Réserves en devises: le Maroc n'envisage pas de restrictions sur les opérations de change
Les réserves en devises restent en position confortable à fin mars 2020. Cette situation devrait changer sensiblement au cours des prochains mois. Dans ce cadre, et en anticipant une éventuelle pression sur les réserves en devises, le Maroc a procédé à un tirage sur la Ligne de Précaution et de liquidité.
Au 27 mars 2020, les réserves internationales de la Banque centrale restent à un niveau confortable. Mais le plus dur de la crise est à venir.
La crise en question est un choc exogène extrêmement violent sur la balance des paiements et qui risque de se prolonger dans la durée. On n'a pas vu dans l'économie internationale un choc aussi violent depuis la Grande Dépression.
Pour ce qui concerne le Maroc, il y a deux aspects: la dimension économique et sociale et interne et dans ce domaine, les leviers sont nombreux et ils n'ont aps tous été épuisés.
Par contre pour la balance des paiements, le Maroc n'a pas le choix. Il doit disposer de réserves suffisantes pour pouvoir face face à ses besoins et importations indispensables telles que l'énergie ou les intrants.
Les flux entrants de devises proviennent principalement des recettes touristiques, des transferts MRE, des IDE et des exportations (notamment automobiles, de phosphates, agricoles et textiles). A fin février 2020, voici quelques grandes masses comparées à la même période de l’année précédente, d’après les statistiques de l’Office des changes :
- Les recettes voyages (+11,5% à 11,79 MMDH) ;
- Les transferts des MRE (stables à 9,96 MMDH) ;
- Les IDE (-19,5% à 2,21 MMDH) ;
- Les exportations automobiles (+3,4% à 13,91 MMDH).
A fin février 2020, le déficit commercial s’est creusé de 611 millions de DH (+2%) pour se situer à -31,01 milliards de DH contre 30,40 milliards de DH une année auparavant.
A fin mars, le premier impact de la pandémie sur les échanges comemrciaux commencera à devenir visible. Grosso modo, les ventes de phosphates et dérivés continuent et se maintiennent; les ventes automobiles ont baissé, les exportations agricoles se sont bien tenues. Pour ce qui concerne les importations, la forte baisse des prix du pétrole a impacté favorablement la facture marocaine.
Au cours de la deuxième quinzaine de mars, les transferts des RME n'ont subi qu'une petite baisse selon des sources sûres, s'agissant souvent de transferts automatiques. Les recettes voyages se sont bien comportées puisqu'il s'agit de paiements des prestations antérieures à la crise.
Au 27 mars 2020, l’encours des réserves internationales nettes du Maroc se situait à 248,9 milliards de DH, en hausse de 2,9% en comparaison avec la même période de l’année précédente. En mois d’importations des biens et services, les RIN se sont établies à 5 mois et 11 jours à fin février 2020. Sur la base de la nouvelle configuration du commerce extérieur et de la forte baisse de la facture énergétique, elles correspondent désormais à plus de 6 mois d'importation.
En anticipant une éventuelle pression sur les réserves en devises, le Maroc a procédé le 7 avril 2020 à un tirage sur la Ligne de Précaution et de liquidité (LPL) pour un montant équivalent à près de 3 milliards de dollars, remboursable sur une période de 5 ans, avec une période de grâce de 3 ans.
A rappeler que quand la décision d’octroi d’une LPL par le FMI au Maroc avait été approuvée en décembre 2018, cela avait suscité des débats animés lors d’un point de presse organisée par la banque centrale.
Le Wali de Bank Al-Maghrib avait à l’époque expliqué que "la LPL donne droit à un tirage inconditionnel: dans le cas d’un choc exogène, comme par exemple un choc pétrolier qui ferait que le baril de pétrole augmente à 100$, le Maroc pourrait bénéficier des droits de tirages spéciaux sans conditions".
Le tirage sur la LPL n’est pas destiné à renforcer le budget de l’Etat. Comme l’a souligné le ministère des finances « le tirage sur cette ligne de liquidité sera mis à la disposition de Bank Al-Maghrib et affecté essentiellement au financement de la balance des paiements et n’impactera pas la dette publique ». Il sera une sorte de deposit à la Banque centrale.
Avec le tirage de la LPL de 3 milliards de $, les réserves en devises se renforcent d’à peu près 30,70 milliards de DH. Virtuellement, elles se situent aujourd'hui à près de 280 milliards de DH.
Après le maintien de l'Investment grade par S&P, le Maroc se prépare pour une deuxième sortie souveraine sur le marché international, après avoir levé en novembre 2019, un milliard d'euros sur 12 ans. Si le Maroc finalise sa sortie (car cela dépend de l'appétit des investisseurs et des conditions), cela augmenterait d'autant les réserves.
Devant ces perspectives, les autorités marocaines n'envisagent pas pour le moment (contrairement aux rumeurs) d'imposer des restrictions sur l'allocation touristique: celle-ci n'est pas pour le moment utilisée puisque les voyages à l'étranger sont impossibles; et d'autre part, les voyages ne seront pas rétablis à leur rythme d'avant dans les six mois à venir.
Selon nos sources, elles n'envisagent pas non plus de demander aux investisseurs étrangers de différer le transfert de leurs dividendes au titre de 2019. Il est même possible que certains investisseurs et au vu de la conjoncture, préfèrent ne pas effectuer de distribution cette année.
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