Littoral d’Agadir. Le trait de côte reculera de 12 mètres d'ici 2050 (étude)

Le recul moyen du trait de côte à Agadir et Taghazout est estimé à 12 mètres d’ici à 2050, et à 51 mètres à l’horizon 2100. Ces prévisions mettent en garde contre un risque d'érosion menaçant toutes les infrastructures balnéaires, touristiques et urbaines. Le point avec Abdelhaq Aangri, spécialiste en génie côtier et océanographie physique.

Littoral d’Agadir. Le trait de côte reculera de 12 mètres d'ici 2050 (étude)

Le 4 avril 2024 à 16h10

Modifié 5 avril 2024 à 3h15

Le recul moyen du trait de côte à Agadir et Taghazout est estimé à 12 mètres d’ici à 2050, et à 51 mètres à l’horizon 2100. Ces prévisions mettent en garde contre un risque d'érosion menaçant toutes les infrastructures balnéaires, touristiques et urbaines. Le point avec Abdelhaq Aangri, spécialiste en génie côtier et océanographie physique.

Surveiller l’évolution du littoral d’Agadir et de Taghazout est crucial au vu de l’importance socio-économique des ces zones côtières. D’autant qu’avec un recul moyen du trait de côte estimé à 12 m d'ici 2050 et 51 m à l'horizon 2100, le risque potentiel d'érosion menace des dizaines d'infrastructures balnéaires, touristiques et urbaines.

Ces prévisions sont le fruit d’une étude scientifique qui se concentre en particulier sur deux plages sableuses : Taghazout-Imourane (9 km) et Agadir-Anza (12 km). Un travail scientifique "basé sur une approche qui combine les extrapolations à long terme des changements historiques du littoral et l'estimation du recul du littoral dû à l'élévation du niveau de la mer", expliquent les auteurs de l’étude* en question.  

Abdelhaq Aangri en fait partie. Spécialiste en génie côtier et océanographie physique, il indique à Médias24 que ces zones ont été sélectionnées car elles ont connu ces dernières décennies un fort développement économique, notamment en termes d'infrastructures touristiques et commerciales. 

"D'où l'importance de protéger ces côtes contre les risques d'érosion", précise-t-il. Mais avant d’aller plus loin, que signifie un trait de côte ? Pour faire simple, le trait de côte représente la ligne qui marque la limite jusqu'à laquelle peuvent parvenir les eaux marines. Symboliquement, c’est une ligne de démarcation entre la terre et la mer. 

Le phénomène de recul du trait de côte à Agadir.

Or, la largeur de cette frontière se réduit chaque année un peu plus. L'analyse de l'évolution du trait de côte entre 1969 et 2020, montre en effet que le littoral de la zone d'étude s'est érodé à un taux de 0,13 m/an. Au cours de cette période, le littoral a perdu en moyenne 337.656 m2 de terre et en a gagné 216.085 m2.

Si la plage d'Anza s’agrandit de 4,8 m/an, grâce à l'interception par la digue du port de la plus grande partie de la côte, en revanche, le secteur côtier qui a connu le plus de recul est le sud d'Agadir (1,88 m/an), suivi de celui de Taghazout (0,94 m/an) et Imourane (0,14 m/an). Plusieurs raisons à cela. 

Énergie des vagues et surexploitation des eaux souterraines

Le mouvement du littoral d’Agadir et Taghazout est soumis à plusieurs facteurs en interaction, dont les variations du niveau de la mer, les ondes de tempête ou encore l’extraction de sable marin. En outre, la zone d'étude est exposée à des vagues de haute énergie générées par le système de basse pression au-dessus de l'océan Atlantique Nord.

Étonnamment, la surexploitation des ressources en eau souterraine compromet également l'équilibre hydrologique côtier, affectant ainsi la stabilité des côtes. "Cette pression supplémentaire peut aggraver les processus d'érosion et contribuer au recul du trait de côte sur le long terme", affirme Abdelhaq Aangri. 

Agadir. Illustration de l'érosion à quelques mètres des habitations.

Au-delà de l’épuisement des eaux souterraines, qui est malheureusement d’actualité dans le Souss, un autre facteur impacte fortement le trait de côte d’Agadir-Taghazout. À savoir : la dynamique hydro-sédimentaire du littoral.

"Cette dynamique a été considérablement altérée par les aménagements portuaires et touristiques, induisant un régime hydrodynamique complexe et amplifiant les phénomènes d'érosion côtière", avance le spécialiste en génie côtier. Les constructions telles que les ports, brise-lames et épis, couplées à l'intensification des vagues, "ont notablement dénaturé l'évolution naturelle de cette zone, entraînant la quasi-éradication de son massif dunaire", déplore-t-il.

Intégrer des principes de conception résiliente

Dans l’idéal, il n’est pas question d’interdire tout projet d’infrastructures côtières sur le littoral d’Agadir, mais plutôt de prendre en considération la dimension de résistance au recul des lignes des côtes. À ce titre, il sera essentiel d’intégrer des principes de conception résiliente. Ces principes prennent différentes formes, "tels que l'élévation des structures, l'utilisation de matériaux durables et la prise en compte des projections de l'élévation du niveau de la mer dans la conception et la planification", propose Abdelhaq Aangri.  

"Une surveillance régulière et une maintenance adéquate des infrastructures existantes sont également à promouvoir pour assurer leur efficacité à long terme face aux changements du littoral", ajoute-t-il. Il s’agira aussi d’atténuer les effets du recul des lignes de côtes, notamment à travers l’utilisation des techniques de génie écologique. 

"Ces techniques doivent servir de base dans la construction des structures naturelles telles que des brise-lames vivants, des récifs artificiels et des barrières de plage en bois flottant pour réduire l'impact des vagues sur les côtes", souligne notre interlocuteur. Et ce n’est pas tout. 

La protection des infrastructures naturelles est elle aussi un élément décisif à prendre en considération. En ce sens, protéger les récifs coralliens et les prairies d'herbiers marins doit être considérée comme une priorité car "ils fournissent une protection naturelle contre l'érosion côtière en amortissant les vagues et en stabilisant les fonds marins", assure Abdelhaq Aangri. 

Enfin, la promotion de la gestion intégrée du littoral doit elle aussi être de mise, via "l’application de plans de gestion intégrée du littoral qui prennent en compte les besoins écologiques, sociaux et économiques des communautés côtières, en favorisant une approche collaborative et participative", conclut notre interlocuteur.

Image satellitaire d’une zone d’habitation à une distance zéro de la ligne de haute marée dans la plage de Zenata (2019).

Destruction par la mer d’habitations dans la plage de Tamaris entre 2016 et 2019.

Recul de la ligne de côte entre 2012 et 2023 à Mohammédia.

Recul de la ligne de côte entre 2004 et 2023 à Saïdia.

(*) Prévision de l'évolution du trait de côte sur les côtes d'Agadir et de Taghazout. Etude réalisée dans le cadre d'une thèse doctorale au sein de la Faculté des sciences Kenitra, avec la collaboration de l'Institut scientifique de Rabat. 

  • Abdelhaq Aangri ; 
  • Mounir Hakkou ; 
  • Yann Krien ; 
  • Aïcha Benmohammadi. 
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