Quand le CNDH sort enfin de son silence

Il aura fallu deux ans au Conseil des droits de l’Homme (CNDH) pour sortir son document de référence sur la situation globale du pays et formuler ses propositions pour mettre fin aux infractions qu’il énumère dans ce rapport d’une cinquantaine de pages. C’était le lundi 16 juin au Parlement.  

Quand le CNDH sort enfin de son silence

Le 18 juin 2014 à 17h35

Modifié 18 juin 2014 à 17h35

Il aura fallu deux ans au Conseil des droits de l’Homme (CNDH) pour sortir son document de référence sur la situation globale du pays et formuler ses propositions pour mettre fin aux infractions qu’il énumère dans ce rapport d’une cinquantaine de pages. C’était le lundi 16 juin au Parlement.  

 Objet de toutes les critiques, y compris des organisations non-gouvernementales de droits humains, le Conseil national des droits de l’homme a fini par s’affirmer.

C’était ce 16 juin devant les parlementaires marocains. Driss Yazami, président du Conseil, a exposé le résumé du travail qu’ont mené les équipes de son institution. Un travail de deux ans de diagnostic de la situation des droits de l’homme, mais également un effort de propositions pour en finir avec quelques exactions qui continuent à avoir lieu de nos jours.

Les départements de l’Intérieur et de la Justice ont été les plus concernés par le rapport du CNDH. Les administrations sous la tutelle de ces deux départements ne sont, selon le rapport du Conseil, pas vraiment des modèles de respect des droits humains. 65% des 41.700 plaintes déposées auprès du Conseil concernent la Justice, les prisons, les atteintes aux droits fondamentaux ainsi que les dossiers non-réglés par l’IER de victimes des années de plomb.

Cas de violence et de torture

Le Conseil reconnaît que sur les 60.000 manifestations de protestation qu’a connues le Maroc entre 2011 et 2013, la grande majorité s’est déroulée sans atteinte aux libertés de rassemblement et d’organisation. Il souligne cependant que dans certains cas, les forces de police avaient eu recours à l’usage excessif de la violence à l’encontre des manifestants, ayant conduit à la perte de vie dans deux cas énumérés par le Conseil, un à Safi et l’autre à Assa.

Il pointe également du doigt l’absence de coordination, dans d’autres cas, entre les principaux concernés et des structures comme les commissions de résolution de conflits du travail, censées atténuer les tensions entre organisations syndicales d’un côté, et d’un autre côté les employeurs et forces de l’ordre.

Par ailleurs, le Conseil déplore l’absence de tout mécanisme empêchant le recours à la torture dans les centres de détention de la DGSN ainsi que les prisons. De même, l’institution remarque que lors des déclarations de prévenus accusant la police de torture, juges et procureurs ont à plusieurs reprises refusé d’ordonner une expertise. Et cela est dû, selon le Conseil, à l’absence de dispositif légal obligeant les magistrats à diligenter des enquêtes immédiates suite à des déclarations de torture subie.

A ce propos, le Conseil de Yazami a déclaré avoir adressé plusieurs mémorandums au corps formant la Justice marocaine. Il y propose, entre autres, l’adoption de mesures de contrôle telles que l’enregistrement audio et vidéo de tous les interrogatoires de police en permettant à l’avocat du prévenu de l’accompagner durant la période de garde à vue, ainsi que l’obligation des magistrats d’enquêter sur les actes présumés de torture. Le Conseil propose d’élargir ces mesures aux centres pénitentiaires aussi, car là-bas également, les agents du Conseil ont observé des cas de torture.

Prisons. Situation critique

Le Conseil considère la situation dans les prisons marocaines comme critique et très inquiétante. En effet, les prisons marocaines accueillent le double de leur capacité en détenus.

Sur ces derniers, près de la moitié n’ont même pas encore été jugés. En plus, 41% des locataires des prisons y purgent des peines de moins d’un an de prison.

La gouvernance de ces centres de détention en prend un grand coup de la part des équipes du CNDH. L’abus de pouvoir est un mode de gouvernance pour les administrateurs de prison, et l’arbitraire y règne en maître. En plus d’atteintes aux droits humains fondamentaux des détenus, la dépense d’alimentation moyenne par prisonnier et par jour est de 11 DH.

Pour mettre fin à cette situation, le Conseil national a exhorté le gouvernement à adopter rapidement les mesures instituant les peines alternatives à la prison et de revoir la gouvernance et les modes de contrôle des établissements pénitentiaires.

Le CNDH veut une nouvelle liste électorale

Quelques jours après que le ministre de l’Intérieur a manifesté sa volonté de ne pas créer de nouvelles listes électorales, provoquant la colère de partis politiques y compris le PJD, le CNDH a posé comme condition sine qua non à la transparence des élections, le renouvellement de ces listes.

Par ailleurs, le Conseil a demandé à ce que chaque candidat aux élections dispose d’une comptabilité de campagne gérée par un trésorier.

Le Conseil a aussi recommandé d’amender la loi des libertés publiques en y incluant des dispositions régissant les appels au boycott des élections. 

Le Conseil national qui a été accusé de fermer l’oeil sur des événements incontournables et de ne jamais rendre les rapports qu’il a pourtant promis, comme celui des évenements de Khouribga ou ceux d’Al Hoceima en 2011, semble prendre ses marques et s’imposer en tant qu’institution aux pouvoirs constitutionnels élargis.

Ce rapport présentant le bilan des avancées en matière des droits de l’homme et les difficultés reste un début et la fonction garde-fou que devra jouer le Conseil auprès des administrations et responsables publics doit-être renforcée. Et cela passe forcément par le renforcement et la protection des organisations de la société civile, principale force de proposition dont le Conseil puise ses données.

Enfin, l’opinion publique sera curieuse d’observer la suite qui sera donnée aux conclusions formulées par le Conseil, et ayant des allures d’ultimatums, à l’encontre du ministère de l’Intérieur.

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