Quelles implications aura l’intelligence artificielle dans le monde professionnel ? (2 expertes marocaines)

Au Maroc comme ailleurs, les avancées dans le monde de l’intelligence artificielle sont sources autant d’espoir que de craintes. A quels changements devons-nous nous attendre ? Les emplois sont-ils menacés ? Où en sommes-nous au Maroc ? Deux expertes marocaines, sollicitées par Médias24, y répondent.

Quelles implications aura l’intelligence artificielle dans le monde professionnel ? (2 expertes marocaines)

Le 31 décembre 2022 à 8h54

Modifié 31 décembre 2022 à 8h54

Au Maroc comme ailleurs, les avancées dans le monde de l’intelligence artificielle sont sources autant d’espoir que de craintes. A quels changements devons-nous nous attendre ? Les emplois sont-ils menacés ? Où en sommes-nous au Maroc ? Deux expertes marocaines, sollicitées par Médias24, y répondent.

ChatGPT, le phénomène qui captive l’attention dans le monde du Web, jette piur le grand public la lumière sur les importantes avancées de l’intelligence artificielle. Un développement qui promet de bouleverser le monde professionnel, avec la destruction d’emplois, certes, mais aussi la création de beaucoup d’autres.

"Tous les métiers peuvent être soutenus par l’intelligence artificielle, mais dans une optique louable, en leur apportant plus d’efficience et d’efficacité", estime Maha Gmira, professeure d’intelligence artificielle à l’Université Euromed de Fès, contactée par Médias24.

D’après elle, certains métiers vont être complètement remplacés par l’intelligence artificielle (IA), mais beaucoup d’autres, notamment ceux qui nécessitent de la créativité et de la réflexion humaine, vont continuer à exister en se faisant assister par l’IA.

"Quand on recrute dans la plupart des métiers, on exige un certain nombre d’années d’expérience, selon le niveau de responsabilité demandé. Disons que l’IA remplace l’expérience. Un juge assisté de l’IA peut retrouver une jurisprudence dans plusieurs livres à la fois en quelques secondes", explique Maha Gmira.

"Ce genre de modèles d’IA peut aider l’ensemble des professions, qui ont besoin de trouver des solutions et d’être assistées, sur une problématique bien précise. A long terme, cela aura une incidence sur le marché du travail, mais grâce à l’efficacité que cela va apporter, ce sera plutôt en faveur de l’humanité, et pas en sa défaveur", ajoute-t-elle.

Pas de crainte sur l’avenir de l’humanité

En théorie, il y trois niveaux d’IA : la faible, la forte et la super. Notre experte en intelligence artificielle nous explique que l’IA faible est celle que nous vivons actuellement, avec des modèles capables de concurrencer l’humain, mais l’intelligence humaine demeure plus forte. Même si la machine est beaucoup plus rapide en termes de traitement des données, il lui manque la créativité et l’intelligence émotionnelle.

L’IA forte est censée avoir les mêmes capacités que l’homme, alors que l’IA super est beaucoup plus intelligente. Elle est émotionnelle et créative. En tant que chercheur, Maha Gmira pense qu’il n’y pas de preuve, à ce jour, que cette super IA puisse exister. "Scientifiquement, c’est très compliqué", reconnaît-elle. Les craintes sur l’humanité restent donc, selon elles, infondées.

L’IA devrait créer plus d’emplois qu’elle n’en détruira, mais il faudra s’y préparer

Selon les estimations du World Economic Forum, l’IA va détruire 75 millions de postes d’emploi mais va en créer 113 millions. Il recommande de s’y préparer en aidant à la reconversion des personnes les plus susceptibles de perdre leur emploi.

Amal El Fallah Seghrouchni, professeure à l’Université de la Sorbonne et présidente de AI Movement à l’Université Mohammed VI Polytechnique, est du même avis : "Plusieurs métiers vont profiter de ces outils, mais certains vont disparaître et d’autres types d’emplois vont être créés."

Elle cite le cas du Data Act et de l’AI Act, deux nouvelles réglementations européennes qui ont donné lieu à de nouveaux métiers, qui consistent par exemple à auditer les algorithmes, à vérifier s’ils ne sont pas nocifs, qu’il n’y a pas de biais, etc.

"Après la sortie du règlement général de la protection des données (RGPD) en Europe, un nouveau poste est apparu : le DPO, pour data protection officer. En Europe aussi, dans toutes les entreprises qui se respectent, vous trouverez quelqu’un qui est responsable de l’intégrité éthique des développements en IA. C’est un nouveau poste qui n’existait pas il y a dix ans", ajoute Amal El Fallah Seghrouchni.

Mais elle insiste sur la nécessaire vigilance quant au fait que les métiers qui vont apparaître n’ont rien à voir avec ceux qui vont disparaître. "Ce ne sont pas les mêmes qualifications. Il faut accompagner la transformation par la formation et la mise à jour des compétences. Plus ça avance, plus ça devient exigeant. Il faut s’y préparer", souligne-t-elle.

Où en sommes-nous au Maroc ?

Forte d’une expérience de 16 ans en Amérique, Maha Gmira est rentrée au Maroc avec l’objectif de développer l’IA dans son pays. Aujourd’hui à l’Ecole de l’ingénierie digitale et d’intelligence artificielle de l’Université Euromed de Fès, elle participe à la recherche, mais aussi à la formation d’une nouvelle génération de compétences marocaines dans le domaine de l’IA.

"Je pense que l’effort existe ; la volonté publique et privée aussi. Il y a des masters dans plusieurs universités publiques également, avec une orientation data science et intelligence artificielle", ajoute-t-elle.

"Il y a une grande demande au niveau des développeurs. Plusieurs ingénieurs décident de partir à l’étranger, mais je reste optimiste vu l’effervescence qu’il y a autour de ce domaine. Il faut quelques années, avec le soutien financier et la coopération publique-privée qui existe. On peut espérer l’émergence d’un écosystème de l’intelligence artificielle au Maroc", déclare-t-elle, précisant qu’il y a déjà sur le marché des outils IA made in Morocco.

AI Movement est un centre de recherche et de développement porté par l’UM6P. Sous la direction d’Amal El Fallah Seghrouchni, un travail de recherche et d’innovation y est mené dans plusieurs domaines. Par exemple, le centre travaille sur le traitement du dialecte marocain, le darija, afin de l’utiliser dans des chatbots ou pour assister vocalement les personnes qui ne savent lire et écrire.

Parmi les industriels marocains les plus avancés en intelligence artificielle, il y a l’OCP. "Ce n’est pas un hasard, vu les liens avec l’UM6P", précise Amal El Fallah Seghrouchni. L’OCP travaille en coopération avec AI Movement sur des projets qui vont de l’utilisation des drones à la gestion de la supply chain, en passant par la patrouille, ainsi que la maintenance prédictive et proactive.

Comme Maha Gmira, elle est optimiste quant à l’avenir de l’lA au Maroc. Au-delà de la recherche qui connaît un grand développement, notamment dans les milieux universitaires, elle précise que les entreprises privées commencent à investir dans ce domaine, notamment dans la banque et de l’assurance.

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