Startups et incubateurs s'adaptent tant bien que mal à la crise du Covid
La crise est un véritable stress-test pour les startups. Pour leurs incubateurs, celles les plus agiles arriveront à s’en sortir. Mais pour y parvenir, un encadrement adapté au contexte de crise est nécessaire.
La crise induite par la Covid-19 a fortement impacté le monde des startups. Dans une étude publiée le 14 juin par LaStartupFactory et Startup Square, il est estimé qu’un tiers des startups au Maroc pourraient faire faillite si la crise perdure. Les financements et les commandes ont été décalés ou annulés pour certaines d’entre elles, accentuant les tensions sur leurs trésoreries. A ce sujet, l’étude met en exergue que 64% des startups interrogées déclarent disposer de moins de 3 mois de trésorerie. Des problématiques qui pourraient s’accélérer à mesure que la crise sanitaire et économique perdure.
Comment les incubateurs qui les coachent et les accompagnent dans leurs projets de croissance, les voient-ils réagir face à la crise ? Dans ce contexte, l'encadrement de ces startups a dû être fortement revisité pour aider les jeunes pousses à traverser la mauvaise passe.
Des startups globalement résilientes
Les incubateurs épaulant des startups dans le domaine technologique ont pu voir un changement fort apporté par la crise. Pour certaines, l’année 2020 a été vectrice d’opportunités. Du côté de Marrakech avec Taoufik Aboudia, co-fondateur et CEO de l’incubateur Emerging Business Factory (EBF), la crise a permis à de nombreuses startups de se positionner face à une forte demande sur le digital. Contacté par LeBoursier, il nous explique : « Nous avons aperçu un intérêt des acteurs économiques pour le digital. En tant qu’incubateur, nous sommes arrivés avec une marketplace constituée des entreprises que nous hébergeons et nous les mettons en relation avec les demandeurs. Nous avons vu la différence ne serait-ce que sur le e-commerce, la demande est colossale ». La crise a d’ailleurs été, pour certains, l’occasion de créer différents projets. Le fondateur d’EBF poursuit : « avec la crise qui a frappé plus durement notre région sur l'industrie du tourisme notamment, nous avons vu une recrudescence de candidatures au sein de l'incubateur. Il s'agit de personnes ayant perdu partiellement ou totalement leur emploi et souhaitant développer un projet à eux ».
Même si certaines startups ont été, d’un point de vue conjoncturelle, fortement affectée, les autres arrivent à garder le cap malgré la crise. « Nous avons eu deux ou trois startups qui ont été durement frappées par la crise car elles opèrent directement dans le tourisme. Nous avons essayé de donner le maximum de support notamment en frais de résidence à EBF et en les mettant au fait via nos réseaux de partenaires comme le CRT, la CNT. Mais les autres sont plutôt en bonne santé, avec les événements organisés et les formations, nous parvenons à les mettre en relation avec des potentiels clients et partenaires clés. Par exemple, lors d'un événement Emerging People, nous avions une entreprise ayant un projet de Street Food qui avait peur des problématiques d'autorisation. Il s'avère qu'à cet événement, l'un des convives était un haut représentant à la Wilaya de Marrakech Safi et le rapprochement a opéré la magie. Cela leur permet concrètement d'avancer » explique-t-il.
Néanmoins, le changement de conjoncture a fortement perturbé les jeunes pousses évoluant déjà dans un milieu assez incertain. Pour Mehdi Alaoui, patron de LaStartupFactory, la crise a fait ressortir deux traits de caractères. « Il y a celles qui ont accepté d’évoluer et de s’adapter à la crise, c’est-à-dire se numériser d’avantage et réorienter leur business. D’autres sont passées en mode hibernation et attendent la fin de ce new normal. Du coup, nous verrons dans 6 mois ce que cela donnera pour eux. Mais la qualité la plus importante c’est de pouvoir se réinventer tout de suite. Il faut sentir les opportunités » explique-t-il.
Un suivi sur mesure face à la crise
Mais dans ce contexte crise, l’accompagnement des incubateurs a également dû être adapté pour assurer la pérennité des jeunes pousses. « C’est simple, il y a eu le confinement puis les fêtes religieuses où tout le monde était chez soi avec une interaction 100% digitale » nous explique Mehdi Alaoui. Pour assurer la continuité des activités, l’incubateur a dû développer une plateforme en ligne pour assurer le suivi des startups incubées et la poursuite des projets. « Nous avons rouvert juste après avec un système hybride. Nous avons développé une plateforme où les échanges se font à distance et où nous pouvons continuer à communiquer avec nos startups incubées en direct avec les outils nécessaires. Encore aujourd’hui, nous sommes à 70% en distanciel et 30% en présentiel » poursuit-t-il.
Un constat partagé par Wafaa Naim El Idrissi, nouvelle directrice de l’incubateur à fort impact social et environnemental, Bidaya. Elle nous explique : « Nous avons pu accompagner l’agilité des entrepreneurs. Il a fallu réajuster notre accompagnement auprès des entreprises incubées pour répondre à leurs besoins et problématiques qui ont changé avec la crise. Nous avons dû faire des ajustements sur l’accompagnement au marché également ». Elle poursuit, « nous avons fait moins de relations et moins de networking pour nos startups. Mais cela nous a permis de digitaliser et qui a permis de plus personnaliser le suivi que l’on assure pour nos entrepreneurs. Leurs business plans et les hypothèses sur lesquels ils étaient partis ont naturellement été affecté par la conjoncture ».
Pour l’incubateur marrakchi aussi, les habitudes ont dû changer pour épauler les startups et répondre à leur problématiques. « Nous avons un espace qui a rapidement rouvert avec le présentiel en faisant le nécessaire avec des désinfections régulières. Nous ne voulions pas laisser les startuppers qui n’avaient pas les bonnes conditions chez eux. Mais il est vrai que la communication à distance est devenue normale. Désormais, le physique est un recours et le distanciel la norme. Notre programme avec l’INDH qui s’appelle Emerging Academy est à 95% dispensé en distanciel car c’est aussi plus facile pour les gens », conclut Taoufik Aboudia.
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