Stratégie. Asma Invest veut se lancer dans l’éducation et la santé
Détenue à parts égales par les Etats marocain et saoudien, la société d’investissement opérait jusque-là dans l’immobilier, l’agriculture et le tourisme. Elle s’ouvre désormais à de nouveaux secteurs comme l’éducation, la santé et les énergies renouvelables. Une augmentation de capital sera bouclée d’ici l’été pour financer cette nouvelle stratégie.
Dirigée depuis 2015 par Hicham Safir, un financier marocain qui a roulé sa bosse à la City de Londres, Asma Invest se lance dans une nouvelle stratégie d’investissement.
La société a investi 5 milliards de dirhams depuis sa création en 1992. Son portefeuille est aujourd’hui composé à 80% par des investissements dans l’immobilier, le tourisme et l’agriculture, avec une présence dans des projets de parcs industriels comme TMZ et Sapino.
La société détient également des participations minoritaires dans des sociétés de la place (voire schéma ci-contre).
Source : Asma Invest
Après une période de restructuration menée ces trois dernières années, la société d’investissement compte se lancer dans de nouveaux secteurs, nous apprend son directeur général.
« Nous allons garder une présence dans nos secteurs traditionnels, mais nous étudions aujourd’hui des projets dans les secteurs de l’éducation, la santé et les énergies renouvelables. Avec toujours la même ligne directrice : participer au développement du pays en accompagnant l’Etat dans ses programmes et projets de développement », nous explique Hicham Safir.
Le nouveau plan a été validé par le Conseil d’administration de la société, composé de trois représentants du ministère marocain des Finances et trois autres représentants du ministère des Finances d’Arabie Saoudite.
Pour financer ses nouvelles ambitions, une augmentation de capital a été décidée, pour porter les fonds propres d’Asma Invest de 800 millions de dirhams à 2 milliards de dirhams.
« Nous avons déjà reçu une première tranche de 400 millions de dirhams. Le reste sera injecté avant l’été 2019 », nous apprend le DG de la société.
Maximiser l’effet de levier financier
Si elle garde le même mode opératoire (Asma Invest est investisseur et opérateur en même temps), la société cherche désormais à impliquer des partenaires étrangers et locaux dans ses futurs projets. L’idée est de faire jouer le levier financier pour optimiser ses investissements.
« Le 1,2 milliard de capital additionnel devra générer d’autres milliards en levier. On peut utiliser du levier avec les banques, mais aussi du levier en capital. L’idée est de structurer de beaux projets et de faire ensuite appel à des partenaires en capital, notamment des investisseurs étrangers », explique Hicham Safir.
Le procédé a été déjà mené sur un projet immobilier à Casa Anfa, zone où Asma Invest a été l’un des premiers opérateurs. Sur un investissement d’un milliard de dirhams, Asma Invest a pu impliquer un investisseur saoudien (l’Arab investment company) à hauteur de 40%.
« Ca nous permet de ne pas tout mettre sur un seul projet et d’optimiser ainsi nos interventions », précise Safir.
Sortir des sentiers battus
Asma Invest n’est pas un investisseur comme les autres. Appartenant aux Etats marocains et saoudien, il a quasiment une mission de service public.
« La société a été crée dans l’objectif d’accompagner le développement du Maroc en investissant dans des secteurs prioritaires pour le pays. Nous avons des objectifs de rentabilité certes, mais le gain n’est pas une finalité. On doit être rentable pour croître et continuer de remplir notre mission », signale Hicham Safir.
Cette philosophie doit être constamment traduite dans les projets portés par la société.
Dans l’immobilier par exemple, la société privilégie les projets à l’adresse de la classe moyenne, avec des prix allant, sur Casablanca par exemple, de 700 000 dirhams (à Zenata) à 1,5 million de dirhams (à Casa Anfa).
« Cela part de notre analyse du secteur de l’immobilier. Il y a eu un fort engouement durant les années 2000. Mais il y a eu des laissés pour compte, notamment dans la classe moyenne, qui ne se retrouvaient pas dans l’offre du marché. C’est donc cette niche que nous avons choisi d’adresser », explique Hicham Safir.
A Casa Anfa par exemple, Asma Invest a choisi de faire de l’immobilier conventionné, à prix fixe. « Dans notre premier projet à Casa Anfa, 50% des appartements étaient conventionnés avec l’AUDA, avec un prix fixe de 1,3 millions de dirhams. On a eu une grande demande pour ce produit. Nous lançons un second projet (Occitania) où 60% des appartements seront également conventionnés. Le prix est fixé à 1,5 MDH pour des appart' de 80m2 », explique le DG de la société.
Ce raisonnement, on le retrouve également dans l’agriculture, où la société opère dans des zones où l’investissement privé est quasi absent, comme à Azilal, Taounate, El Hajeb…. Et sera la ligne directrice pour les projets dans l’éducation et la santé.
Education : construire des écoles pour la classe moyenne
Dans l’éducation, Asma Invest compte construire des écoles privés d'un genre nouveau. « L’idée n’est pas de créer de nouvelles écoles privées. Mais de faire des écoles qui ciblent la classe moyenne, avec la même qualité que les meilleurs écoles privées du pays », explique Hicham Safir.
Comment ? En optimisant l’investissement, nous dit notre interlocuteur. « Au lieu d’avoir 20 élèves par classe, nous pensons monter à 35 élèves par exemple pour réduire au maximum les frais de scolarité. Nous allons faire également de l’optimisation sur le foncier. Dans une école, ce n’est pas la peine d’avoir un gros terrain, de gros jardins, puisque l’essentiel reste l’éducation. Nous comptons essaimer ce modèle un peu partout au Maroc. C’est des choses auxquelles on réfléchit actuellement avec des partenaires marocains ».
Dans la santé, Asma Invest ne fera non plus de cliniques classiques. « Il y en a déjà beaucoup aujourd’hui. Mais nous remarquons qu’il y a un grand besoin dans la radiologie, l’IRM, les labos… A part Casablanca et à Rabat, les autres villes du pays ne disposent pas de ce genre de services. L’idée est donc de répondre à ce besoin territorial », indique Hicham Safir.
Même mode opératoire dans les énergies renouvelables. Asma Invest étant en train d’étudier des projets de petite taille dans le solaire et l’éolien pour alimenter des petites villes en moyenne tension.
La société fera néanmoins une pause sur le tourisme où elle dispose déjà de deux hôtels 4 étoiles à Marrakech et à Agadir, en plus d’une part de 30% dans la station touristique Immi Ouaddar (près de Taghazout), portée par la CDG dans le cadre du plan Biladi.
« Nous considérons qu’il n’y a pas pour l’instant un cadre propice pour l’investissement dans le tourisme, faute d’encouragement et de politique fiscale adaptée », confie le patron d'Asma Invest.