Tunisie: le président décrète l'état d'urgence

Le chef de l'État tunisien Béji Caïd Essebsi a décrété samedi l'état d'urgence, a appris l'AFP auprès de la présidence, huit jours après l'attentat sanglant qui a tué 38 touristes dans un hôtel en bord de mer.  

Tunisie: le président décrète l'état d'urgence

Le 4 juillet 2015 à 13h55

Modifié le 4 juillet 2015 à 13h55

Le chef de l'État tunisien Béji Caïd Essebsi a décrété samedi l'état d'urgence, a appris l'AFP auprès de la présidence, huit jours après l'attentat sanglant qui a tué 38 touristes dans un hôtel en bord de mer.  

"Le président décrète l'état d'urgence en Tunisie et s'adressera à la nation à 17h00 (16h00 GMT)", a indiqué à l'AFP la cellule de communication de la présidence.

L'état d'urgence accorde des pouvoirs d'exception à la police et à l'armée.

Il avait été levé en Tunisie en mars 2014, après avoir été sans cesse renouvelé depuis janvier 2011 et la fuite du président Zine El Abidine Ben Ali, dans la foulée du soulèvement qui avait lancé "le Printemps arabe".

La Tunisie, qui fait face depuis sa révolution à une progression de la mouvance jihadiste, responsable de la mort de dizaines de policiers et de militaires, a été frappée par deux attentats revendiqués par le groupe État islamique (EI) en l'espace de trois mois.

Cinquante-neuf touristes étrangers y ont péri: 21 au musée du Bardo, à Tunis, en mars et 38 dans un hôtel en bord de mer à Port El Kantaoui, près de Sousse, le 26 juin.

Dans une interview vendredi à la BBC, le Premier ministre Habib Essid a reconnu que la police avait été trop lente lors de l'attentat de Port El Kantaoui, premier aveu officiel de défaillances sécuritaires.

Réinventer le tourisme

La Tunisie, sous le choc des récentes attaques jihadistes, doit réinventer son modèle touristique au delà des seuls séjours "plage et soleil"; afin d'attirer de nouveaux visiteurs, affirment professionnels du secteur et analystes.

En l'espace de trois mois, deux attentats sanglants revendiqués par le groupe Etat islamique (EI) ont tué 59 touristes étrangers: 21 au musée du Bardo, à Tunis, en mars, et 38 dans un hôtel en bord de mer à Port El Kantaoui la semaine dernière.

En plus de l'émotion provoquée par ces violences, c'est un coup dur pour l'économie. Le secteur représente 400.000 emplois directs et indirects et une source importante de devises pour la Tunisie, dont le dinar n'est pas convertible.

L'impact économique de l'attaque de Port El Kantaoui pourrait atteindre au moins un milliard de dinars (plus de 450 millions d'euros) en 2015, selon la ministre du Tourisme, Selma Elloumi Rekik.

"C'est un minimum je pense", a-t-elle ajouté, alors que le budget de l'Etat tunisien pour 2015 approche les 29 milliards de dinars (13,3 milliards d'euros).

À court terme, l’avenir s’annonce donc sombre. Dès le soir de l'attentat perpétré sur une plage et au bord des piscines de l'hôtel Imperial Marhaba, des milliers de personnes ont été rapatriées en catastrophe par leurs agences.

Pour pallier départs et annulations, des mesures "d'urgence" ont été annoncées par le ministère, pour soutenir les professionnels, comme des "prêts exceptionnels (...) pour financer l'activité des établissements touristiques pour les saisons 2015 et 2016".

Ces solutions sont loin de faire l'unanimité, car elles sont "contextuelles (et) à court terme", dénonce l'ONG Forum tunisien des droits économiques et sociaux (FTDES).

 Plus aussi rentable

D'autant que le tourisme balnéaire de masse sur lequel s'appuie la Tunisie n'est plus aussi rentable.

"Le modèle du tourisme tunisien (...) a fait ses preuves jusqu'au début des années 2000", explique Jalel Henchiri, vice-président de la Fédération tunisienne de l’hôtellerie (FTH), en soulignant un manque de qualité général, qu'il s'agisse de l'accueil ou de l'environnement.

Le tourisme a explosé en Tunisie dans les années 1990, avec un doublement "rapide et sauvage" de sa capacité d'accueil, le pays misant sur le tourisme balnéaire avec le plus souvent des forfaits "all inclusive" (tout compris), ajoute-t-il.

Avant la révolution qui a chassé en 2011 le dictateur Zine El Abidine Ben Ali du pouvoir, une restructuration du secteur avait été envisagée, selon lui.

Mais alors que le pays a connu des mouvements sociaux et une longue et chaotique transition politique, marquée par des changements de gouvernement, cette évolution n'a pas pu être menée à bien, faute de moyens et de temps pour s'y consacrer.

"Aujourd'hui, avec les menaces sécuritaires, il serait peut-être inopportun de continuer à soutenir un secteur mourant et qui fonctionne à perte. C'est plutôt la Tunisie qu'il faut sauver de ce tourisme archaïque vers un tourisme plus innovant et plus rentable", affirme le quotidien francophone La Presse.

Surtout, le pays a plus à offrir que les séjours tout compris et peut réinventer son offre, jugent analystes et professionnels du secteur, qui représente de 7 à 8% du PIB.

La Tunisie peut miser sur le tourisme "bio, sportif, scientifique, médical..", argue Sami Aouadi, professeur d'économie et conseiller à l'UGTT, le principal syndicat tunisien.

"Cette niche du tourisme médical, c'est peut-être par là que l'on pourra recommencer à redonner un coup d'élan au tourisme", estime aussi Jean-Luc Bernasconi, économiste en chef au bureau de la Banque mondiale à Tunis.

S'y ajoute le tourisme régional. "Depuis la révolution, nous travaillons plus avec les Arabes qu’avec les touristes occidentaux. Il y a des Algériens, des Libyens, des Marocains, des Égyptiens...", explique Houssine Ben Ghorbal, vendeur dans la médina de Tunis.

Même si, avec un tiers des nuitées, le tourisme limitrophe sera insuffisant à court terme pour pallier aux récentes annulations, selon M. Henchiri.

Il incombe aux autorités de rassurer des touristes marqués par les images de l'attentat et de prouver qu'elles pourront assurer leur sécurité, soulignent les professionnels.

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