Crise économique : L’Afrique Subsaharienne touchée plus fortement que prévu (AGR)

B.B | Le 17/6/2021 à 13:57

Les effets de la crise se sont révélés plus nocifs que prévus en Afrique Subsaharienne notamment à cause des difficultés des états à assurer la relance de la demande intérieure et la baisse des cours des matières premières. Les pays aux économies diversifiées s’en sont le mieux sortis. Au global, les niveaux de croissance de la région reviendront à leurs niveaux pré-crise en 2022.

Dans un document de recherche publié le 17 juin, Attijari Global Research (AGR) dresse un bilan de l’impact de la crise sur les pays d’Afrique Subsaharienne (ASS) (48 pays d’Afrique regroupant 1 milliard d’habitants, ndlr).

AGR tablait sur une certaine résilience de l’ASS durant la crise notamment à la faible évolution de l’évolution pandémique au début de la crise.

La société de recherche anticipait également une pression sur les autorités pour réduire les mesures barrières. « La domination des acteurs de petite taille, et l’importance de la part de l’informel dans les économies de l’ASS constituent des facteurs de pression pour limiter les durées de confinement » précise AGR.

Enfin, AGR notait la dépendance minime de la région à l’industrie du tourisme, très fortement frappée depuis l’éclatement de la pandémie. « Contrastant avec la Région de l’Afrique du Nord où le tourisme contribue au PIB pour à peu près 10%, Seuls 6 pays* ont une vocation touristique en ASS, et qui ne constituent pas des poids lourds de cette Région » indique-t-elle.

En réalité, la crise s'est avérée plus violente que prévue.

Un impact économique plus fort que celui attendu

La région a en effet été rattrapée par la crise. Elle présentait une croissance économique pré-Covid de 3% en 2019 et affichait une récession de 3% en 2020. Respectivement l’Afrique australe était la plus touchée avec -7% de croissance, puis l’Afrique centrale avec -2,7% et l’Afrique de l’Ouest avec -1,5%. Seule l’Afrique de l’Est a conservé sa dynamique de croissance en 2020 avec +0,7%.

Pour AGR, cette impact plus fort que prévu s’explique par différents facteurs. Premièrement, le poids du recul des matières premières, notamment les métaux et le pétrole. Les cours du pétrole avaient en effet chuté de 57 dollars à 22 dollars entre janvier et avril 2020. L’indice des métaux Nifty (qui réplique la performance de 15 métaux représentatifs, ndlr) quant à lui était passé de 2 797 à 1 496 à fin mars 2020.

Deuxièmement, l’ASS a également subi « une marge de manœuvre limitée dans l’implémentation des stimulus budgétaires pour soutenir la Demande Intérieure » explique AGR. En effet, les politiques de relance menées demeurent faibles sur la région avec en moyenne des mesures qui comptent pour 2,7% du PIB contre 7,3% pour les économies avancées.

Les économies les moins diversifiées ont souffert

Si la région au global a été plus durement touché que prévue, certains pays ont plus souffert que d’autres. Ces derniers rassemblent naturellement les pays dont l’économie repose en grande partie sur le tourisme. « L’Ile Maurice & les Seychelles où le tourisme et l’hôtellerie représentent près du quart du PIB ont vu leur économies reculer de l’ordre de 14% en 2020 » explique AGR.

La crise a également frappé fortement les pays dont l’économie était déjà essoufflée pré crise. Il s’agit notamment de l’Afrique du Sud ou du Zimbabwe qui présentaient des rythme de croissance globalement faible sur la période 2017-2019 de respectivement 0,8% et 2,6%.

D’autres pays fortement dépendant de matières premières comme le pétrole ou le diamant ont également souffert des répercussions de la crise comme la république Démocratique du Congo ou encore le Botswana. « Les pays exposés qui n’ont pas pu réduire suffisamment leur dépendance aux matières premières accusent fortement le coup. L’ensemble de la machine économique semble fonctionner au ralenti dans ces pays où les revenus issus des ressources naturelles alimentent la dynamique des autres secteurs » précise AGR.

Concernant ces pays plus impactés, malgré la reprise économique attendu cette année, la société de recherche tient à nuancer : « En aucun cas de figure, le rebond économique de 2021 ne compenserait le repli du PIB de l’année qui précède. En règle générale, ces pays ne retrouveront leur niveau de production de 2019 qu’en 2022-2023 ».

Des relais de croissance persiste dans la zone

A l’inverse les pays disposant d’une économie plus diversifiée ont mieux supporté les stigmates de la crise. « Seuls les pays qui disposent d’une croissance intrinsèque très soutenue (supérieure à 6%) affichent une progression du PIB en 2020. En aucun cas, cette dernière ne dépasse le seuil de 2% » explique Attijari.

Deux régions économiques tirent mieux leurs épingles du jeu que les autres. Il s’agit notamment de la Comesa (Marché commun de l'Afrique orientale et australe) regroupant l’Ethiopie, la Tanzanie et le Rwanda, et l’UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine) avec le Bénin et la Côte d’Ivoire. « Cette région afficherait dans son ensemble une croissance positive de 0,3% en 2020 contre -3,2% pour la CEMAC (Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale). La COMESA se distingue également avec la présence de l’Ethiopie et du Rwanda » indique AGR. En effet ces pays affichait des taux de croissance économique de respectivement 1,9% et 2%.

Selon AGR, excepté l’Ethiopie, ces pays « devraient confirmer leur capacité de résilience par un retour à un niveau de croissance en 2021 proche de celui affiché lors du triennat 2017-2019 ».

Un retour aux niveaux de croissance pré-crise attendu en 2022

Au global, sur la région ASS, le retour à une croissance similaire aux niveaux observés en 2019 ne se fera pas avant 2022, selon AGR. Cette année, une croissance de 3,1% est attendue. Il est à rappeler que sur la période 2010-2019, la croissance économique sur la région était de 4,2%.

Pour AGR, « la capacité de reprise relèvera également du comportement des prix des matières premières autant qu’une relance de la Demande intérieure par un rebond de la consommation et une reprise des investissements ».

Cela sera également le cas pour les trois plus grandes puissances économique de l’ASS que sont le Nigéria, l’Afrique du Sud et l’Ethiopie. Dans son rapport de recherche, AGR explique que le Nigéria a été fortement impacté en 2020 du fait du fort recul du PIB pétrolier qui représente 8% du PIB global du pays. Elle ajoute : « Les niveaux élevés d’inflation autour de 12,0%, combinés à une grande volatilité de la monnaie Naira ont tendance à limiter la marge de manœuvre de la politique de relance. L’accélération de la croissance au Nigéria n’est pas attendue avant l’année 2022 et demeure étroitement liée à la reprise des cours du pétrole ».  

L’Afrique du Sud également a été touchée sur l’ensemble de ses secteurs économiques. « Parallèlement, le déficit budgétaire devrait atteindre 14,0% du PIB, limitant de facto le soutien du secteur public pour la relance de l’économie » ajoute AGR.

L’Ethiopie, qui a mieux résisté à la crise, fait face à une certaine faiblesse de l’Etat face à la relance. « De même sur le plan monétaire, l’inflation demeure élevée avec un niveau établi à 20% en 2020. Ce niveau freine toutes les ambitions d’expansion monétaire. Ainsi, l’Ethiopie ne pourrait renouer avec son niveau de croissance pré-Covid qu’à partir de 2022 » explique la société de recherche.

En somme, les trois principales puissances économiques de l’ASS ne pourraient compenser les pertes subies en 2020 qu’à partir de l’année 2022, et ce, en tablant sur une dissipation continue de la pandémie cette année.

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