Jawad Kerdoudi

Président de l’Imri (Institut marocain des relations internationales)

Les élections de mi-mandat aux Etats-Unis, un désaveu pour Barack Obama

Le 11 novembre 2014 à 14h27

Modifié 9 avril 2021 à 20h25

Les élections de mi-mandat qui ont eu lieu aux Etats-Unis le 4 novembre 2014 ont concerné le renouvellement de toute la Chambre des Représentants (435 sièges), un tiers du Sénat (nombre total de sénateurs 100) et 38 gouverneurs d’Etats. Les élections de mi-mandat sont généralement considérées comme des élections sanctions contre le pouvoir en place.

Mais il faut bien reconnaître que les résultats de ces élections sont un désaveu pour l’administration Obama. Selon les chiffres qui ne sont pas définitifs, les Républicains ont gagné 7 sièges de sénateurs leur donnant la majorité au Sénat avec 52 sièges. Déjà majoritaire à la Chambre des Représentants, ils ont gagné 11 nouveaux sièges portant le nombre de Représentants républicains à 244. Enfin au niveau des gouverneurs d’Etat, ils ont gagné 2 nouveaux postes soit 31 gouverneurs républicains au total contre 17 démocrates.

Comment expliquer cette défaite du parti démocrate ? Les griefs qui sont portés contre l’administration Obama sont nombreux. Deux tiers des Américains considèrent que le pays va dans le mauvais sens, alors qu’une majorité d’Américains considèrent qu’il y a un manque de leadership à la Maison Blanche.

Plus concrètement, ce qui est reproché à l’administration Obama est l’insuffisance des résultats économiques après la grave crise qu’ont connu les Etats-Unis en 2008. Une loi qui a été difficilement promulguée et qui est toujours contreversée est l’Obamacare qui a consisté à augmenter le nombre d’Américains bénéficiant de l’assurance maladie. Il est reproché également à l’administration démocrate d’être trop laxiste sur le problème de l’immigration clandestine, et de vouloir régulariser les sans-papiers qui sont au nombre de 11 millions aux Etats-Unis. En politique étrangère, il est reproché aussi au Président Obama un manque de fermeté ayant déclassé le premier rang des Etats-Unis sur la scène internationale, notamment sur les problèmes de l’Ukraine, de la Syrie et de l’Irak. Même l’épidémie Ebola est mise au débit du Président Obama.

Je pense, à titre personnel, que ces critiques sont exagérées et partisanes. Le Président Obama a fait face courageusement à la grave crise financière de 2008 en sauvant les banques et les grandes entreprises. Les résultats économiques ne sont pas si mauvais, puisque le chômage a baissé à 5,9% en 2014 et que le taux de croissance a été de 3,5% pendant le troisième trimestre 2014. Ces résultats sont meilleurs que ceux obtenus par l’Union européenne.

Quant à l’Obamacare, le Président a voulu à juste titre faire bénéficier des millions d’Américains de la couverture médicale dont ils étaient totalement dépourvus. Pour ce qui est de la régularisation des sans-papiers, il est normal de reconnaître ces millions d’immigrés qui  travaillent et paient leurs impôts aux Etats-Unis depuis de nombreuses années.

Enfin en politique étrangère, il faut au contraire féliciter le Président Obama qui n’a pas été un va-t-en-guerre comme son prédécesseur, et qui a essayé de trouver des solutions aux conflits mondiaux sans recourir nécessairement à la force. D’ailleurs, les Etats-Unis ne sont plus l’hyperpuissance qu’ils étaient après la chute de l’URSS, le monde est devenu multipolaire. Concernant le conflit israélo-palestinien, tous les efforts du Président Obama en faveur d’une solution juste et durable ont été annihilés par le puissant lobby pro-israélien et ses alliés au Congrès.

Tenant compte de ces résultats de mi-mandat, que peut-ont prévoir pour les deux années qui restent à Barack Obama avant les élections présidentielles de 2016 ? Lorsque les deux Chambres du Congrès sont dominées par le parti de l’opposition, le Président devient un « canard boiteux », ce qui veut dire qu’il n’a plus les moyens de mettre en pratique sa politique.

En effet à partir de 3 janvier 2015, ce sont les Républicains qui contrôleront l’ordre du jour du législatif. Ces derniers tenteront de passer quelques lois qui leur tiennent à cœur. On peut citer à titre d’exemple le développement de la production pétrolière par la construction de l’oléoduc Keystone XL entre le Canada et le Golfe du Mexique pour l’acheminement du pétrole. D’autres mesures vont être proposées par le Congrès pour booster la production de gaz naturel à partir du schiste.

Les Républicains sont en général favorables pour réduire le rôle de l’Etat, d’où certainement des propositions pour diminuer les dépenses publiques, simplifier les réglementations, et tenter d’abroger ou de diminuer l’Obamacare.

A l’inverse, le Congrès va s’opposer de toutes ses forces à la régularisation des sans-papiers, et à toute mesure environnementale susceptible de gêner l’économie américaine. Le Congrès va également essayer de limiter l’élargissement du salaire minimum fédéral qui a été mis en œuvre par l’administration Obama.

En politique étrangère, les Républicains seront favorables aux négociations de l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les Etats-Unis. Par contre, ils vont renforcer le soutien à Israël et s’opposer à toute nouvelle initiative en faveur des Palestiniens, sachant qu’ils sont encore plus pro-israéliens que les Démocrates.

Heureusement, la Constitution américaine prévoit un droit de véto du Président à toute proposition de loi du Congrès. Ce qui ne permettra pas à ce dernier de faire valider ses propositions sans l’aval du Président. Cela entraînera naturellement une cohabitation entre le Président et le Congrès pendant les deux années à venir. Le Congrès aura également le souci de ne pas bloquer la machine législative, alors que 75% des Américains désapprouvent le travail du Congrès.

Pour gagner les élections présidentielles de 2016, les Républicains afin de rallier le maximum d’Américains doivent présenter un bilan positif pendant les deux années de cohabitation.

En ce qui concerne les relations du Maroc avec les Etats-unis, il n’y aura pas de changement. Au contraire les Républicains ont toujours été favorables à notre pays. Par contre, il ne faut s’attendre à aucune initiative des Etats-Unis vis-à-vis des Palestiniens. La seule issue pour la résolution du conflit israélo-palestinien viendra d’Europe, puisque déjà la Suède a reconnu l’Etat palestinien, et que la Haute Représentante de l’Union européenne pour les Affaires étrangères a déclaré à Gaza qu’il faut reconnaître un Etat palestinien. 

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