La filiale marocaine de Nabil Karoui suspectée par la Justice à Tunis

REPORTAGE (II). Assez connu dans les milieux de la publicité au Maroc. Nabil Karoui avait créé 3 sociétés à Casablanca dont l’une est citée dans une plainte judiciaire pour fraude et évasion fiscale déposée par l’ONG I Watch.

La filiale marocaine de Nabil Karoui suspectée par la Justice à Tunis

Le 24 juillet 2019 à 11h22

Modifié le 11 avril 2021 à 2h43

REPORTAGE (II). Assez connu dans les milieux de la publicité au Maroc. Nabil Karoui avait créé 3 sociétés à Casablanca dont l’une est citée dans une plainte judiciaire pour fraude et évasion fiscale déposée par l’ONG I Watch.

Depuis quelques mois, c’est le feuilleton qui cartonne en Tunisie. Nabil Karoui occupe le devant de l’actualité et il aime ça.

En atterrissant en Tunisie, on croirait que l’actualité serait dominée par la saison estivale, la campagne électorale, la santé du président, les attentats du mois de juin ou les péripéties du match EST-WAC.

Le "futur" président tunisien...

Pas du tout. Le sujet principal qui occulte le reste ou presque, celui qui est sur toutes les lèvres, c’est le cas Nabil Karoui. Car Nabil Karoui est le grand favori des sondages et si l'élection avait lieu aujourd'hui, il deviendrait président de la Tunisie.

Le personnage est arrivé dans les médias par la publicité. Il est entré dans la politique par les médias.

... a créé trois sociétés au Maroc...

Dans les années 90, il a créé l’agence Karoui & Karoui advertising (des deux frères, Nabil et Ghazi). Une partie du microcosme casablancais de la publicité connaît cette société et ce personnage qui a créé la filiale marocaine Karoui & Karoui en 1998. Juridiquement, elle existe toujours.

Nabil Karoui s’est rapproché plus tard du producteur tunisien Tarek Ben Ammar et de l’Italien Silvio Berlusconi, son modèle. Au début des années 2000, en Tunisie, l’octroi des licences de télévision obéit au seul vouloir de Benali. Karoui obtient sa chaîne, Nessma, qu’il lancera en 2007, par la bonne grâce du président déchu.

En 2009, le Bersluconi tunisien crée une troisième société à Casablanca, une SARLAU (sarl à associé unique) au capital de 100.000 DH, détenue à 100% par sa holding luxembourgeoise, Nessma S.A. Cette filiale marocaine s’appelle Nessma adverstising. Elle est censée être la régie publicitaire de Nessma tv au Maroc, cette chaîne ayant une vocation maghrébine.

Le CA qu’elle réalise au Maroc culmine à 6,2 MDH en 2011 avant de baisser inexorablement jusqu’à 636.000 DH en 2017. Les pertes sont au rendez-vous chaque année. A fin 2017, les pertes cumulées dépassent 5,7 MDH.

Entretemps, en 2012, le capital social passera de 100.000 DH à 3,6 MDH par “incorporation de dettes certaines et exigibles de l’associé unique Nessma SA“.

C’est que la holding a prêté 3,5 MDH à sa filiale marocaine. Selon l’ONG I Watch, il s’agit d’un prêt à 5%, une procédure selon elle bien connue de la part de holdings logées au Luxembourg, pour éponger les liquidités des filiales. La filiale marocaine n’est d’ailleurs pas la seule déficitaire chronique. C’est également le cas du vaisseau amiral Nessma TV, basée à Tunis. La nébuleuse comprend d’ailleurs une vingtaine de sociétés logées dans plusieurs pays, Tunisie, Algérie, Luxembourg, Maroc, Emirats, Canada…

En janvier 2011, la Tunisie bascule, c’est la révolution. La chaîne Nessma sera prompte à tourner casaque. Sur des plateaux très suivis, elle n’épargnera ni l’Ex, ni son entourage, ni son réseau clientéliste, ni les hommes d’affaires qui gravitaient autour de lui.

Jusqu’à aujourd’hui, la chaîne suivra une ligne éditoriale aussi sinueuse qu’un circuit de montagne, multipliant les volte-faces politiques, faisant la promotion de Beji Caid Essebsi, de son parti, d’Ennahdha, des anciens destouriens (parti de Bourguiba puis de Benali)…

...dans une nébuleuse de 20 sociétés dont aucune ou presque ne paie d'impôts

En 2019, Nabil Karoui affiche ouvertement ses ambitions politiques. Grâce à son association caritative “Khalil Tounes“ lancée en 2016, il s’affiche quotidiennement sur sa chaîne.

En juin 2019, il annonce ce qui était à Tunis un secret de polichinelle : il sera candidat aux élections présidentielles et législatives. Pour les législatives, il crée un parti, “Cœur de la Tunisie“.

Les sondages le donnent favori des présidentielles et des législatives.

Les sondages donnent en fait deux populistes en tête :

-Nabil Karoui, crédité de 25% à 30% des voix ;

-Kaïs Sayed, enseignant de droit à l’université.

Et lorsque deux figures populistes montent dans les sondages, les partis populistes baissent. C’est le cas d’Ennahdha, le parti islamiste, tombé à 16% pour les législatives et à 5% pour les présidentielles.

Une partie de la classe politique est alarmée par l’ascension de Nabil Karoui qui utilise ouvertement et tous les jours, les plateaux de sa chaîne, pour sa promotion personnelle.

Le code électoral est donc amendé pour lui interdire l’éligibilité. Faux calcul évidemment car il monte encore plus dans les sondages. La non éligibilité ne pourra d’ailleurs rien contre lui qui est devenu un mélange de Bernard Tapie et de Berlusconi.

Inculpé par un juge d'instruction pour blanchiment et interdit de quitter le territoire

En septembre 2016, l’ONG I watch avait déposé plainte contre Nabil Karoui et son frère Ghazi pour suspicion d’évasion et fraude fiscale ainsi que blanchiment d’argent.

En 2017, une instruction préliminaire est ouverte par la Justice. Le 8 juillet 2019, Karoui & Karoui sont inculpés de blanchiment d’argent, leurs avoirs gelés avec interdiction de quitter le territoire.

Nabil Karoui a comparu les mardi et mercredi 23 et 24 juillet devant le juge d’instruction.

La filiale marocaine figure dans le dossier d’accusation. Les éléments de la plainte sont disponibles sur le portail I Watch Tunisie.

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