Ahmed Faouzi

Ancien ambassadeur. Chercheur en relations internationales.

One week au sein du State Department

Le 10 mai 2022 à 12h57

Modifié 10 mai 2022 à 13h22

Cela fait déjà des années que je me suis abonné au service de la communication du State Department américain. Chaque diplomate ou homme d’affaires marocain, voyageant à l’étranger, est censé suivre l’évolution politique et économique des Etats-Unis. Toute décision de Washington a un impact immédiat sur nos vies. Pour le meilleur comme pour le pire. Si on ne s’intéresse pas à l’Amérique, who will take care of you ?

Pour des raisons professionnelles donc, je me suis abonné aux publications du State Department. Être en poste dans n’importe quel coin de la planète nécessite de suivre l’évolution de la politique américaine dans la région. Les Américains sont omniprésents. Là où on met les pieds, ils ont déjà planté leur drapeau, leurs intérêts, leurs entreprises et parfois même leurs bases, avant tous les autres. Sur terre comme sur mer, the Star-Spangled-Banner, la bannière étoilée américaine, flotte partout.

Depuis que je me suis abonné, ma boîte email a souffert d’une surcharge d’informations dont je n’arrive à digérer qu’une partie. Chaque jour que Dieu fait, mon computer et mon smartphone m’annoncent, à longueur de journée, la chute d’un communiqué. Plusieurs fois par jour, un bruit strident me rappelle qu’une information est tombée, annonçant que le State Department a reçu une telle personnalité importante, décidé une politique à l’égard de tel pays, ou abordé un thème géopolitique stratégique. À la longue, cela devenait lassant ; alors que faire ?

Se désabonner est la meilleure sortie de ce guêpier, me suis-je dis. Je voulais me défaire, une fois pour toutes, de cette dépendance à l’égard de ce département avec qui je ne suis lié que par une curiosité malsaine. Aussitôt pensé aussitôt exécuté. Le divorce est donc consommé et me voilà, par un simple clic, désabonné. Mon lien outre-Atlantique est rompu. Je suis de nouveau indépendant, et détaché des torrents d’informations subis à partir de Washington.

Mon désabonnement n’a certes pas été remarqué par les autorités américaines. Peu après, le vide et l’ennui s’installent, ainsi que le besoin d’être alimenté par les american news qui commencent à se faire sentir. Un seul être vous manque et tout est dépeuplé, est une expression qu’on  peut traduire par One person is missing and the hole place is deserted.

Ma boîte email est soulagée. Moins d’alertes ou de réception de messages. Le silence est absolu pour écouter le monde et le bruissement des activités humaines des contrées paisibles où rien ne vient bouleverser nos vies. Je vaque à mes occupations quotidiennes, le corps léger sans porter sur mes épaules le poids des décisions et autre initiatives planétaires du State Department. Je me crois, pour un moment, électron libre loin des pesanteurs américaines. Mais ce ne fut qu’un répit.

Les fracas des guerres en Afghanistan et en Ukraine m’ont rappelé à l’ordre. La pandémie Covid qui nous touche de près, et l’attente désespérée d’un vaccin sauveur pour toute l’humanité remettent les États-Unis dans mon agenda. On a toujours besoin de cette puissance pour mener ces combats. Nul ne peut dire le contraire.

Je décide alors de me réabonner aux press releases du State Department, pour suivre les dernières nouvelles, et me mettre à la page. Je fais mon mea-culpa. Mon désabonnement n’était qu’une erreur de passage. Le jeûne du ramadan était aussi un jeûne des actualités américaines. Me voilà de nouveau relié à la source de vie. Le tuyau d’oxygène est de nouveau branché après un sevrage de plusieurs semaines. Je respire profondément, je reprends mes doses et bien plus. Ça me calme et m’apaise.

Ma boîte email est de nouveau trépidante. Les nouvelles venant d’outre-Atlantique ne sont pas toujours réjouissantes, mais il faudrait faire avec. Ce sont les Américains qui ont inventé cette nouvelle technologie de messagerie instantanée. Ils sont certainement les seuls à savoir pourquoi et pour quelles finalités. Le débit d’informations sur mon email n’a pas diminué d’un iota. Au contraire, j’ai même l’impression d’un déluge de communication.

Le jour de Aid Al fitr est le jour de mon réabonnement au site du State Department. J’ouvre ma boîte email et me voilà devant un message de Secretary of State himself, Antony Blenkin, qui me souhaite bonne fête à moi, aux musulmans américains qui rendent de bien loyaux services à son pays, ainsi qu’aux autres musulmans de la terre entière. Il m’informe qu’il compte, à cette occasion, organiser une réception en l’honneur des chefs religieux de la communauté musulmane. Je suis surpris mais ravi pour l’initiative dans ce moment trouble de l’histoire humaine.

Le lendemain, j’apprends que le spokesperson du State Department organise, en présence des journalistes, la première conférence de presse live du ministre depuis l’apparition du Covid. L’occasion est la journée mondiale pour la liberté de la presse. Blinken y développe la politique de son pays quant à la liberté des journalistes, et fait subtilement le lien avec les droits de l’Homme. Pour lui, les reportages et autres couvertures médiatiques des événements, mettent la lumière sur ce qu’il faut réparer et améliorer dans nos sociétés.

Durant toute la semaine, les informations se suivent et ne se ressemblent pas. Blinken est à l’Institut Asia Society, où il évoque la politique américaine à l’égard de la Chine. Le lendemain, on m’informe du contenu des pourparlers entre le ministre et son homologue du Royaume-Uni Elisabeth Truss. Les deux se mettent d’accord pour an additional security and humanitarian assistance to Ukrain. Par webinaire, il enchaîne avec les leaders de l’Asie du Sud-Est. Il leur rappelle la centralité des droits de l’Homme dans la diplomatie américaine.

Pendant ce temps, la deputy-secretary Wendy Sheerman sillonne l’Afrique pour consolider les alliances avec les pays du continent, et rallier d’autres à sa cause. Elle est en Angola, et Afrique du Sud puis au Gabon. Au même temps, Blinken reçoit le conseiller national japonais Akiba Takeo, félicite Israël pour son National Day puis, quelques jours après, condamne l’attaque à Elad où trois victimes et plusieurs blessés israéliens sont à déplorer.

Je n’arrive plus à suivre le rythme infernal qu’on fait subir à ce ministre au visage de jeune premier. J’apprends par la suite qu’il a été testé et déclaré positif au Covid, et qu’il restera chez-lui sous quarantaine en attendant sa guérison totale. He’s not considered a close contact, me réassure le communiqué. Plus de peur que de mal donc. Si son état le permet, il sera encore parmi nous cette semaine pour la deuxième fois en un mois après sa récente visite au Royaume. L’air de Marrakech lui fera certainement du bien.

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