Nouvelle guerre d’Irak, ce qu’en disent les experts américains

Pour Anne-Marie Slaughter ancienne conseillère au cabinet d’Hillary Clinton au département d’Etat et les éditorialistes Thomas Friedman et Nicholas Kristof, les Etats-Unis ne doivent pas intervenir en Irak.   

Nouvelle guerre d’Irak, ce qu’en disent les experts américains

Le 19 juin 2014 à 17h22

Modifié le 19 juin 2014 à 17h22

Pour Anne-Marie Slaughter ancienne conseillère au cabinet d’Hillary Clinton au département d’Etat et les éditorialistes Thomas Friedman et Nicholas Kristof, les Etats-Unis ne doivent pas intervenir en Irak.   

S’ils le font, ce serait pour venir en soutien à un gouvernement d’union nationale regroupant chiites, sunnites et Kurdes.

 

Pour Slaughter, «au cours des deux dernières années, beaucoup d’experts en politique étrangère, dont moi-même, écrit-elle dans le New York Times, ont argumenté avec insistance pour l’emploi de la force en Syrie».

Son article portant le titre «Ne combattez pas en Irak et ignorez la Syrie» résume la position de ceux pour qui, à Washington, il est tard pour intervenir en Irak faute pour les Etats-Unis de ne pas être intervenus plus tôt en Syrie pour aider l’opposition à Bachar al-Assad. Mais on ne refait pas l’histoire.

Pour Slaughter, l’administration Obama, comme l’ensemble des Américains, a en tête les guerres en Irak en 1991 et 2003.

Obama ne veut pas d’une nouvelle participation américaine à une quelconque guerre dans la région sachant que les guerres tribales et religieuses y font rage. A tel point que pour l’administration Obama les seuls pays stables et qui comptent sur le plan géopolitique dans la région sont la Turquie, Israël et l’Iran. Le reste est jugé vulnérable ou instable.

Cette analyse est rejointe par l’éditorialiste Thomas Friedman du même NYT, auparavant correspondant du quotidien au Caire, à Jérusalem et à Beyrouth. Le titre de son article est une question: «Que faire avec les jumelles?» entendez par-là la Syrie et l’Irak.

Friedman explique que les régimes arabes autoritaires n’arrivent pas à passer du désir de gouvernance verticale du haut vers le bas à une gouvernance horizontale inclusive des différents groupes humains qui composent leurs sociétés. Friedman cite la Libye, la Syrie, l’Irak, le Yémen. Il note que seuls la Tunisie et le Kurdistan pour l’instant sont sur une voie plus inclusive, plus horizontale. L’Egypte a essayé mais l’insécurité croissante l’y a fait renoncer. Le Liban, malgré son instabilité, arrive à organiser un partage du pouvoir.

Pour revenir à l’Irak, Nouri al-Maliki reçoit un zéro pointé : il a été élu mais au lieu de sortir du schéma «top-down» il l’a renforcé en excluant les sunnites qui ont vite fait de retrouver les anciens partisans de Saddam Hussein et d’appuyer les miliciens de l’EIIL, l’Etat islamique en Irak et au Levant, Da’ech en arabe pour ad-Dawla al-Islamiya fil-Irak wa ach-Cham.

Friedman revient sur les guerres d’Irak I et II.

Il confesse: «We didn’t know what we were doing». Nous ne savions pas ce que nous faisions. Entre l’Iran, Israël, la mosaïque ethnique et religieuse irakienne et moyen-orientale, le pétrole saoudien et les pétrodollars du Golfe, Friedman admet que Washington a été dépassé.

Son conseil face à la situation irakienne: «Avant que le président Obama ne largue une cannette de Coca vide sur les milices sunnites en Irak, il faut insister pour que al-Maliki démissionne ou forme un cabinet d’union nationale». Mais Friedman pense également qu’il est peut-être trop tard car «la confiance entre les communautés s’est envolée, et al-Maliki n’est pas en train d’essayer de la reconstruire».

Alors quid des intérêts américains, première puissance militaire du monde avec un budget annuel de 600 milliards de dollars, soit le total des 12 budgets suivants dont ceux de la Russie, de la Chine, de la France, de l’Arabie saoudite,  d’Israël et de l’Algérie? «Nous ne pouvons pas nier que le terrorisme pourrait être exporté vers nous en provenance du nouveau Sunnistan. Mais nous avons une NSA, la CIA et des drones pour traiter la menace», écrit Friedman.

Pour Friedman, «le pluralisme a été instauré en Europe après des siècles de guerres religieuses et ethniques. L’Europe a connu les Lumières et la Réforme. Les Arabes ont besoin de faire le même voyage. Cela arrivera lorsqu’ils le voudront ou lorsqu’ils auront épuisé toutes les autres options. Entretemps, renforçons les «ilots décents», la Tunisie, la Jordanie, les EAU, le Liban, le Kurdistan et renforçons notre démocratie pour nous protéger autant que nous le pouvons». Curieusement, il ne cite pas le Maroc dans sa liste.

Editorialiste du NYT réputé conservateur, Nicholas Kristof parle de «l’Irak, des échos de 2003». Il rappelle les 4.500 morts américains, les 500.000 morts irakiens, les 4.000 milliards de dollars de dépenses en près de 10 ans de guerre. «Nous avons appris l’humilité. La boîte à outils militaire est souvent utile. Mais l’une des leçons de base des relations internationales, rappelle-t-il, est une leçon frustrante: il y a plus de problèmes que de solutions. Les gouvernements, comme les médecins doivent garder à l’esprit le principe qui consiste à se dire «d’abord, ne fais pas mal».

Kristof ironise sur l’ancien vice-président de George W. Bush, Dick Cheney, qui appelle dans le Wall Street Journal à une intervention américaine en Irak. Il rappelle les désastres des implications américaines dans les guerres civiles au Liban entre 1982 et 1984 et en Somalie entre 1992 et 1994. Pour Kristof s’agissant de l’Irak, «le premier pas essentiel de Nouri al-Maliki (ou son remplaçant) est d’aller vers les sunnites et les Kurdes, et de travailler avec eux au lieu de chercher  à les marginaliser». Kristof conclut en citant le général David Petraeus: «Les Etats-Unis ne peuvent être le bras militaire aérien des milices chiites».

 

Nota Bene : Entre le moment où cet article a été écrit et publié, entre jeudi midi et vendredi matin, le pétrole a pris près de deux dollars passant de 113 à 115 billets verts le baril.

Vous avez un projet immobilier en vue ? Yakeey & Médias24 vous aident à le concrétiser!

Si vous voulez que l'information se rapproche de vous

Suivez la chaîne Médias24 sur WhatsApp
© Médias24. Toute reproduction interdite, sous quelque forme que ce soit, sauf autorisation écrite de la Société des Nouveaux Médias. Ce contenu est protégé par la loi et notamment loi 88-13 relative à la presse et l’édition ainsi que les lois 66.19 et 2-00 relatives aux droits d’auteur et droits voisins.

Médias24 est un journal économique marocain en ligne qui fournit des informations orientées business, marchés, data et analyses économiques. Retrouvez en direct et en temps réel, en photos et en vidéos, toute l’actualité économique, politique, sociale, et culturelle au Maroc avec Médias24

Notre journal s’engage à vous livrer une information précise, originale et sans parti-pris vis à vis des opérateurs.