Redéfinir les compétences des entreprises

Le 10 novembre 2014 à 12h05

Modifié 10 avril 2021 à 4h25

DURHAM, CAROLINE DU NORD – L’un des aspects des plus intéressants de mes fonctions de recteur de faculté de commerce est de m’entretenir franchement avec des dirigeants de tous les secteurs. Il y a quelques années, des litanies inquiétantes se faisaient entendre : les hommes d’affaires commençaient à ressentir le type d’opprobre autrefois réservé à la classe politique.  

Le problème en est un de confiance ou de méfiance. Le baromètre de confiance Edelman révèle qu’un cinquième du public dans le monde entier estime que les dirigeants des secteurs privé et public disent vraiment la vérité lorsqu'ils sont confrontés à un problème épineux.

Cette opinion du public vaut pour les entreprises du monde entier. L’enquête sur les perspectives économiques mondiales du magazine CFO de l’Université Duke a constaté que près de 60% des directeurs financiers aux États-Unis estimaient que le manque de confiance du public nuit au cadre des affaires. Ces pourcentages sont même encore plus haut dans d’autres régions du monde.

Qu’est ce qu'un chef d’entreprise compétent ?

Vu la récurrence des fuites de données et des atteintes à la sécurité ainsi que des allégations de manipulations financières impliquant certaines des banques les plus respectées du monde, qui peut reprocher au grand public de se méfier? Maintenant, plus que jamais, nous avons besoin de dirigeants en mesure de regagner la confiance du public. Pour ce faire, nous devons redéfinir ce qu’est un chef d’entreprise compétent.

Traditionnellement, la société mesurait la compétence d’un homme d’affaires par sa capacité d’analyse intellectuelle des questions dans une perspective plus large et plus profonde. Mais, afin de mettre à profit les débouchés mondiaux du moment, nous devons faire ressortir une nouvelle dimension : la capacité de créer un ensemble de valeurs communes et d’abriter une culture qui adhère à ces valeurs. Nous devons, pour ce faire, franchir trois jalons parfois douloureux.

Primo, les chefs d’entreprise doivent surmonter leurs réticences à apprendre des autres. La chose apparaît simple, mais combien de cadres haut placés sont prêts à admettre qu’ils ne sont pas omniscients ou qu’ils ne sont pas la personne la plus brillante dans la salle ? Beaucoup de chefs d’entreprise font valoir les avantages de la diversité, mais s’entourent de personnes qui leur ressemblent en tous points.

Secundo, il faut faire siennes les aspirations des autres. Beaucoup de dirigeants d’entreprise sont tombés en chute libre ces dernières années en raison de leur âpreté au gain et d’ambitions personnelles démesurées. Les dirigeants qui tirent leur épingle du jeu sont ceux qui s’intéressent aux autres et qui ne sont pas centrés exclusivement sur eux-mêmes. Ils adoptent la démarche «ma réussite dépend de la vôtre». Une attitude qui leur permet d’établir des relations de confiance durables entre les membres d’équipes qui favorisent la mobilisation de tous les effectifs dans l’atteinte d’une vision commune.

Les chefs d’entreprise doivent valoriser la collaboration

En dernier lieu, les chefs d’entreprise doivent valoriser la collaboration et y tenir. Les chefs de file qui font fi des craintes et des exaspérations sont ceux qui tiennent compte des aspirations des autres et qui sont dotés d’un caractère bien trempé et d’une grande détermination sont plus susceptibles de former des équipes diversifiées dont les membres partagent une identité et des objectifs communs tout en gardant leur personnalité. Certaines études ont démontré que de telles équipes constituent un formidable atout concurrentiel. En bref, non seulement la collaboration importe, mais elle permet de remporter la mise.

Imaginez l’immense potentiel que nous aurions pour résoudre certains des grands enjeux du monde si les industriels adoptaient cette stratégie. Prenons par exemple la menace mondiale du virus Ebola. Des projets sont en cours pour la recherche, la fabrication et la distribution de médicaments expérimentaux qui pourraient traiter ce mal. Mais jusqu’ici les sociétés pharmaceutiques ont largement ignoré Ebola, car les bénéfices attendus semblent bien minces pour la mise au point d’un médicament destiné à des populations qui n’ont pas les moyens de se le payer.

Un article du New York Times a révélé le mois dernier que les autorités américaines prévoient augmenter la production d’un médicament expérimental, mais il est peu probable que la demande soit comblée. Si les esprits les plus brillants du monde des affaires et du secteur de la santé avaient trouvé une méthode pour inciter la production d’un médicament contre le virus Ebola avant l’épidémie, des milliers de vies auraient pu être sauvées.

Le type de direction que je prône ne menace pas du tout la rentabilité d’une société. Au contraire, c’est le point de départ pour développer une entreprise à son plein potentiel. Comme aime le rappeler l’ancien PDG de Proctor & Gamble et l’actuel secrétaire aux Anciens combattants des États-Unis, Bob McDonald, les chefs de file ont la responsabilité de faire en sorte que leur entreprise soit en mesure de «bien faire, mais de faire aussi le bien».

La conduite des affaires peut servir de fil conducteur pour tisser la trame des changements positifs dans le monde. Pour atteindre ce but, il faut des dirigeants compétents dotés de vision qui s’engagent à dégager des bénéfices, mais aussi à changer le monde. Une nouvelle norme de compétence des affaires qui ne tient pas compte uniquement des résultats financiers contribuera grandement à regagner la confiance du public.

Traduit de l’anglais par Pierre Castegnier

© Project Syndicate 1995–2014
 

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