Investissement : une nouvelle vie pour le Fonds Hassan II ?

M.M. | Le 11/2/2019 à 12:20

Sa nouvelle présidente sera reçue par le Roi cet après-midi selon une source sûre. Avec le renflouement des caisses du Fonds, estimé à 20 milliards de dirhams d’ici 2024, ce véhicule qui a servi à financer tous les grands chantiers du nouveau règne sera appelé à jouer un nouveau rôle. Après les infrastructures, il est désormais attendu sur le soutien à l’investissement productif. 

 

Nommée jeudi dernier présidente du directoire du Fonds Hassan II pour le développement économique et social, Dounia Taârji sera reçue cet après-midi par le roi Mohammed VI, selon une source sûre. 

De nouvelles orientations seront données pour impulser un nouveau souffle à l’action de ce véhicule d’investissement étatique dont les ressources seront fortement renflouées à partir de cette année.

Le fonds Hassan II a été créé en 2000 pour soutenir l’investissement dans les infrastructures et les projets structurants du nouveau règne.

Il a été alimenté dès sa première année par l’argent de la nouvelle licence GSM accordée à Méditel (1 milliard de dollars).

« Une part de 70% de ce montant a été versée au Fonds Hassan II. C’est ce qui a permis son amorçage. Nous avons ensuite décidé d’y allouer 50% des recettes des privatisations », explique le ministre des Finances de l’alternance Fathallah Oualalou.

Le Fonds vivra alors son âge d’or : privatisation de Maroc Télécom, de la Régie des Tabacs, des sucreries publiques et d’une dizaine d’autres entreprises étatiques… De l’argent frais qui a servi à financer tous les grands projets des années 2000.

Après le tarissement des recettes des privatisations, le Fonds a continué à recevoir des contributions étatiques. Mais celles-ci ne dépassaient pas les 2 milliards de dirhams l’année et étaient puisées dans le budget général.

Une situation appelée à changer dès cette année.

Une injection programmée de 20 milliards de DH entre 2019 et 2024

En 2019, une enveloppe de 5 milliards de dirhams sera versée au Fonds Hassan II comme annoncé par le ministre des Finances lors de la présentation de son budget 2019. Ce montant correspond à la moitié des recettes escomptées des privatisations programmées en 2019 (10 milliards de dirhams).

Ce renflouement ne sera pas un acte isolé, mais durera sur au moins cinq ans.

Dans une lettre adressée le 30 novembre 2018 par l’argentier du royaume et le Wali de Bank Al Maghrib à la directrice générale du FMI Christine Lagarde, les responsables marocains se sont engagés sur un programme de privatisation équivalent à 4% du PIB sur la période 2019-2024.

4% du PIB, c’est plus de 40 milliards de dirhams. La moitié de ce pactole ira renflouer les caisses du Fonds Hassan II.

C’est énorme : cela représente la moitié des versements effectués par l’Etat au Fonds depuis sa création en 2000. Des versements qui ont totalisé 39,6 milliards de dirhams selon le dernier rapport sur les établissements et entreprises publics.

La nomination de Dounia Taârji, actée en conseil des ministres, n’est pas donc un simple changement de visage. Mais est d’ores et déjà interprétée comme un changement de cap, le signe d’une nouvelle vie pour le Fonds.

« Il est encore prématuré de s’exprimer sur le sujet », nous dit Dounia Taârji, qui s’est installée officiellement dans son nouveau poste vendredi 8 février, après la passation des pouvoirs avec Abdelouahed Kabbaj.

Mais pour Fathallah Oualalou, un changement de cap s'avère nécéssaire : 

« Le Fonds a participé à tous les grands chantiers du pays, notamment dans les infrastructures. Je pense qu’il doit désormais se tourner vers le financement des secteurs productifs. Il l’a déjà fait par exemple sur certains projets comme Renault Tanger, mais cela doit désormais devenir une priorité», signale le ministre qui a géré la naissance du Fonds Hassan II et ses 7 premières années de vie.

S’aligner sur les priorités du nouveau modèle de développement

Imaginé par Hassan II et créé en 2000 par Mohammed VI, le Fonds Hassan II a servi comme catalyseur au modèle de développement des années 2000 : un modèle basé sur l’investissement public comme principal moteur de croissance.

L’idée derrière la genèse du Fonds était simple : l’argent des privatisations ne devait pas être englouti par les charges de fonctionnement du budget général de l’Etat. Il devait être mis à l’abri, servir à soutenir l’effort d’investissement de l’Etat et créer au passage un effet d’entraînement sur toute l’économie.

Cela donnait une légitimité politique à l’acte de privatiser et fournissait des moyens colossaux aux ambitions du nouveau monarque.

