Sécurité, expropriations, Tanger au défi de son développement

Ce mercredi 7 mai, des habitants de Bir Chifa Béni Makada manifestaient contre l’insécurité dans leur quartier devant le bureau du Médiateur, tandis qu’à Aouama des dizaines de familles contestant les modalités d’expropriation proposées, manifestaient sous le regard des forces de l’ordre.  

Sécurité, expropriations, Tanger au défi de son développement

Le 7 mai 2014 à 16h54

Modifié 11 avril 2021 à 2h35

Ce mercredi 7 mai, des habitants de Bir Chifa Béni Makada manifestaient contre l’insécurité dans leur quartier devant le bureau du Médiateur, tandis qu’à Aouama des dizaines de familles contestant les modalités d’expropriation proposées, manifestaient sous le regard des forces de l’ordre.  

Après une première pétition et une plainte adressée au procureur du Roi par un groupe d’habitants de Bir Chifa en octobre 2013, une trentaine de représentants du quartier Kouadess (Canalisations) se sont donné rendez-vous devant le bureau du Médiateur au quartier de Parc Brooks près du siège de la région.

Pères et mères de famille, jeunes du quartier avaient certes oublié de déposer avant de venir là une demande d’autorisation de manifester, et ils ne pourront d’ailleurs pas ce mercredi matin déployer leurs banderoles, mais quelques journalistes étaient présents ainsi que le commissaire du quartier et d’autres responsables de la police.

Des riverains en colère

Le groupe voulait protester contre la présence dans leur quartier depuis plusieurs années d’un local qui vend de «l’alcool sans autorisation, de la drogue tandis qu’une petite affaire de prostitution a même été développé dans la zone», rapporte Mehdi, un des interlocuteurs de la police et de la presse. «Nous avons l’impression d’être en Colombie parfois et de ne pas être concernés par les campagnes de lutte contre la criminalité» ajoute-t-il. Bir Chifa est l’un des quartiers résidentiels importants de l’arrondissement de Béni Makada qui abrite une population estimée à 250.000 habitants.

Les habitants du quartier se plaignent aussi de bouteilles brisées qu’ils trouvent dans leurs rues au petit matin, du tapage nocturne et de la valeur de leurs maisons qui baisse. «Des gens qui viennent louer dans le quartier, repartent après 15 jours sans demander leur reste pour le loyer qu’ils ont déjà payé» me rapporte un jeune homme barbu qui a l’air de fermement tenir à ce que «les choses changent dans son quartier et que  les autorités fassent leur travail».

Cependant, les habitants qui ont signé des pétitions, pris les services d’un avocat et écrit plusieurs fois aux autorités ne voient aucune amélioration. «Après la tombée de la nuit raconte l’un, il est impossible pour un enfant ou un adulte de sortir. On peut croiser des hommes saouls et des dealers agressifs. Parfois des disputes éclatent notamment entre le marchand d’alcool et desclients mauvais payeurs  ou qui ont trop bu. Le quartier est devenu invivable».

Selon plusieurs habitants, les vols dans les voitures sont nombreux également et la police peu présente. Quant au marchand d’alcool, une plainte a été déposée par les douanes et l’homme condamné à 6 mois ferme et à une amende de 3 MDH. «Mais il a été relâché au bout de 4 mois,» indique un habitant tout en se demandant ce que le paiement de l’amende est devenu.

Confrontée à une croissance démographique et urbaine importante, la ville de Tanger peine dans la conduite de sa politique de sécurité, et les malfrats et leurs complices, au courant du fait, mettent à profit les failles.

Des commerces illégaux, des locaux pour la chicha en plein centre-ville, des pétards que l’on vend au détail comme de simples cigarettes en plein centre-ville et des braquages armés de fourgon et des braqueurs dans la nature depuis février dernier avec plusieurs millions de dirhams dans leurs valises…

Le ministre de l’Intérieur Mohamed Hassad expliquait encore mardi au parlement à Rabat que «le crime régresse» sur la foi unique des statistiques de son département, mais cela ne sera pas suffisant pour convaincre une opinion publique marocaine chaque jour plus exigeante. M. Hassad sait bien que sur le terrain, c’est la perception qui compte.

Le défi de la sécurité à Tanger est réel puisque depuis le seul début de cette année, non seulement la police a été défiée sur le terrain pour entrer dans certains quartiers ou interpeller certains délinquants, mais le Roi Mohammed VI s’est personnellement déplacé dans certains quartiers en mars dernier pour voir de quoi il en relevait.

Loin des polémiques politiciennes et électorales, le défi sécuritaire est une réalité normale pour une ville et un pays en mutation. Le défi est de prévenir et le risque serait de ne rien faire qui puisse enrayer des formes de corruption qui peuvent s’installer entre ceux qui sèment le désordre et l’insécurité et ceux qui doivent veiller à l’ordre et à la sécurité. Les services de sécurité, professionnels, doivent être irréprochables.

Les dernières annonces gouvernementales en matière de réorganisation de certains services de sécurité et les mouvements de mutations et de mises à la retraite anticipées vont dans ce sens, ce qui aussi une manière normale pour Rabat de reconnaître que certaines situations ont actuellement besoin de quelques remèdes forts.

Des expropriations utiles et nécessaires,  mais toujours conflictuelles

Autre défi lié à l’importance économique que prend Tanger, celui des expropriations qui touchent des petits propriétaires concernés par le tracé de la LGV.

120 familles qui possèdent des maisons et 600 autres qui possèdent des terrains à Aouama-Est, entre Moghogha et la préfecture de Fahs-Anjra sont concernées par un dossier qui s’envenime depuis l’an dernier.

Après les sit-in devant la wilaya, les pétitions et les contacts non aboutis avec les autorités, aucun progrès n’est à noter sur le terrain: depuis quelques jours, les propriétaires occupent physiquement leurs terres qui se trouvent sur le dernier tronçon du tracé de la LGV avant l’arrivée en gare de Tanger et les forces de l’ordre sont présentes sur le site depuis ce matin. Depuis deux ans, aucun accord global n’a pu être trouvé sur l’indemnisation des propriétaires.

 Sur ce dernier tronçon de près de 9 km, seules quelques centaines de mètres ont pu être terrassées par l’entreprise des travaux publics en charge. Un conflit de même nature en 2013 au niveau de Hjar Nhel au sud de Tanger avait provoqué de tels retards du chantier qu’il avait par ricochet envenimé les relations entre l’ONCF et l’entreprise turque en charge qui avait fini par partir. Le mois dernier,le directeur général de l’ONCF Rabie Khlie a annoncé que l’exploitation commerciale du TGV se ferait «en 2016». Ce n’est pas un hasard du calendrier.

Sur ce dossier des expropriations, notre pays ne semble retenir aucune leçon des expériences passées. Les différents statuts fonciers, une administration parfois brutale, l’analphabétisme dans les campagnes –mais le bon sens aussi- et la corruption n’arrangent en rien les choses. Le foncier est une plaie pour le projet du TGV aujourd’hui comme il l’a été pour l’industrie, le projet Tanger-Med,  ou d’autres projets pendant des années. Notre pays doit savoir plus clairement ce qu’il veut et le mettre en œuvre. Dans le cadre de l’Etat de droit. En matière de sécurité comme en matière d’expropriations.


 

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