de l’industrie, et que les professionnels mettent en avant depuis le début de l’année dans leur lobbying pour dissuader le gouvernement de mettre en place cette TIC.
Une étude dont Médias24 détient copie et selon laquelle la taxation des produits industriels de sucre au Maroc aura un effet contraire sur l’objectif souhaité de limiter la propagation des maladies dues à la consommation de sucre.
Cette étude avance d’abord que cette TIC ne vise que le quart du sucre consommé au Maroc, car les trois quarts sont consommés de manière directe. Et que l’instauration de telles taxes dans d’autres pays du monde a produit les effets inverses : « Le taux de consommation indirecte de sucre est très élevé dans les pays qui ont instauré cette TIC comme en France, au Mexique ou en Afrique du Sud (85, 73 et 62% respectivement), ce qui montre que la mise en place de cette taxe n’a aucun effet sur la consommation de sucre et qu’il faut prendre en compte les spécificités de chaque pays », avance l’étude.
Autre argument avancé : le Maroc, contrairement à beaucoup de pays dans le monde, n’est pas concerné par ce phénomène d’excès dans la consommation de produits industriels transformés à base de sucre.
« Au Maroc, la consommation de produits industriels à base de sucre est très faible comparée aux pays de la région et aux pays développés : moins de 1,5 fois la consommation dans les pays d’Afrique du Nord et 2,5 fois moins dans des pays comme la France, la Turquie, l’Espagne ou l’Italie », signale l’étude.
Preuve par l’obésité. Cette maladie a connu, selon l’étude que présente la Fenagri, une hausse de 18% entre 2010 et 2016 au moment où la consommation de sucre a baissé de 5% sur la même période. Ce qui fait dire aux industriels qui se sont appuyés sur l’avis d’experts en nutrition que les maladies non contagieuses dont parle le gouvernement ne sont pas dues à la seule consommation de sucre, mais aux traditions et habitudes alimentaires de la société (20 à 30% seulement de la population veille à une nutrition équilibrée), ainsi qu’à l’absence d’une culture de l’exercice physique (seuls 20% des Marocains ont une activité physique régulière).
Des arguments et contre-arguments qui promettent un débat animé et fort intéressant lors de la discussion de cette mesure fiscale dans le cadre du projet de loi de finances 2023.
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