Les entreprises commencent à s'intéresser aux banques participatives

Zineb Harhar | Le 26/2/2018 à 16:21

Les banques participatives ambitionnent de se positionner auprès des professionnels et des entreprises, et de dépasser le segment des particuliers. Où en est donc la relation entre les deux parties? Comment cela se passe concrètement aujourd’hui? Réponses.

Quelques mois après leur démarrage, les offres et services que proposent les banques participatives demeurent encore limités. Celles-ci ne peuvent commercialiser que la Mourabaha immobilière. Les autres produits, pour leur part, devront attendre l’approbation du Conseil supérieur des oulémas (CSO); mais les professionnels du secteur ne s’attendent pas à un dénouement dans un futur proche.

Au-delà des particuliers ayant fait preuve d’engouement pour l’avènement de la finance participative, des professionnels et même des entreprises s’y mettent également. Qui sont-ils donc? La volonté de respecter la Sharia ou l'éthique musulmane est-elle à l'origine cette décision?

Adnane Gueddari, Directeur général d’Umnia Bank, la filiale participative de CIH Bank, nous explique qu'il s'agit surtout de PME pour le moment: "Les PME sont gérées par des personnes dont le processus de prise de décision est centralisé en la personne du gérant. Celui-ci prend donc la décision indépendamment, selon ses convictions personnelles".

Un constat confirmé par Youssef Baghdadi, Directeur général de Bank Assafaa, la banque participative d’Attijariwafa Bank: "On peut dire que nous avons une petite portion de clients entreprises, qui varie entre 5 et 10%. Et ce sont surtout des PME et des auto-entrepreneurs".

Il ajoute: "L’argument de la sharia joue effectivement un rôle dans leur choix de recourir au financement participatif. Il ne faut pas oublier que ces TPME sont gérées par des femmes et des hommes dont les convictions les poussent à faire ce choix… c’est conforme à leurs valeurs. Mais il est également question des principes et services qu'on présente".

Bank Al Yousr, filiale de la Banque Centrale Populaire, estime pour sa part que les entreprises qui s’intéressent aujourd’hui à la finance participative sont sensibles à ses principes fondamentaux: "Il s’agit notamment du partenariat entre banque participative et client, qui se matérialise par le partage de risques et du financement de leurs projets adossés à l’économie réelle", nous confie une source autorisée à Bank Al Yousr.

Quant aux secteurs couverts par les banques participatives, une seule règle de base est à respecter: "Intervenir dans des activités conformes à la Sharia, qu’il s’agisse de financement, de dépôt ou encore de placement", nous affirme notre source à Bank Al Yousr.

Et les grandes entreprises?

"Pour une grande entreprise, c’est un processus de décision plus compliqué qui implique plusieurs niveaux au sein de l’organisation", explique M. Gueddari. "C’est toute une procédure qui s’enclenche pour changer de banque et cela prend du temps: on a besoin de plus d’informations et de bien connaître tous les produits pour faire une comparaison et prendre des décisions".

Il ajoute: "Il faut savoir toutefois que les banques participatives sont très souvent sollicitées, on leur porte plus d’intérêt. Cependant, il faut noter une relative méconnaissance par le grand public et les entreprises également quant à l’état d’avancement de la finance participative au Maroc. Pour cela, nous organisons des ateliers pour vulgariser la finance participative".

Les banques participatives sont-elles toutefois prêtes à accueillir ces grandes entreprises? M.Baghdadi, DG de Bank Assafa estime que l’écosystème n’est pas complet pour ce faire: "Nous ne disposons toujours pas de l’accord de BAM et du CSO pour des produits comme le Takaful, les Sukuk ou encore les contrats d’investissements".

Les autres formules bancaires ne sont pas encore disponibles non plus, comme la Moucharaka ou la Moudaraba qui sont plus adaptées à ce genre de clientèle ; ce qui fait que les banques participatives ne sont toujours pas bien établies sur le marché des grandes entreprises.

«Nous sommes là certes mais notre offre n’est toujours pas complète», ajoute Youssef Baghdadi.

Umnia Bank, pour sa part, pense à diversifier son offre à partir de ce dont elle dispose: «Nous sommes entrain de développer la Mourabaha équipements notamment, afin de présenter aux entreprises clientes un levier de financement pour leurs investissements divers en termes d’immobilisations. Une offre concrète pourra être présentée aux entreprises et professionnels dès cette année», annonce M. Gueddari.

"Il faut toutefois dire qu’avec un panier d’offres assez limité, nous ne sommes pas prêts de voir les grandes entreprises sauter le pas aussi rapidement. Néanmoins, une fois le feu vert du CSO accordé aux autres produits, les banques participatives pourront devenir plus concurrentielles, et même croquer des parts de marché aux banques conventionnelles".


Un constat différent pour les TPME: "Sur le court terme, il sera difficile de voir de grandes entreprises ayant recours aux banques participatives, mais il y aura plus de demande de la part des TPME une fois que les produits d’investissement seront disponibles, afin de garantir du rendement sur les placements faits par nos clients", nous confie le DG de Bank Assafa.

"À l’avenir, il y aura beaucoup plus de PME qui sauteront le pas", estime, pour sa part, Adnane Gueddari. «De nouveaux mécanismes types Moucharaka seront instaurés pour dynamiser le marché et le monde de l’entrepreneuriat».

Notre source à Bank al Yousr, quant à elle, affirme que des études ont été menées en interne pour identifier le potentiel de la finance participative auprès de la clientèle des professionnels et des entreprises.

«Plusieurs de ces clients ont exprimé leur volonté de recourir à la finance participative, que ce soit pour financer leurs projets ou pour réaliser leurs opérations courantes. Toutefois, l’intérêt de cette cible se confirmera davantage au fur et à mesure du déploiement de l’offre de cette finance sur le marché. La compétitivité de cette offre et ses aspects novateurs seront tout aussi déterminants dans le choix de ces clients», conclut-elle.

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