La Cour des comptes épingle le ministère de la Santé

Dans son rapport annuel publié mercredi, la Cour des comptes a vivement critiqué la gestion du ministère marocain de la Santé. 

La Cour des comptes épingle le ministère de la Santé

Le 2 avril 2015 à 18h57

Modifié 11 avril 2021 à 2h36

Dans son rapport annuel publié mercredi, la Cour des comptes a vivement critiqué la gestion du ministère marocain de la Santé. 

C'est un document savoureux, attendu chaque année avec impatience. L’institution si prompte à taper sur les doigts des établissements publics a publié ce mercredi son rapport 2013, dans lequel elle fustige -entre autres- le ministère de la Santé. Centres de santé en état de délabrement avancé, absence de planifications, problèmes de gouvernance, gestion immobilière guidée par une approche opportuniste… aux yeux de la Cour, le système de santé marocain souffre de plusieurs maux.

D’emblée, la Cour déplore la vision court-termiste du ministère dans ce rapport qui couvre la période 2007-2013. « La gestion immobilière au sein du ministère de la Santé a été plus guidée par une approche opportuniste basée essentiellement sur la disponibilité des crédits de financement et par des contraintes de restauration de bâtiments dégradés que par une vision à moyen et long terme, révèle la Cour, qui précise que « les opérations d’aménagement ne sont pas intégrées dans une vision globale basée sur un diagnostic des structures et une programmation des opérations prioritaires ».

Des centres de santé en préfabriqué

Plus grave, il existe encore au Maroc des centres de santé construits en préfabriqué pendant la période du protectorat (1912-1956), qui n’ont du reste fait l’objet d’aucun programme de reconstruction ou de restauration.

Certains centres sont non fonctionnels en raison de nombreux dysfonctionnements (manque de branchement d’eau et d’électricité, menace d’effondrement, manque de personnel...) -c’est notamment le cas des centres Azib Sid Zouine, Abda Skarna, Ouled Dlim, Melouane Chrifia (région Marrakech-Tensift-Alhaouz), Snadla et Tlet Lquolla à Laarache et Mghogha à Tanger (région Tanger-Tétouan) -, d’autres sont vétustes et en état de délabrement avancé, voire en ruine.

En tout, 151 établissements de soins de santé de base ont été répertoriés par la Cour comme non fonctionnels, aussi bien en milieu urbain qu’en milieu rural.

Des millions perdus à cause des pluies…

L'institution présidée par Driss Jettou s'attaque aux inégalités criantes dans l’achat d’équipements entre les différentes régions du pays. Il en ressort que « la fonction achat des équipements reste fortement centralisée avec 96,94% des acquisitions réalisées par les entités centrales sur la période 2007-2013 ».

A cela s’ajoute un déphasage douteux entre l’acquisition des équipements et l’avancement des travaux de construction, ce qui cause des problèmes de gestion des réceptions techniques, des risques relatifs à sa conservation, à la sécurité du matériel et à la perte de la garantie au cas où le matériel est stocké pendant une longue durée.

Le cas le plus significatif est celui de l’hôpital des spécialités Errazi relevant du CHU de Marrakech. En septembre 2013, des équipements d’une valeur de 41 millions de DH ont été endommagés par les eaux pluviales ayant inondé leur lieu de stockage en raison de l’indisponibilité de locaux de stockage adéquats.

Manque de suivi et d’évaluation

Toujours au rang des reproches, la Cour constate qu’ «aucun bilan des réalisations physiques et financières des plans stratégiques n’a été réalisé par le ministère de la Santé, et ce, pour évaluer les résultats atteints au regard des objectifs initialement fixés, sachant que certains projets ont été financés par des emprunts importants contractés par l’Etat (Banque Européenne d’Investissement, le fonds saoudien, etc.) ». 

A cela s’ajoute « l’absence d’un examen rigoureux de la pertinence des actions à entreprendre, surtout en matière de réhabilitation des anciens hôpitaux ». Dans le détail, d’après la Cour, « le ministère de la Santé procède à ces réhabilitations, alors que certaines structures vont être abandonnées et remplacées par des bâtiments nouveaux, qui, à leur tour, accusent des retards au niveau de leur conception et réalisation », développe la Cour, qui déplore la « dégradation de l’état des bâtiments de certains établissements, et ce malgré les aménagements successifs dont ils ont bénéficié ces dernières années ».

La Cour tire la sonnette d'alarme sur le manque de suivi de certains projets qui ont pourtant nécessité des investissements substantiels. Ainsi, les crédits d’investissement immobiliers sont délégués au niveau de 16 directions régionales de santé (DRS) et de 60 délégations du ministère de la Santé (DMS). Or, aucun système d’information n’est instauré pour permettre le reporting et le suivi physique et financier des projets.

Des architectes engagés pour de « simples travaux de peinture »

L’opacité et la signature de contrats douteux avec des architectes est des bureaux d’études sont également mises sur le gril. La Cour révèle « un manque de contrôle des obligations contractuelles des architectes, aussi bien dans la phase de conception que d’exécution des projets ». Et de lister quelques cas : centre hospitalier provincial de Khémisset, centre hospitalier régional de Tétouan, de Kenitra et de Larache.

D’après la Cour, les architectes désignés ne procèdent pas à l’établissement des dossiers d’autorisation de construire, ce qui est contraire aux dispositions de la loi sur l’urbanisme. Parfois même, certains sont désignés pour des prestations ne nécessitant pas une conception architecturale: « simples travaux de peinture ou travaux de revêtement n’entraînant pas des modifications de la structure ou la conception architecturale du bâtiment en question ».

Aussi, la désignation des bureaux de contrôle n’est souvent engagée qu’à la fin des travaux, ce qui porte évidemment préjudice à la bonne conduite des projets. 

Des équipements mal exploités

La Cour regrette que le ministère de la santé n’ait pas développé « une réelle politique nationale des équipements biomédicaux, dans la mesure où il ne dispose d’aucune stratégie qui traite le développement de la fonction technologie sanitaire et biens médicaux telle que recommandé par l’Organisation mondiale de la santé ».

Les juges de la Cour montrent ensuite du doigt des exemples de mauvaise utilisation de la dépense publique. Ainsi, dans les cinq directions régionales de santé (DRS) visitées par les juges, « 35 formations sont équipées mais ne sont pas fonctionnelles, principalement, pour cause de manque de ressources humaines ». 

La Cour des comptes attire également l’attention sur « l’existence d’équipements biomédicaux non affectés et qui sont stockés dans le dépôt relevant du service de gestion des stocks de la Division de l'approvisionnement, ou non exploité d’une manière rationnelle dans les formations visitées ».  Autre critique de la Cour : « le ministère de la Santé n’a pas mis en œuvre une vraie politique générale de maintenance. Il ne maîtrise pas complètement le processus d’encadrement budgétaire ni l’évaluation de l’expression des besoins des directions régionales de santé (DRS) en termes de crédits de maintenance. L’inventaire central dont dispose la direction des équipements et de maintenance (DEM) n’est pas actualisé et peu fiable et les acquisitions réalisées au niveau décentralisé et par les autres directions centrales ne sont pas communiquées à la DEM ».

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