Tanger Med, autoroutes, stations du Plan Azur, zones industrielles, Renault Tanger, nouveaux stades de foot, aménagement de la vallée du Bouregreg, sauvetage et développement de la RAM, réseau ferroviaire, LGV Tanger-Casa…Le Fonds Hassan II a été de tous les grands projets initiés depuis 2000.

Mais ses ressources se sont taries après la mise à l’arrêt du programme des privatisations sous Abbas El Fassi.

Le modèle de son intervention est appelé également à évoluer. Le Fonds Hassan II a été le principal instrument financier d’un modèle de développement qui est arrivé à bout de souffle. 

Le modèle doit changer, comme l’a souhaité le Roi. Le Fonds Hassan II doit donc se réadapter aux nouvelles exigences du moment.

Et celles-ci sont connues :

- Soutenir l’investissement productif, créateur de richesse et d’emploi pour les jeunes.

- Accélérer l’investissement dans le capital humain (éducation, recherche, santé…).

- Résorber les inégalités sociales et territoriales.

L'audience royale qui sera accordée à Dounia Taârji sera à ce titre très révélatrice du nouveau cap que devra prendre le Fonds.

En attendant, voici les principales réalisations du Fonds Hassan II depuis sa création, la situation de ses ressources, la nature de ses engagements…Des chiffres, arrêtés à fin 2017, qui ont été exposés dans le dernier rapport sur les établissements et entreprises publics accompagnant la loi de finances 2019. 

55 milliards de dirhams de ressources cumulés depuis 2000

A fin 2017, le Fonds a enregistré un cumul de ressources financières de 55,3 milliards de dirhams, dont :

- 39,6 milliards versés par l’Etat, 

- 11,8 milliards au titre des produits financiers, 

- 3,7 milliards de remboursement des avances et des prêts.

Son intervention prend trois formes :

- Prises de participations comme dans Autoroutes du Maroc, Renault Tanger ou la RAM...

- Avances ou prêts remboursables,

- Contributions financières non remboursables.

Les engagements cumulés du Fonds à fin 2017 ont atteint 40,1 milliards. Rapportés à la période 2000-2017, ils correspondent à un rythme d’engagement annuel moyen de 2,2 milliards.

Dans ce total, la part des prises de participation est de 42,5%. Les avances non remboursables et prêts remboursables représentent respectivement 35,9 et 21,6%.

Par domaine d’intervention, le Fonds apporte son concours principalement à la promotion de l’investissement (17,4 milliards), aux grandes infrastructures (16,2 milliards) et à la promotion sociale, culturelle et sportive (6,4 milliards).


Des contributions régionales déséquilibrées…

Pour l’investissement, les contributions ont concerné les secteurs de l’industrie (programme des plateformes industrielles intégrées, mécanisme d’appui à l’investissement…), le tourisme (stations du plan Azur, Fonds Ithmar Capital…), l’énergie (programmes de développement des énergies renouvelables) et le transport (développement de la RAM).

Ces secteurs absorbent à eux seuls 94,6% du total des engagements dans ce domaine.

Pour l’infrastructure, l’enveloppe a été destiné au financement de grands projets (ports, routes, autoroutes, chemins de fer, aménagement de périmètres irrigués et forestiers et grands aménagements urbains…).

Une part de 74,4% a été affectée aux seuls projets de développement des infrastructures routières, autoroutières, ferroviaires et portuaires.

Dans le domaine de la promotion sociale, culturelle et sportive, plusieurs projets ont bénéficié du concours du Fonds Hassan II : projets d’habitat et d’achèvement des stades de foot de Tanger, Marrakech et Agadir, le projet du grand stade de Casablanca, développement des infrastructures d’athlétisme, les grands Théâtres de Casa et de Rabat, la Bibliothèque nationale du royaume, le musée des arts contemporains, le siège de l’IRCAM et le Musée de l’archéologie et des sciences de la terre.

Bien que toutes les régions du Maroc aient bénéficié de projets spécifiques, la contribution du Fonds et les investissements réalisés restent concentrés au niveau de certaines régions.

Ainsi, les régions de Tanger-Tétouan-Al Hoceima, Rabat-Salé-Kenitra, Casablanca-Settat, l’Oriental et Souss-Massa bénéficient à elles seules de près de 59% à la fois de la contribution totale du Fonds et des investissements portant sur des projets de grande envergure, notamment les complexes portuaires de Tanger Med et de Nador West Med, la LGV Casa-Tanger et la ligne ferroviaire Taourirt-Nador, le réseau autoroutier, Renault Tanger Med et Peugeot Citroën Automobile Maroc, l’aménagement de la vallée du Bouregreg, et l’aménagement de la lagune de Marchika.
  

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