Le dirham devrait rester stable ou tendre vers une appréciation en 2021

M. Ett. | Le 15/1/2021 à 15:54

La valeur du dirham devrait se stabiliser ou connaitre une légère appréciation en 2021, anticipe Omar Bakkou, économiste et spécialiste en politique de change, joint par LeBoursier.

En 2020, le dirham a connu une légère dépréciation face à l’euro et au dollar, jugée « saine ». Pour 2021, la valeur de la monnaie nationale devrait se stabiliser ou connaître une légère appréciation, prévoit Omar Bakkou, économiste et spécialiste en politique de change.

Notre interlocuteur fonde cette anticipation, en grande partie, sur l’évolution future de ces facteurs : le panier EUR/USD, les prix du pétrole, les importations et la stratégie de l’endettement de l’Etat.

Poursuite de la dépréciation du dollar face à l’euro

L’évolution du dirham face à l’euro et au dollar dépend tout d’abord de l’évolution du panier EUR/USD, puisque sa valeur est liée à un panier constitué à hauteur de 60% en euros et à 40% en dollars. La hausse ou la baisse du panier EUR/USD impacte directement la valeur du dirham.

« En principe, l’évolution de la parité EUR/USD dépendra de la réaction des marchés financiers à ce qui se passe aux Etats-Unis, notamment suite à l’élection du nouveau président, Joe Biden. Cela devrait influencer le dirham, du moins sur le court terme, surtout au premier trimestre », explique notre interlocuteur.

Par la suite, l’évolution du panier EUR/USD sera influencée par « la situation de l’économie américaine. Ce qui reste un peu difficile à prévoir. Mais, on sait qu’il s’agit d’une économie en déficit. Et que plusieurs mesures de protectionnisme ont été mises en place par l’ancien président. Les difficultés de cette économie se poursuivraient probablement au cours de l’année 2021, parce qu’il est très difficile pour un nouveau président de renverser la tendance rapidement », continue-t-il.

Dans ce contexte, « on suppose que la dépréciation du dollar face à l’euro va continuer. Dans ce cas, automatiquement, et tenant compte d’un effet panier, la monnaie nationale connaîtra une appréciation face au dollar et une dépréciation par rapport à l’euro ».

L’effet offre/demande

Pour anticiper l’effet offre/demande sur l’évolution de la monnaie nationale, il faut prendre en compte un facteur essentiel : les prix du pétrole.

Les prix du pétrole ont connu une forte chute vers la mi-avril de l'année 2020, et maintenant ils sont en stagnation, d’après notre interlocuteur. « A mon avis, cette stagnation des prix va durer encore. Parce que les prix du pétrole dépendent de l’économie mondiale. Plus l’économie mondiale se porte bien, plus les prix du pétrole grimpent. C’est un facteur essentiel. Dans le contexte actuel, il ne semble pas que l’économie mondiale pourrait se redresser rapidement cette année, à cause du choc du Covid. Ce qui laisse présager que les prix du pétrole vont continuer à stagner. Et même s’il y aurait une augmentation, elle ne pourra être que légère », anticipe l’économiste.

Ainsi, avec une poursuite de la stagnation des prix du pétrole, « l’impact ne peut qu’être positif pour le Maroc du côté de l’offre et la demande des devises. Nos dépenses en devises en matière de produits énergétique ne vont pas augmenter », prévoit-t-il.

S’ajoute à cela un autre facteur jouant en faveur de l’économie marocaine. Il s’agit de ‘’l’impact pluie’’. « Avec l’abondance des pluies qu’on a connu au cours de ces dernières semaines, une bonne année agricole s’annonce. On va donc importer moins de produits agricoles. A noter que les importations dépendent généralement de l’année précédente, mais ce qui est sûr c’est que tout ce qui est produits courants, notamment les fruits et légumes, connaitront moins d’importations cette année. Cela impactera positivement la balance des paiements du pays », estime notre interlocuteur.

>>> Lire aussi : Les dernières pluies ont résorbé le déficit du début de la campagne agricole

La stratégie de l’endettement de l’Etat influencera également la demande des devises. « En principe, l’Etat a maintenant des flux de remboursement de la dette extérieure. Il pourrait neutraliser ces flux à travers un endettement extérieur avec des proportions égales aux remboursements à effectuer. Ce qui fait que la balance des devises de l’Etat pourrait devenir nulle. Dans ce cas, on pourra considérer que cela n’aurait aucun impact sur les recettes et les dépenses, et, ainsi, il n’y aura pas d’impact sur le marché de change », ajoute-t-il.

D’autres éléments sont à prendre en considération. « Il faut voir l’évolution des transferts des MRE, des IDE et des exportations. On peut supposer qu’il y aura une neutralisation au niveau de la balance commerciale, c’est-à-dire, les importations vont évoluer en suivant des proportions à peu près égales à celles des exportations. Peut-être les transferts des MRE vont se stabiliser. Et on connaitra probablement une reprise des IDE ». 

A rappeler que Bank Al-Maghrib a prévu, à l'issue de son dernier conseil de politique monétaire de l'année 2020, un raffermissement des transferts des MRE qui devraient totaliser 70 milliards de DH en 2021 contre 65,8 milliards de DH en 2020. Pour leur part, les entrées d’IDE devraient reprendre leur dynamisme pour atteindre un volume correspondant à 3,1% du PIB.

De leur côté, les avoirs officiels de réserve se sont situés autour de 320,9 milliards de DH à fin 2020 et devraient évoluer en oscillant autour de 322 milliards au cours des deux prochaines années, assurant une couverture d’un peu plus de 7 mois d’importations de biens et services, d’après les prévisions de BAM.

Donc, globalement, « l’impact de l’ensemble de ces prévisions sur le marché des changes se traduirait par une stabilisation ou une tendance à l’appréciation du taux de change. C’est l’évolution des IDE et de la stratégie d’endettement de l’Etat qui fera la différence », anticipe notre économiste.

La Banque centrale, elle, prévoit une dépréciation de 1,2% du taux de change effectif réel en 2021.

S’agissant de la position de change des banques, elle reste pour le moment confortable dépassant 6 milliards de DH de ces dernières semaines. Elle s’est fixée à 6,12 milliards de DH le 13 janvier, d’après les données diffusées par BAM.

Peut-on s’attendre à un nouvel élargissement de la bande de fluctuation du dirham en 2021 ?

Après un deuxième élargissement en mars 2020, Omar Bakkou pense que « fort probablement, il n’y aura pas un nouvel assouplissement de la bande de fluctuation cette année. Si les autorités monétaires du pays décident de le faire, ça serait un petit élargissement ».

Pour le moment, un élargissement additionnel pourrait « causer une forte dépréciation du dirham ». Dans cette situation, « il faudrait faire un arbitrage entre deux éléments : les éventuels effets négatifs d’une dépréciation de la monnaie sur le pouvoir d’achat, et les impacts positifs sur les avoirs de réserve », explique-t-il.

>>> Lire aussi : Faut-il provoquer une dépréciation du dirham pour contrer les effets de la crise ?

A rappeler que le FMI a déclaré, lors d’un point de presse, tenu le mardi 5 janvier, que le contexte est favorable pour que le Maroc opère un assouplissement supplémentaire du taux de change. Cet avis n’a, toutefois, pas été partagé par les autorités monétaires marocaines qui estiment que "les gains découlant d'un taux de change plus flexible pourraient être limités à ce stade, car la pandémie a également touché les principaux partenaires commerciaux du Maroc".

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