Depuis la réouverture de ses frontières, le Maroc ne pouvait espérer une meilleure publicité pour promouvoir son tourisme que la tournée de quatre jours de Orna Barbivay, ministre israélienne de l’Economie, qui s’est conclue par un circuit à Marrakech incluant la visite de souks, de la place Jamaâ El Fna et du musée Dar El Bacha. Un véritable appel d’air qui pourrait se traduire par une forte hausse des arrivées israéliennes d’ici 2025.

Très médiatisée en Israël, cette visite, qui permettra de signer « un accord historique de coopération (…) et de poser les bases économiques des relations commerciales entre les deux pays », devrait en effet inciter de très nombreux Israéliens, parmi les 800.000 d’origine marocaine, à découvrir leur pays d’origine.

Optimiste sur le potentiel touristique de ce marché qui plafonnait entre 50.000 et 70.000 visiteurs avant la crise, une source fiable nous déclare que la multiplication des visites de délégations gouvernementales d’Israël a installé un climat rassurant, qui permettra au Maroc de recevoir un nombre croissant de visiteurs ; nombre qui devrait quadrupler dès la fin de l’année avec trois compagnies aériennes qui opèrent entre les deux pays.

Une capacité en sièges qui passera de 50.000 à 200.000 passagers en un an

"Depuis le 7 février, le trafic entre les deux pays est assuré par les compagnies israéliennes El Al et El Arkia. Elles effectuent au total à peine trois liaisons entre les aéroports de Tel Aviv et de Marrakech, soit une capacité annuelle de 50.000 passagers équivalant à six vols A/R par semaine X 160 sièges X 52 semaines."

"Sachant que le nombre de rotations de ces compagnies va bientôt doubler pour atteindre près de 100.000 passagers/an et que la RAM suivra, dès le 13 mars, en démarrant sa desserte Casablanca-Tel Aviv avec quatre vols hebdomadaires, puis rapidement cinq, on approchera des 200.000 visiteurs à la fin de 2022 », avance notre interlocuteur. Il reste persuadé que ce chiffre sera rapidement dépassé avec l’arrivée, prévue prochainement, de El Isra, qui sera la troisième compagnie israélienne à opérer entre le Maroc et Israël.

« Avec une communauté israélienne d’origine marocaine estimée à 800.000 personnes, ce marché émergent devrait donc croître de manière exponentielle, pour atteindre un pic d’arrivées annuelles dans notre pays de 500.000 visiteurs israéliens dès la fin de l’année 2025 », prévoit notre source. Cette dernière tient à rappeler que les Israéliens, qui sont de grands voyageurs, auront enfin l’occasion de visiter le Maroc.

En effet, la particularité de ce marché émergent réside dans sa diversité, avec des candidats pour tous les segments proposés par le Maroc comme le tourisme familial, religieux, d’affaires, MICE, loisirs…

Des guides parlant hébreu quasiment introuvables au Maroc

Désireux d’en savoir plus sur les préparatifs d’accueil des opérateurs marocains (hôteliers, restaurateurs...), Médias24 a contacté la guide marocaine hébréophone qui a accompagné la ministre israélienne de l’Economie dans la médina de la ville ocre, et dont la vidéo a eu un grand succès sur les réseaux sociaux.

Visiblement ravie de cette visite qui devrait, selon elle, faire décoller le niveau d’arrivées israéliennes, Khalida Hilm a toutefois reconnu que le Maroc ne recelait pas suffisamment de guides parlant l'hébreu.

« Si nous sommes plutôt nombreux à exercer le métier de guide et que la plupart sont polyglottes, je n’en connais aucun qui parle ou écrit l’hébreu, et encore moins avec une accréditation comme c’est mon cas depuis bientôt trente-cinq ans », regrette Hilm.

Selon elle, ce problème ne serait cependant pas insurmontable car plusieurs guides marocains ont d'ores et déjà commencé à apprendre l'hébreu cette année et aussi parce que la majorité des Israéliens d’origine marocaine s'expriment en arabe ou en darija.

"Comme je l’ai glissé à l’oreille de la ministre, il y a lieu de se réjouir de l’ouverture des cieux, mais aussi et surtout de celle des cœurs, qui va permettre de développer une vraie coopération entre nos deux pays."

Multiplier les menus casher pour les nombreux touristes religieux

Sur le degré de préparation des hôteliers marocains pour satisfaire les habitudes alimentaires d’un certain nombre d’Israéliens, notamment pratiquants, qui ne consomment que des produits casher, notre guide estime là encore qu’il n’y a pas de barrières rédhibitoires, mais qu’il faudra s’organiser par la suite.

« Ceux qui sont vraiment religieux rapportent d’Israël leurs couverts et nourritures mais, au pire, il y a plusieurs restaurants casherout à Casablanca, Marrakech... où ils pourront se restaurer sans souci.

"Cela dit, il est vrai que face à l’afflux à venir des touristes israéliens, il va falloir qu'hôteliers et restaurateurs se préparent en amont pour satisfaire leurs exigences religieuses, à l’instar de l’hôtel Mazagan qui avait reçu en 2019 plus de 800 touristes israéliens pour célébrer les fêtes de la Pâques juive (Pessah)", conclut notre interlocutrice, qui table sur un marché qui devrait se développer très rapidement.

Ci-après, la ministre de l’Economie accompagnée de la guide marocaine s’exprimant en hébreu.