Bank Al-Maghrib devrait garder inchangé le taux directeur en mars (CDG Capital)

M. Ett. | Le 12/3/2021 à 18:16

Le taux directeur ne devrait pas connaitre une nouvelle baisse lors du prochain Conseil de Bank Al-Maghrib, d’après les anticipations d'Ahmed Zhani, économiste en recherche macroéconomique et taux à CDG Capital, joint par LeBoursier. Il justifie ce statu quo attendu par une transmission des précédentes baisses du taux à l’économie réelle qui n’est toujours pas complète et donne les causes de ce retard. 

A l’approche du 1er Conseil de Bank Al-Maghrib en 2021, prévu le 23 mars, la question de l’évolution du taux directeur se pose. Joint par LeBoursier, Ahmed Zhani, économiste en recherche macroéconomique et taux à CDG Capital, table sur un statu quo.

CDG Capital Insight prévoit en effet, dans son dernier document intitulé « Les finances publiques à l’épreuve de la crise Civid-19 », un cadre monétaire stable en 2021.

« Les deux baisses du taux effectuées en 2020 n’ont toujours pas généré une transmission complète vers l’économie, surtout la dernière baisse de 50 pbs. La dernière enquête sur les taux débiteurs publiée par Bank Al-Maghrib relative au T4 2020 a même recensé une hausse du taux débiteur moyen global », explique Ahmed Zhani.

Rappelons que la Banque centrale a baissé à deux reprises le taux directeur en 2020, afin de contrer les effets de la crise du Covid-19. Le taux a été réduit de 25 points de base, mardi 17 mars, à 2%. La deuxième baisse a eu lieu mardi 16 juin. Le Conseil de BAM avait décidé de réduire de 50 points de base le taux directeur qui est passé à 1,5%.

La transmission de la baisse du taux qui n’est toujours pas complète se justifie par le fait que « les banques attendent à ce que le coût des ressources s'allège pour pouvoir répliquer cette baisse sur les taux débiteurs. C’est le même scénario qu’on a vécu en 2014 quand il y avait de multiples baisses du taux directeur ; la baisse n’a été effectivement ressentie au niveau des taux débiteurs qu’en 2016. En effet, comme souligné au niveau d’une étude de Bank Al-Maghrib, la transmission des décisions de la banque centrale peut prendre en moyenne 6 trimestres », indique notre interlocuteur.

Et d’expliquer : « Quand il y a une baisse du taux directeur, la transmission vers les taux créditeurs, c’est-à-dire les taux des DAT, des comptes sur carnet et des bons de souscription, est quasi-automatique. Mais il faut attendre que le coût des ressources sur le bilan des banques soit réel et qu’il soit ajusté à la baisse, parce que les banques disposent de ressources déposés à des niveaux plus élevés, c’est ce qui explique le retard dans la transmission de la baisse du taux directeur vers le consommateur final qui est le client de la banque. Les banques ne peuvent pas commencer à distribuer des crédits à des niveaux de taux bas en sachant qu’elles ont des ressources inscrites à des niveaux plus hauts sinon il y aura une érosion de la marge d’intermédiation des banques ».

Notre interlocuteur rappelle que le Wali de Bank Al-Maghrib s’est engagé, à l'occasion de la dernière baisse du taux directeur en juin, à ce que la transmission soit totale. « Mais, réellement, nous n’avons toujours pas atteint ce niveau-là ».

Un autre obstacle entre en jeu : Les crédits n’ont pas vraiment repris. « Les crédits à fin janvier 2021 ont évolué de 4,1% contre 5,1% à fin janvier 2020. Même avec la baisse du taux directeur qui s’est partiellement répliquée sur les taux débiteurs, on n’a pas eu l’impact escompté sur les crédits. Et il y a plusieurs catégories de crédits dont le rythme a baissé en glissement annuel. A titre d’exemple, pour les crédits à la consommation, l’évolution de l’encours est passée de +4,1% à fin janvier 2020 à -3,6% pendant la même période cette année. Idem pour les crédits à l’équipement, dont l’évolution de l’encours est passée de +5,7% à -2,7%. Cela est totalement logique parce que la demande est en train de subir l’effet de la crise avec la hausse du chômage, le ralentissement de l’activité économique, etc. », observe notre source.

C’est pour dire que « même si BAM baisse encore une fois le taux directeur, il y aura toujours un problème de la demande. Donc, il faut attendre que la baisse précédente du taux soit transmise d’abord à l’économie réelle, et d’un autre côté, il faudra attendre à ce que le cadre macroéconomique se redresse pour avoir une demande de crédits », explique notre interlocuteur en insistant sur le fait que « ce n’est pas vraiment le coût du financement qui bloque la distribution des crédits, c’est plutôt le cadre macroéconomique qui n’est pas assez confortable et solide et qui ne permet pas d’avoir une visibilité, aussi bien pour la consommation que pour l’investissement. Le blocage se trouve donc au niveau de la demande et, également, au niveau des banques qui voient leurs créances en souffrances augmenter ».

Une nouvelle baisse du taux directeur pourrait se faire au cours de cette année

L’hypothèse d’une nouvelle baisse du taux directeur au cours de ce mois de mars semble écartée. Mais, elle reste probable pour les prochains trimestres de cette année.

A rappeler que l'équipe des services du FMI affectés au Maroc avait estimait, lors d’un point de presse tenu le 5 janvier dernier, que Bank Al Maghrib peut baisser davantage le taux directeur, en expliquant : « On a échangé sur les perspectives de la politique monétaire avec Bank Al Maghrib et nous estimons qu'il reste des marges de manœuvre pour couper davantage le taux directeur si cela s'avère nécessaire (…) le taux d'inflation est faible et le restera à moyen terme selon les projections. En fonction de l'évolution de la situation économique, il pourrait être nécessaire de baisser à nouveau le taux directeur.

Rappelons également qu’Attijari Global Research (AGR) avait prévu, dans un point d’analyse stratégique post conseil de BAM en décembre dernier, qu’en décidant de maintenir le taux directeur, BAM « s’octroie une marge de manœuvre confortable pour entamer 2021, une année qui n’offre pas une visibilité claire sur le plan sanitaire ». Ainsi, avec une faible pression inflationniste (0,7%) et une incertitude quant à l’évolution de la crise sanitaire, AGR avait estimait que BAM pourrait se réserver la possibilité d’abaisser son taux directeur en 2021.

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