Règles prudentielles : les dations dans le viseur de Bank Al-Maghrib

Sara El Hanafi | Le 23/7/2019 à 14:19

Les actifs acquis par dations et qui restent dans le bilan de la banque pour une période de plus de quatre ans devront donner lieu en contrepartie à des fonds propres correspondant à 30% de leur valeur. Cette nouvelle réforme sera rétroactive et sa première application sera lissée sur cinq ans.

Le secteur bancaire détient 18 milliards de dirhams d’actifs acquis par voie de dations en paiement, soit 1,5% de l’actif global des banques. Ce chiffre significatif a été révélé par Hiba Zahoui, Directrice de la Supervision bancaire chez Bank Al-Maghrib, lors de la présentation du rapport 2018 de son département ce 22 juillet à Casablanca.

Un niveau alarmant qui a incité la Banque centrale à encadrer les expositions bancaires sur ces actifs : "Pour prémunir les banques du risque immobilier qu’elles encourent à travers la détention de ces actifs, Bank Al-Maghrib a entrepris un chantier afin d’encadrer le recours à ces techniques et prévoir des mesures d’atténuation des risques y afférents", a indiqué Hiba Zahoui.

Ces dations là, qui consistent pour les banques à éteindre la dette d’un débiteur en contrepartie de l’acquisition d’un actif généralement immobilier, ont émané d’une conjoncture économique particulièrement difficile qui a affecté la capacité de remboursement de grandes entreprises endettées, notamment celles opérant dans la promotion immobilière. Dans ce contexte, les banques ont eu un recours accru à cette technique pour réduire leurs pertes.

En consultation, le texte réglementaire sera adopté avant fin 2019

Une étude quantitative sur ces actifs a été conduite auprès des banques au cours du deuxième semestre 2018. Il en ressort un premier projet de texte réglementaire qui a été élaboré et a fait l’objet d’une première consultation auprès des acteurs bancaires.

"Aujourd’hui le scénario qui est entrain d’être retenu est celui d’un traitement prudentiel. Cela veut dire que nous considérons qu’un actif immobilier qui reste dans le bilan bancaire au-delà d’un certain délai peut constituer un risque, face auquel il doit y avoir des fonds propres additionnels pour le couvrir", explique notre interlocutrice.  

Un barème de couverture par des fonds propres a ainsi été défini en fonction de la durée de détention de l’actif immobilier: "A partir de quatre ans, si l’actif n’est pas cédé, la banque doit constituer des fonds propres lui correspondant, à hauteur de 30% de sa valeur", ajoute Hiba Zahoui.

Selon elle, ce texte réglementaire est en phase avancée de consultation avec les banques: "Nous sommes à la deuxième consultation, et nous prévoyons d’adopter ce texte dès le troisième trimestre de l’année 2019", indique-t-elle.

A noter que les nouvelles réformes s’appliqueront au stock global des dations, et non seulement les nouveaux flux. Pour cela, un lissage sur cinq ans est prévu pour l’application de la nouvelle réforme sur l’ancien stock. Tout actif qui sera nouvellement acquis sera toutefois traité selon les nouvelles règles dès son entrée dans le bilan de la banque.  

Une nouvelle classification des créances dès 2022

Au-delà du travail sur le cadre réglementaire des dations, Bank Al-Maghrib poursuit les travaux relatifs au chantier de la réforme de la classification des créances, qui a été toutefois différé après l’entrée en vigueur de la norme IFRS 9, afin d’éviter les contraintes induites par la mise en œuvre simultanée des deux réformes.

La réforme relative à la classification des créances et leur couverture par des provisions a pour objet de renforcer la solidité des banques et de promouvoir des règles saines en matière de gestion du risque de crédit, en convergence avec les normes internationales.

Ses principaux apports s’articulent autour de l’élargissement de la notion de défaut en intégrant de nouveaux critères notamment les dépassements persistants au-delà de 90 jours sur les lignes autorisées, l’introduction d’une classe intermédiaire de risque dite "créances sensibles" ainsi que la définition des critères qualitatifs et quantitatifs minimums de classification des créances parmi cette classe de risque et les modalités de constitution des provisions y afférentes.

A l’issue des consultations avec les banques, Bank Al-Maghrib a retenu une entrée en vigueur en deux étapes : Fin 2022 pour les dispositions régissant les créances en souffrance et fin 2024 pour les dispositions régissant les créances sensibles.

Les banques ont ainsi été appelées à mener des actions préparatoires à l’entrée en vigueur de la réforme, en particulier la mise en place de plans d’assainissement des dépassements persistants par rapport aux lignes autorisées. Ces actions d’assainissement visent à baisser le niveau des dépassements dégagé lors des études d’impact, pour limiter l’impact réel lors de l’entrée en vigueur de la réforme.

Les travaux de la Banque centrale portent également sur le traitement comptable de l’impact de la première application selon les normes comptables marocaines en vigueur pour l’établissement des comptes sociaux. Ces travaux vont se poursuivre en 2019 avec les banques et les commissaires aux comptes et donneront lieu à une consultation du Conseil National de la Comptabilité.

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