Disty Technologies : IPO, accompagnement, potentiel en bourse, les analyses d’Idriss Berrada

Idriss Berrada, directeur général d'Attijari Finances Corp.
| Le 7/7/2022 à 12:44
La bourse de Casablanca accueillera dès le 20 juillet, lors de sa première cotation, l’importateur et distributeur de matériel informatique Disty Technologies. L’autorité marocaine du marché des capitaux a visé l’introduction en bourse de l’entreprise le 27 juin dernier. La première de l’année 2022.

La jeune PME, créée il y a dix ans, sera la première opération sur le marché alternatif, réservé aux entreprises de ce type. Pour rappel, ce compartiment marché alternatif est globalement similaire au marché central, mais dispose d’une réglementation plus souple pour encourager les PME à l’intégrer. Il est notamment moins restrictif concernant le nombre de titres minimum et le montant minimum à diffuser dans le public.

Pour ce faire, le nouvel arrivant en bourse a été accompagné dans sa démarche par Attijari Finances Corp, l’organisme de conseil et coordinateur global de l’opération. Généralement, les entreprises qui s’introduisent en bourse sont des structures plus grandes, plus complexes que Disty Technologies. La méthode d’accompagnement d’Attijari Finances Corp a donc dû s’adapter à cette nouvelle structure.

A ce sujet, Idriss Berrada, directeur général d’Attijari Finances Corp, nous a reçus pour échanger sur le potentiel de cette nouvelle IPO sur le marché casablancais, et sur les particularités de ce premier accompagnement d’une PME sur le marché financier.

Il a également évoqué le capital post-opération de Disty Technologies et la sortie partielle de l’actionnaire AfricInvest. En effet, sur ce deal, le fonds s’engage à conserver ses titres durant six mois. Cependant, "toute cession de l’intégralité de la participation pourra intervenir au cours de cette période, sous réserve que celle-ci soit réalisée au profit d’un cessionnaire ayant souscrit, préalablement à ladite cession, un engagement de maintien de l’intégralité de la participation et ce, pour une période d’au moins un an à compter de la date de ladite cession", précise la note l’information de l’IPO. Décryptage.

Medias24 : Disty Technologies fera son entrée sur le marché boursier le 20 juillet prochain lors de sa première cotation. Comment interprétez-vous le signal de cette nouvelle arrivée sur la cote, en connaissance du contexte actuel globalement incertain ?

Idriss Berrada : Disty Technologies est une opération importante, à différents égards. Il s’agit de la première opération réalisée sur un marché nouveau qu’est le marché alternatif, destiné à la PME et voué à promouvoir l’outil financier pour le développement de la PME. Le second élément, c’est que Disty a participé au programme Elite de la Bourse de Casablanca, ce qui en a fait un candidat préparé et nous a, au passage, facilité le travail d’accompagnement. Il faut enfin noter que cette IPO intervient dix ans après sa création. Cette création a été accompagnée par l’entrée d’un fonds d’investissement issu d’un partenariat public-privé (AfricInvest, ndlr). La conjugaison de ces trois éléments fait que la symbolique est importante.

- On a parlé de ce marché alternatif, mais concrètement, qu’est-ce que cela veut dire ? Est-ce une différence de cotation ou un aspect purement réglementaire ?

- Effectivement, beaucoup de monde s’interrogeait à propos de ce marché. La société sera cotée de la même manière que les autres. Là où le marché alternatif diffère du marché principal, c’est essentiellement dans les conditions d’admission.

Cela repose sur trois points. Premièrement, il y a une réduction des coûts pour l’admission des sociétés candidates à entrer sur le marché alternatif. Deuxièmement, il y a une facilitation de l’approche et des conditions administratives avec un guichet unique qui est ouvert à la société. Cela permet à l’entreprise de se focaliser sur un seul interlocuteur. Puis il y a un certain allègement en termes d’obligation de communication une fois qu’elle est cotée, notamment par le fait de communiquer semestriellement et non trimestriellement, contrairement aux autres sociétés cotées qui doivent le faire de façon trimestrielle. Ceci étant dit, l’information communiquée au marché est assez similaire à celle communiquée lors d’une introduction sur le marché principal.

- Quelle a été la particularité d’accompagner une PME sur le marché financier ? Quel changement avez-vous perçu dans l’accompagnement par rapport à une structure plus classique ?

- Honnêtement, avec Disty Technologies, l’exercice a tout de même été assez proche de ce que l’on voit sur d’autres types d’opérations plus importantes. Cela est dû à plusieurs éléments. Premièrement, le fondateur, Younes El Himdy, est rodé à ces exercices d’entrepreneuriat. C’est quelqu’un de très structuré. Il y a aussi le fait que c’est une société qui avait un fonds d’investissement dans son capital. Cela a très probablement ancré la culture de la transparence et de l’information dans le travail.

Maintenant, s’il y a un point à retenir, c’est bien la taille de l’effectif, du fait que ce soit une PME. Le travail au quotidien et le temps à allouer pour l’opération sont beaucoup moins importants que pour une entreprise classique. Nous n’avons donc pas eu de problèmes en termes d’informations, mais plutôt en termes de taille d’équipe pour baliser le terrain.

- Que change la taille de l’entreprise dans le processus d’encadrement ? J’imagine que vous encadrez les dirigeants, donc en quoi le nombre de salariés influence votre façon d’accompagner ?

