Covid-19 : l’Afrique fera face à une crise économique sans précédent à cause de la faiblesse des filets sociaux (Etude)

| Le 4/4/2020 à 14:29

Selon une étude réalisée par Finactu, la rapidité avec laquelle la plupart des autorités du continent africain ont réagi face au Covid-19 en limitant les facteurs de contagion pourrait bien permettre à l’Afrique d’éviter une crise sanitaire dramatique ; mais une crise économique est inévitable à cause de la faiblesse des filets de sécurité sociale. 

La crise sanitaire liée à la propagation du Covid-19 va engendré une crise économique et sociale. Les pays du monde entier devront y faire face.

L’Afrique, qui, pour le moment, maîtrise assez bien la propagation du Covid-19 dans la plupart des pays, avec le confinement, devrait inventer son propre modèle de lutte contre le Covid-19, d’après une étude réalisée par Finactu, groupe de conseil spécialisé dans le continent africain, intitulée « Le Coronavirus et l’Afrique : Crise sanitaire et crise économique aggravées par la faiblesse des filets de sécurité sociale africains ».

« Pour le moment, l’Afrique choisit d’éviter la crise sanitaire. Mais il est probable - hélas ! - que ce choix soit remis en cause rapidement, quand son coût économique se manifestera », souligne l’équipe Finactu.

L’Afrique va souffrir de la mécanique qui frappe actuellement le monde entier, notamment un choc massif sur la demande et sur l’offre à court terme, puis une vague de faillites en chaîne. Cette situation déboucherait in fine sur une "reprise atone et une longue période de croissance molle".

Certes, « la faiblesse des marchés de capitaux sur le continent atténuera en partie l’effet domino que vont connaître les économies occidentales, où la chute sans précédent des bourses va fragiliser très profondément les bilans des institutions financières, mais cette consolation est d’une faible portée », peut-on lire sur le rapport.

Les facteurs économiques aggravant la crise en Afrique 

A la mécanique mondiale enchaînant crise sanitaire et crise économique vont s’ajouter divers facteurs aggravants propres aux économies africaines. Ces facteurs se présentent comme suit :

> Poids des matières premières :

La pandémie du Covid-19 est à l’origine d’une chute historique des cours du pétrole, divisés par 3 depuis décembre 2019 passant de $63 à environ $22. Les pays africains exportateurs de pétrole subissent une double peine (diminution des exportations de pétrole en volume et en valeur), alors même que certains d’entre eux (comme la Guinée Équatoriale) n’enregistrent – officiellement -aucun cas d’infection à date.

> Fragilité des pays dépendants de la Chine :

Avec le ralentissement de l’économie chinoise, ses importations ont reculé. Cela impacte sévèrement les économies africaines ayant développé des liens de partenariat avec la Chine et dont les exportations (vers la Chine) représentent en moyenne 47% des échanges internationaux, à l’image du Soudan du Sud (98%), Angola (50%), et le Congo (46%).

> Absence de plan de soutien :

Les budgets étatiques contraints et le poids de l’informel dans la majorité des pays d’Afrique empêchent ou rendent difficile la mise en œuvre de plan de soutien, social ou économique, que ce soit en termes financiers ou en termes d’identification des entreprises et micro-entrepreneurs.

Les conséquences sur le maintien du pouvoir d’achat des ménages, et sur la capacité des entreprises à être prêtes lors de la reprise, sans oublier l’impact sur les stratégies et efforts de lutte contre la pauvreté et lutte contre la mortalité, restent difficiles à évaluer et appréhender.

L'équipe Finactu trouve que le Maroc a rapidément réagi face au Covid-19 et son impact potentiel sur l'économie du pays en mettant en place un plan de soutien. 

En effet, le Maroc est le premier pays du continent à avoir mis en œuvre une batterie de mesures sociales et économiques fortes accompagnant le confinement obligatoire imposé depuis le 20 mars 2020.

Des mesures en faveur, notamment, des salariés déclarés à la CNSS (indemnité mensuelle de 2.000 DH nette par mois, maintien de l'assurance maladie obligatoire, ect) des PME et TPME (la possibilité de report des échéances des crédits bancaires, attribution de lignes de financement supplémentaires, etc) ont été vite mises en place par le Maroc. 

>>> Lire aussi : Comité de veille économique : Voici les mesures pour aider les salariés et TPME

Un fonds de 10 milliards de DH (1% du PIB de 2018) a été crée sur instruction du Roi Mohamed VI pour faire face à la pandémie du Covid-19. 

Sans tenir compte des dons dont les montants reçus par le Fonds Covid-19 approchent les 23 milliards de DH, au 3 avril 2020.

Les facteurs sociaux aggravant la crise en Afrique

Au-delà des facteurs aggravants sur le plan économique, l’Afrique va sans doute souffrir de la faiblesse de ses filets de sécurité et, plus globalement, de sa faible résilience sociale, à cause des facteurs suivants :

> Surreprésentation du secteur informel :

Le secteur informel ou non-salarié représente 90% de la population active globale, d’après Finactu.

