Comment redémarrer l’économie : voici ce que propose le député Omar Balafrej

M.M. | Le 20/4/2020 à 12:29

Médias24/LeBoursier consacre une série d’articles à la réflexion autour du redémarrage de l’économie, en prenant l’avis de plusieurs personnalités du monde économique et politique. Très actif au sein du Parlement, le député de la gauche démocratique expose ici sa vision.

Pour le député FGD, la priorité c’est de soutenir le tissu productif. Balafrej défend une politique protectionniste et pense que cette crise nous offre une chance pour infléchir notre politique de libre-échange.

Le sujet était déjà dans l’agenda politique avant la crise du Coronavirus, avec la renégociation des termes de l’ALE avec la Turquie lancée par le ministère de l’industrie et du commerce.

Avec cette crise, le Maroc peut aller encore plus loin, estime Omar Balafrej, en demandant des dérogations à l’OMC pour remettre des barrières tarifaires à l’import. Nous sommes en droit de le faire, soutient le député.

Du protectionniste pour relancer l’industrie locale

Au delà des ALE, Balafrej explique que c’est tout le flux de nos importations qui doit être freiné pour permettre à l’industrie locale de repartir sur de nouvelles bases.

Dans son collimateur, ce qu’il appelle les « importations inutiles » : les voitures et smartphones de luxe, les biscuits, une grande partie du textile turc, certains produits agroalimentaires… Il donne pour cela l’exemple des conserves de tomates égyptiennes qui se vendent dans nos quartiers populaires à des prix défiant toute concurrence. Pourquoi devrions nous continuer de permettre aux égyptiens de faire du dumping en déversant leur surplus de production chez nous ? s’interroge-t-il.

Ces limitations à l’import auront selon lui deux effets : rebooster la production industrielle marocaine et éviter à l’Etat de s’endetter davantage en devises pour couvrir ses achats à l’international.

Une position qu’il a exprimée au Parlement au sein de la commission des Finances pour s’opposer au projet gouvernemental d’augmentation du plafond de la dette extérieure portée par Benchaaboun. Un endettement en devises pas vraiment nécessaire en ces temps de ralentissement économique et qui continuera de servir, selon lui, le lobby des importateurs au détriment des producteurs locaux.

Ce protectionnisme doit aussi s’accompagner par une politique de réorientation de l’industrie locale vers des niches porteuses pour le pays. Exemple du secteur du médicament où le Maroc peut devenir un champion régional, en s’appuyant sur son autosuffisance actuelle et en développant davantage les débouchés. Il cite en cela le cas des masques, qui a cassé selon lui un mythe, et démontré que nos industriels n’ont rien à envier aux producteurs chinois.

Des hommes d’affaires comme Aziz Akhannouch ou Moulay Hafid Elalamy doivent selon Balafrej prendre le lead en quittant la politique pour investir dans ces nouvelles filières porteuses.

Faire sauter les verrous de l’orthodoxie budgétaire et monétaire

Autre axe de relance défendu par le député socialiste : une intervention plus accrue de l’Etat dans l’économie à travers la dépense budgétaire et des injections massives de liquidités dans l’économie.

C’est le seul moyen, estime-t-il ,de soutenir l’économie en cette période de flottement. Aussi bien sur le volet de l’offre, à travers la commande publique et des crédits à taux zéro, que celui de la demande, en poursuivant notamment la politique des aides sociales.

Il propose en cela que l’hélicoptère monétaire déployé par l’Etat pour soutenir le pouvoir d’achat des ménages soit prolongé d’au moins 6 mois. Une période que correspond à ce qu’il appelle « le temps de la relance », où il sera nécessaire de continuer à distribuer les aides sociales pour mettre les gens à flot.

Pour cela, l’Etat ne doit pas être très regardant sur la dépense, quitte à faire sauter les verrous de l’orthodoxie budgétaire et monétaire.

Pour financer le déficit budgétaire que produira cette politique, Balafrej pense qu’on peut reproduire l’expérience anglaise, où la Banque d’Angleterre a été autorisée à prêter directement à l’Etat, cassant au passage le sacro saint principe de l’indépendance des banques centrales.

Autre principe monétaire que le député pense qu’il est temps de casser : le ciblage d’une inflation basse. Le Maroc ne peut plus se permettre une inflation à 1%, explique le député, qui s’était longuement expliqué sur cette idée dans une interview à Médias24.

Lâcher l’inflation permettra selon lui non seulement de booster la croissance mais aussi de résorber la dette publique. Une bonne inflation pour le Maroc doit se situer autour de 7%, estime-t-il. Un taux élevé mais qui correspond plus à la réalité économique d’un pays en développement comme le Maroc, qui n’est ni l’Allemagne ni la France. Surtout, dit-il, si la croissance est au rendez-vous.

Taxer le capital et les hauts revenus pour financer l’effort budgétaire

Financer la dépense publique passera aussi par plus de recettes fiscales, soutient également le député. Et ce n’est pas dans les rubriques actuelles de l’impôt qu’il faut puiser mais dans de nouvelles ressources qu’il est temps d’explorer en ces temps de crise.

Sa recette : un triple dispositif de taxation qui ciblera les hauts revenus, le capital et les successions. Une idée que le député défend depuis son entrée au Parlement en 2017.

Les Marocains ont fait montre d’un esprit de solidarité inédit durant cette crise sanitaire. Il faut que cet esprit soit pérennisé par l’impôt, soutient Balafrej, avec une fiscalité plus juste, mais sans qu’elle ne soit excessive, précise-t-il.

Ceci permettra à l’Etat de rattraper les baisses qu’accuseront les recettes fiscales en cette année de disette et de disposer de nouvelles ressources pour financer la relance.

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