- Alors non, car dans une introduction en bourse, on travaille sur la valorisation et l’aspect financier, mais également administratif. A commencer par la rédaction du prospectus d’information. Tout cela nécessite une récolte et un traitement de l’information important. Le quotidien dans ce genre de mission, c’est beaucoup de requêtes et de réception d’informations. Cette itération, somme toute courante, prend parfois un peu plus de temps avec une PME, car nous ne sommes pas dans un grand groupe où des structures spécifiques sont dédiées à gérer ce genre de choses et où les choses vont généralement plus vite.

- Considérez-vous réitérer l’expérience d’accompagner d’autres PME sur le marché financier et pour quelles raisons ?

- Absolument. Nous sommes convaincus que le marché de la PME est appelé à se développer. Le tissu économique marocain en est très largement constitué. Attijari Finances Corp a démarré, il y a près de deux ans, une activité destinée à la PME. C’est un virage qui commence à porter ses fruits, mais c’est surtout le message d’une conviction par rapport à la promotion de la PME dans le cadre de son développement. Nous voyons faire ce type d’opération à nouveau, et nous cherchons à le faire.

- Parlons de l’aspect activité de Disty Technologies. Selon vous, la valeur ne serait-elle pas exposée à un ralentissement de la demande cette année, suite à des achats en masse effectués en 2020 et 2021 pour s’équiper ?

- Pour être honnête, non. Car ce que nous avons vécu concerne des changements dans les modes de consommation. Le Covid a accéléré cela. L’IT est devenu une nécessité. Au-delà du fait que c’est un secteur qui tend à se développer en raison du changement des modes de consommation, il a aussi tendance à se professionnaliser à travers deux éléments majeurs.

Premièrement, la valorisation du SAV. Le consommateur a en effet besoin de conseil et de se retourner vers le distributeur s’il a un problème. Puis, le renforcement des contrôles aux frontières qui limite l’informel sur le marché.

- Quel attrait peut exercer Disty Technologies pour un investisseur, petit porteur comme institutionnel ?

- Les avantages sont nombreux. Pour se focaliser sur les principaux, on peut déjà dire que le secteur est porteur. On est dans un secteur en plein essor et qui aura tendance à s’institutionnaliser, ce qui fait que Disty Technologies est attrayante sur la Bourse de Casablanca.

De plus, l’acteur est le numéro 2 du marché. Il faut rappeler qu’il s’agit d’une activité où la relation avec les constructeurs est importante et non exclusive. Il y a des constructeurs qui ont pour objectifs de créer des équilibres sur le marché pour avoir des distributeurs solides et avec lesquels ils peuvent négocier en toute transparence.

Troisièmement, même s’il s’agit d’une PME, elle est extrêmement structurée et n’a rien à envier à d’autres structures plus grosses. Il y a une véritable culture de la transparence et de l’information qui repose sur le fondateur et le fonds d’investissement.

Les perspectives de croissance y sont également importantes à travers les cartes existantes, à savoir avec d’autres types de produits comme la vidéosurveillance. Mais aussi le développement de nouvelles cartes. Ce qui explique que l’IPO se fait par augmentation de capital. Elle permettra d’accompagner ce développement et de structurer les fonds propres du groupe pour répondre à de nouveaux marchés consommateurs de besoin de fonds de roulement.

Il faut aussi mentionner que le prix est très attractif et donne un rendement très attractif au-delà des 5%, alors que la moyenne du marché se situe aux alentours de 3,4% et 3,5%.

- Même si tous les investisseurs sont conviés à prendre part à la levée de fonds, est-ce qu’un type d’investisseur est plus attendu qu’un autre durant la période de souscription (qui s’étalera du 5 au 8 juin) ?

- Effectivement, c’est une opération essentiellement destinée aux personnes physiques et OPCVM (organismes de placement collectif en valeurs mobilières). Les marchés alternatifs vivent beaucoup de l’épargne des personnes physiques. Cependant, il ne serait pas étonnant de voir certains institutionnels s’inscrire dans l’IPO dans la volonté de promouvoir la PME et le marché financier pour cette dernière.

- Vous avez utilisé la méthode DCF pour valoriser l’entreprise. Pourquoi celle-ci plutôt qu’une autre ?

- Tout simplement car elle est usuellement utilisée dans le cadre des IPO. Ce n’est pas parce que c’est une PME que nous allons changer de méthode. Je vous invite à consulter toutes les opérations d’IPO par Attijari Finance Corp ; il s’agit de la méthode privilégiée. Pourquoi ? Car c’est une méthode intrinsèque à la société qui permet de valoriser ses flux. Pour nous, c’est la méthode la plus juste dans l’exercice de l’IPO.

- Post-opération, il a été annoncé que l’actionnaire majoritaire actuel, à savoir AfricInvest, restera actionnaire du groupe. Pourquoi un désengagement total n’a pas été effectué après dix années auprès de Disty Technologies ?

- La question s’est posée effectivement. Nous avons eu plusieurs discussions sur ce sujet. La conclusion, c’est que le fonds a passé dix ans dans le capital de Disty Technologies et dispose d’une année de vie avant sa clôture.

Plutôt que d’en sortir totalement, nous avons estimé qu’il serait plus intéressant de rester dans le capital pour garder un socle autour de M. El Himdy et de sortir potentiellement au profit d’un institutionnel dans l’année qui arrivera. Le but étant, en attendant, de maintenir une certaine continuité.

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