Voici les chiffres clés du rapport de la supervision bancaire en 2021
Une conférence a été organisée au siège de Bank Al-Maghrib (BAM) à Casablanca ce lundi 25 juillet, dans le cadre de la 18e édition de la supervision bancaire. La directrice de la supervision bancaire de BAM, Hiba Zahoui, a présenté le rapport annuel 2021 et s’est ensuite prêtée à l’exercice des questions-réponses avec les journalistes.
Dans un premier temps, elle a présenté les chiffres clés concernant le secteur à fin 2021. Le secteur bancaire, dans sa structure, est resté globalement stable. Au total, en 2021, 89 établissements de crédits étaient sous la juridiction de BAM contre 91 en 2021. Les trois plus grandes banques de la place détiennent 62,4% des actifs à fin 2021.
Mme Zahoui a également noté la rationalisation des agences bancaires du fait de la digitalisation croissante du secteur et de l’utilisation accrue des modes numériques pour les opérations courantes. En 2021, le nombre d’agences bancaires s’affichait à 6.056 unités, en baisse de 117 unités par rapport à 2020.
L’année 2021 a été marquée par une augmentation de 1,4 million du nombre de comptes bancaires, pour un total de 31,2 millions. A fin 2021, 53% des adultes marocains détenaient un compte bancaire.
Hiba Zahoui a également dressé l’évolution de l’activité des banques du pays et des indicateurs clés du secteur.
L’évolution des crédits principalement poussée par les mécanismes garantis par l’Etat
En 2021, l’évolution des crédits distribués a connu une légère hausse de 2,8% à 948 MMDH. « Cette progression a été essentiellement soutenue par l’octroi aux entreprises des prêts garantis par l’Etat, à savoir Damane Oxygène et Damane Relance, décidés par les autorités pour faire face aux impacts de la crise », souligne Hiba Zahoui. Dans l’encours total, 48 MMDH sont des crédits Damane.
La progression des crédits accordés par les banques aux entreprises privées a évolué de 4,2% et de 3,2% pour les crédits accordés aux ménages. Par objet économique à fin 2021, les crédits à la trésorerie marquent la hausse la plus notable avec une amélioration de 9,3% à 177 MMDH. « On constate que le gros des crédits a été soutenu par le financement des besoins d’exploitation des entreprises. En revanche, les crédits à l’équipement, qui viennent financer des besoins d’investissement des entreprises, accusent un recul de 4,4% sur la période. Cela montre que les entreprises ne sont pas encore dans une posture d’investissement dans le contexte actuel », explique Hiba Zahoui.
Les crédits à l’habitat ont progressé de 2,8% à 216 MMDH. Ils sont néanmoins en décélération par rapport à 2020. « L’année 2020 avait été marquée par une hausse de plus de 5% du fait des mesures prises par le gouvernement, notamment en termes de droit d’enregistrement », rappelle la responsable.
Elle est également revenue sur les risques inhérents à l'activité de crédit en 2022. La liquidité des banques demeure résiliente, comme l'ont démontré les stress tests menés par Bank Al-Maghrib en décembre 2021. « Les stress test nous ont montré qu’il y avait une résilience de la part du secteur bancaire au niveau global et individuel. Les vulnérabilités potentielles pourraient venir d’éléments macroéconomiques », note-t-elle. Néanmoins, les répercussions de la situation globale impliquant les perturbations logistiques, l’inflation croissante et l’évolution de la guerre Ukraine-Russie représentent un risque, notamment sur l'activité crédit. « Tous ces éléments sont des vulnérabilités économiques qui peuvent se répercuter sur les clients des banques à travers le canal du crédit. Nous surveillons cela de près. Pour le moment, les choses restent gérables ; il n’y a pas de vulnérabilité qui préoccupe outre mesure. »
L’instance est également revenue sur l’évolution des caractéristiques des bénéficiaires des crédits bancaires à l’habitat et à la consommation.
Les salariés et fonctionnaires captent 80% des crédits à l’habitat et à la consommation en 2021
Durant l’année 2021, l’essentiel des crédits à l’habitat a été octroyé aux salariés et aux fonctionnaires. 43% des bénéficiaires de crédits à l’habitat étaient des salariés et 37% des fonctionnaires. Ils sont suivis par les professions libérales avec 12% et les artisans et commerçants avec 7%.
« Cette image demeure globalement similaire concernant les crédits à la consommation en 2021, avec 48% des bénéficiaires qui étaient salariés et 33% de fonctionnaires », précise Hiba Zahoui. Pour le crédit à l’habitat, le tiers des bénéficiaires perçoit un revenu supérieur à 10.000 dirhams. « Pour les crédits à la consommation, il s’agit plus des tranches de rémunération inférieures à 4.000 dirhams avec une proportion de 36% », précise la directrice de la supervision bancaire.
Hiba Zahoui est également revenue sur la dynamique de progression des dépôts clientèle et les performances des banques en général courant 2021.
