Comment l’Africom évalue la menace Da'ech au Maghreb

Da'ech recrute désormais pour la Libye, à partir de la Tunisie et du Maroc. Voici l’analyse de l’Africom, exposée par le général Rodriguez.  

Comment l’Africom évalue la menace Da'ech au Maghreb

Le 28 janvier 2015 à 10h20

Modifié le 28 janvier 2015 à 10h20

Da'ech recrute désormais pour la Libye, à partir de la Tunisie et du Maroc. Voici l’analyse de l’Africom, exposée par le général Rodriguez.  

Le général de l’Africom (Africa Command) David Rodriguez s’exprimait face à la presse et aux experts militaires mardi après-midi à Washington au siège du think tank Center for strategic and international studies (CSIS).

Il s’est montré peu optimiste sur l’avenir à court terme de la Libye. «C’est un souci. Nous surveillons la situation de près», a-t-il indiqué. Rodriguez intervenait dans le cadre du Forum de la stratégie militaire, un évènement annuel du CSIS.

Il aura été beaucoup question des dossiers sécuritaires africains hier lors de la conférence du général Rodriguez: le Nigéria et Boko Haram qui menace l’intégrité territoriale du pays et celles du Cameroun et du Niger; le combat contre Ebola; la piraterie maritime dans le Golfe de Guinée et au large de la Corne de l’Afrique ; et la situation en Libye et en Afrique du Nord.

Rodriguez parle, Da'ech fait exploser des kamikazes

Sur la situation dans ce pays maghrébin, Rodriguez a dit «suivre avec beaucoup d’attention une situation sécuritaire qui se dégrade de jour en jour». Au moment où Rodriguez parlait à Washington au siège du CSIS sur la Rhode Island avenue, un attentat à la voiture piégée et aux ceintures d’explosifs faisait neuf morts, dont des Américains, des Français, des Sud-Coréens et des Philippins, à l’hôtel Corinthia sur la corniche de Tripoli.

L’hôtel, un palace, est réputé accueillir officiels internationaux et hommes d’affaires du monde entier.

Tripoli est contrôlée par Fajr Libya, une coalition de milices islamistes. Le gouvernement libyen issu des élections est lui basé à l’est, à Al-Baida.

Au moment de l’attaque, des ministres libyens se trouvaient dans l’hôtel. Celui-ci, une tour de 25 étages, abrite également la représentation diplomatique du Qatar.

L’attentat a été revendiqué par une branche libyenne de Da'ech qui comprend de nombreux miliciens tunisiens. La revendication publiée mardi soir par Da'ech, montre les photos de deux individus qu’elle présente comme les deux Tunisiens auteurs de l’attaque suicide. Comme l’a rappelé Rodriguez, «au moins trois factions armées libyennes ont à ce jour fait allégeance au mouvement d’Al Baghdadi».

Outre le fait que le pays soit empêtré dans une guerre civile et une absence de fonctionnement d’une quelconque structure étatique, la Libye «dispose» de deux gouvernements et deux «parlements» au moins aujourd’hui. Une conférence de conciliation tenue à Genève les 16 et 17 janvier derniers s’est soldée par un échec. Les divisions entre Libyens s’aggravent de jour en jour depuis la mort de Kaddafi.

Pour Rodriguez, la situation en Libye «exige l’attention nécessaire» car Da'ech y est désormais implantée et que le pays est voisin des autres pays du Maghreb, importants fournisseurs de combattants des guerres actuelles de Syrie et d’Irak».

Depuis l’automne dernier, Da'ech ne recrute plus au Maroc et en Tunisie pour le front syrien, mais pour le front libyen.

La Tunisie et le Maroc fournissent depuis 2013 d’importants contingents de combattants aux milices de Da'ech. Près de 1.500 hommes (et quelques femmes) pour les Marocains, 3.000 pour les Tunisiens sans compter les binationaux originaires de France ou de Belgique. 15.000 étrangers au total combattent dans les rangs de Da'ech selon des estimations récentes du professeur et expert Peter Neumann du King’s College londonien.

Mardi au CSIS à Washington,  Rodriguez n’a pas été plus loin dans ses révélations. Cependant, depuis quelques jours, des informations récurrentes font état de préparatifs américains, égyptiens et émiratis pour mener une offensive militaire en Libye.

Une intervention des Etats-Unis et de leurs alliés plus musclée en Libye a été discutée à Ryadh notamment cette semaine. Début janvier 2015, Paris a inauguré une base militaire située en territoire nigérien au sud de la frontière libyenne. Le porte-avion nucléaire Charles-de-Gaulle croise actuellement en Méditerranée orientale à proximité des côtes libyennes et syriennes.

Au lendemain d’une réunion des ministres arabes des Affaires étrangères au Caire le 15 janvier dernier, la Libye avait demandé à Rabat «un soutien militaire et sécuritaire», notamment en matière de formation. Les forces armées et les services spéciaux sont concernés. 20.000 militaires libyens devraient être formés par les FAR en 2015 et en 2016.

C’est la deuxième fois en moins d’une année que Tripoli fournit une telle demande. Le Maroc reconnait le gouvernement présidé par Abdallah al-Thani. Comme pour l’Irak, la Syrie et Da'ech, Washington souhaite une plus importante contribution des pays arabes à la stabilisation et à la sécurité dans la région.

Outre la Libye, le Maroc est actuellement sollicité sur le théâtre syrien, aux Emirats Arabes unis et en Arabie Saoudite.

Les experts maghrébins aussi inquiets que David Rodriguez

La menace du terrorisme a atteint un niveau sans précédent au Maghreb, et si aucune mesure immédiate n'est prise, la situation ne fera qu'empirer, a indiqué Bassel Torjman, spécialiste des affaires du Maghreb et des mouvements islamiques au site d’information Magharebia cette semaine. Financé par Washington, Magharebia se spécialise dans l’information politique, sécuritaire et diplomatique en Afrique du Nord.

La Libye est "devenue une destination pour les jihadistes de diverses nationalités". Le projet de Da'ech "est basé sur l'expansion et la suppression des frontières", et al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi) et Da'ech sont engagés dans une rivalité féroce. Tout cela vient encore accentuer l'urgence de la crise", indique Torjman.

"Cette menace et les enjeux sont extraordinaires", ajoute-t-il, soulignant que la solution passe par "la coopération régionale entre les agences de sécurité et de renseignement".

Vous avez un projet immobilier en vue ? Yakeey & Médias24 vous aident à le concrétiser!

Si vous voulez que l'information se rapproche de vous

Suivez la chaîne Médias24 sur WhatsApp
© Médias24. Toute reproduction interdite, sous quelque forme que ce soit, sauf autorisation écrite de la Société des Nouveaux Médias. Ce contenu est protégé par la loi et notamment loi 88-13 relative à la presse et l’édition ainsi que les lois 66.19 et 2-00 relatives aux droits d’auteur et droits voisins.

Médias24 est un journal économique marocain en ligne qui fournit des informations orientées business, marchés, data et analyses économiques. Retrouvez en direct et en temps réel, en photos et en vidéos, toute l’actualité économique, politique, sociale, et culturelle au Maroc avec Médias24

Notre journal s’engage à vous livrer une information précise, originale et sans parti-pris vis à vis des opérateurs.

L'an 19 de l'INDH: programme spécial à Casablanca