Cette situation crée un risque supplémentaire pour les autorités dans leur stratégie de lutte contre la propagation du Covid-19.

> Absence de mécanisme de résilience sociale :

Les mécanismes de protection sociale en Afrique sont, pour la plupart des pays, limités à la population formelle très minoritaire et à un trio de risques sociaux (accidents du travail, allocations familiales et vieillesse).

Cette situation se traduit par une très faible résilience des sociétés africaines face à une crise comme celle du Covid-19 :

- Plus de 9 retraités sur 10 n’ont aucun revenu de remplacement et vivent dans le même foyer que les jeunes générations, offrant ainsi un risque de contagion mortifère ;

- Aucune assurance chômage, total ou partiel, ne pourra amortir le choc d’une privation d’activité pour les populations actives du continent du fait de l’arrêt de l’activité, traduisant immédiatement le confinement en arrêt net des ressources ;

> Absence d’assurance maladie :

La faiblesse des systèmes de santé en Afrique est la conséquence directe de l’absence de mécanisme d’assurance maladie. Cette absence ne permet pas de répondre à une demande régulière, condition pour que se développe une offre de qualité suffisante en nombre.

> Dépendance alimentaire : 

La dépendance alimentaire du continent (évaluée entre 40% et 44% entre 2017 et 2026 par l’OCDE et le FAO) compromet la sécurité alimentaire africaine à cause du ralentissement de l’économie mondiale et de la fragilité des canaux de distribution africains.

> Absence d’assurance décès :

Dans un continent caractérisé aussi par la faiblesse de ses assurances, les populations ont peu de moyen de faire face au coût des obsèques, très élevé. Les taux de pénétration de l’assurance décès en Afrique sont très faibles. 

Vous avez un projet immobilier en vue ? Yakeey & Médias24 vous aident à le concrétiser!

Si vous voulez que l'information se rapproche de vous

Suivez la chaîne Médias24 sur WhatsApp
© Médias24. Toute reproduction interdite, sous quelque forme que ce soit, sauf autorisation écrite de la Société des Nouveaux Médias. Ce contenu est protégé par la loi et notamment loi 88-13 relative à la presse et l’édition ainsi que les lois 66.19 et 2-00 relatives aux droits d’auteur et droits voisins.
lire aussi
  • | Le 9/5/2024 à 15:35

    OPCVM : les investisseurs prennent plus de risques et passent du monétaire à l’OMLT

    A fin mars, les encours OPCVM monétaires et obligataires court terme reculaient de 5,5% et 12,2% respectivement. Les investisseurs opèrent des rachats pour miser sur l’OMLT, plus risqué. Les exigences des investisseurs baissent du fait d’un déséquilibre offre/demande. Le Trésor est très confortable dans le renouvellement de sa dette.
  • | Le 7/5/2024 à 16:12

    Souss-Massa : pour plus d’export et d’investissement, les industriels sont impatients d’avoir le port sec

    Lors de sa tournée des régions dans le Souss-Massa, Médias24 est allé à la rencontre de plusieurs investisseurs et représentants des entreprises privées pour établir l’état de la situation économique, les enjeux et les ambitions de la région. Le port sec est attendu de pied ferme par les investisseurs privés qui voient en lui une opportunité unique pour la région et son dynamisme.
  • | Le 6/5/2024 à 15:48

    Auto Hall : légère croissance du marché attendue cette année, bonne perspective sur les VUL

    En 2023, le groupe détenait 39,2% de part de marché sur le segment des véhicules utilitaires légers (VUL). Les ventes en volume de ce segment sont en forte hausse à fin avril. Le groupe devrait tirer profit de cette croissance. Le léger recul des taux débiteurs à la consommation au T4-23 et le portefeuille diversifié du groupe devraient lui assurer une bonne résilience. Auto Hall peut aussi compter sur le marché de l’occasion en croissance.
  • | Le 6/5/2024 à 15:04

    Mutandis : chiffre d’affaires stable à fin mars

    Le segment produit de la mer a connu une contre-performance du fait d’une forte baisse des volumes dans un contexte de manque de stock. Les revenus du segment boissons ont en revanche fortement progressé du fait de la bonne performance de l’eau minérale et des jus de fruits. La dette bancaire recule légèrement de 2,45% par rapport à fin décembre 2023.
  • | Le 3/5/2024 à 16:28

    BTP : une bonne tenue du secteur attendue cette année

    Anticipée comme bonne par les professionnels du BTP, l’année 2024 devrait confirmer un bon trend dans les mois à venir. Au premier trimestre déjà, l’encours des crédits bancaires au secteur du BTP bondissait de 16% à 96,6 MMDH. Les ventes de ciment à fin avril, elles, progressaient de 3,5% par rapport à l’année précédente.
  • | Le 3/5/2024 à 9:08

    Forte reprise de la consommation de ciment en avril

    Le mois d’avril a connu un sursaut de consommation de ciment. Depuis le début de l’année, les ventes de ciment ont progressé de 3,5% à 4,1 MT.