Une amélioration des dépôts observée en 2021
En 2021, les dépôts clientèle ont progressé de façon plus soutenue que l’année précédente, avec une amélioration de 5,3% à 1 056 MMDH. « Quand on observe quels sont les agents économiques qui expliquent les bonnes tenues des dépôts, on voit que les particuliers affichent une progression de 3,9% à 749 MMDH, aussi bien que les autres agents économiques non financiers, dont les dépôts progressent de 7,9% à 260 MMDH », explique Hiba Zahoui.
Par objet, ces dépôts progressent de 7,5% à 710 MMDH concernant les dépôts à vue. De leur côté, les dépôts à terme ont continué de baisser avec un retrait de -1,5%, à mettre en relation avec les taux bas de rémunération de l’épargne. Les comptes d’épargnes, eux, ont légèrement progressé de 2,7% à 174 MMDH.
Avec le contexte actuel et une inflation à 7,2% à fin juin, une baisse des dépôts est-elle attendue cette année ? Ce scénario n'est pas envisagé par l'instance actuellement. « On peut voir que sur les dépôts rémunérés, cela peut être un facteur. Les dépôts à terme sont en baisse, mais ce n'est pas spécifique à l'année 2021. Les comptes d'épargne vont continuer d'attirer car ce sont des comptes de petite épargne, malgré le fait que les taux ne soient pas très rémunérateurs. Je pense que l'on verra plus de dépôts à vue et plus de placements dans les instruments financiers alternatifs », explique la directrice de la supervision bancaire.
Le secteur (11 plus grands groupes, ndlr) dans son ensemble a affiché une nette amélioration de sa rentabilité en 2021. Le PNB consolidé a progressé de 3,8% pour se fixer à 80 MMDH et le RNPG consolidé est ressorti en hausse de 78,1% à 12,1 MMDH. Il a notamment été boosté par une nette amélioration du risque sur la période avec une baisse de 21% à 16,2 MMDH. « Il y a d’une part l’amélioration du PNB et la baisse du coût du risque qui ont permis au résultat net de se redresser de façon significative », explique la directrice.
Elle pointe néanmoins le fait que la marge globale d’intermédiation a reculé sur la période pour se fixer à 2,87%. « Le taux de rendement des emplois des banques a baissé. Cela a été notamment le fait des prêts Damane Relance et Damane Oxygène, qui étaient des prêts encadrés avec des taux d’intérêt bas. Les taux de rendement des crédits et des emplois étaient donc en recul », précise Hiba Zahoui.
Créances en souffrance : le marché secondaire en cours de préparation
Les impayés ont affiché une progression de 6,6% en 2021 à 85,1 MMDH contre 79,8 MMDH en 2020. Ils représentaient 8,5% du total des crédits attribués en 2021 contre 8,2% en 2020.
Une occasion pour la directrice de la supervision bancaire de BAM de revenir sur le projet de marché secondaire des créances en souffrance, souhaité par l’instance pour lutter contre la hausse des impayés. « Ce chantier porte sur l’identification et la mise en place des conditions préalables à la création de ce marché en vue de réduire le portefeuille des créances en souffrance, porté par les banques à travers une cession auprès d’investisseurs intéressés. Ce faisant, ces cessions permettraient d’accroître les capacités des banques à financer l’économie », note BAM.
« Je pense que le projet avance bien, après une phase où il a fallu mettre les intervenants autour de la table. Nous avons les différentes parties prenantes qui sont là, à savoir BAM, le ministère de l’Economie et des finances, de la Justice, du Commerce et de l’Industrie… », a expliqué Hiba Zahoui.
Il y a plusieurs volets sur lesquels les instances doivent travailler pour faire aboutir le projet. En effet, certaines contraintes en lien avec l’activité doivent être levées pour améliorer le recouvrement et clarifier la donne pour les potentiels investisseurs. « Tout investisseur qui viendrait investir dans ce marché a besoin d’avoir des garanties de recouvrement sur le plan de la procédure judiciaire. Sur ce point, les choses avancent. Nous avons un prestataire juridique qui nous accompagne dans la préparation des amendements de loi », précise Hiba Zahoui.
S’ensuit le volet fiscal pour inciter les investisseurs ou cessionnaires. « Nous avons eu des discussions avec l’administration fiscale sur ce volet et avons obtenu de bons résultats », explique la directrice, sans toutefois s’épancher dans les détails.
Le troisième sujet est opérationnel : comment les banques doivent se préparer pour avoir les systèmes d’information qui fournissent toute la donnée nécessaire pour un investisseur. « Il faut surtout professionnaliser et mettre à niveau le marché du recouvrement au Maroc. Les deux premiers chantiers avancent bien ; ce sont les prioritaires. Nous travaillons naturellement avec les banques de notre côté pour tout ce qui est système d’information », conclut Hiba Zahoui.
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