Comment expliquer la progression à deux chiffres des bénéfices des banques ?

Dans une économie qui a crû de 1,1%, selon les derniers chiffres du HCP, les six banques cotées à la Bourse de Casablanca sont arrivées à faire progresser leurs bénéfices de plus de 20% pour un montant cumulé de 12,4 milliards de dirhams. Par quel miracle ? Avis d’experts.  

Comment expliquer la progression à deux chiffres des bénéfices des banques ?

Le 4 avril 2023 à 14h52

Modifié 4 avril 2023 à 18h10

Dans une économie qui a crû de 1,1%, selon les derniers chiffres du HCP, les six banques cotées à la Bourse de Casablanca sont arrivées à faire progresser leurs bénéfices de plus de 20% pour un montant cumulé de 12,4 milliards de dirhams. Par quel miracle ? Avis d’experts.  

Les analystes financiers consultés par Médias24 sont tous unanimes sur la question des bénéfices des banques : la progression de 20,1% peut paraître énorme, anormale, mais elle est tout à fait logique. Pourquoi ? Il s’agit, nous disent-ils, d’un simple effet de rattrapage. A 12,4 milliards de dirhams, les banques cotées en bourse arrivent à peine à dépasser  de 200 millions de dirhams le niveau de la masse bénéficiaire du secteur en 2019.

Ce ne sont donc ni des résultats record ni des résultats exceptionnels, mais un simple retour à la normale selon nos sources. En comparaison avec 2019, les bénéfices des banques cotées progressent de 1,6%, après avoir plongé de 12,2% à 5,4 milliards en 2020. Une chute qui s’expliquait à l’époque par le confinement de l’économie marocaine, la montée en force du coût du risque et les lourdes provisions passées par les banques pour se couvrir contre les imprévus du Covid-19.

Les banques épongent complètement l’effet Covid-19

Mais, dès 2021, ces imprévus liés à la pandémie ont commencé à se dissiper, faisant renouer les banques avec un rythme de progression normal, aussi bien de leur activité que de leurs résultats.

En 2021, les six banques cotées ont réussi à éponger le plus gros des pertes affichées en 2020, en faisant passer leurs bénéfices de 5,4% à 10,3 milliards, soit 2 milliards de dirhams en dessous du niveau de l’année précédant le Covid.

L’année 2022 a été donc l’exercice du recouvrement des capacités bénéficiaires de la période d’avant-pandémie.

"Le moteur de la forte progression des bénéfices en 2022 n’a pas été le produit net bancaire qui reflète le niveau d’activité des banques, mais l’amélioration du coût du risque. Avec l’amélioration de la conjoncture de manière générale, les banques ont opéré des reprises sur des provisions passées en 2020 et n’ont pas provisionné autant que les années d’avant. C’est cela qui explique essentiellement le retour à des bénéfices agrégés de plus de 12 milliards", nous décrit un analyste.

Les chiffres du risque bancaire confirment cette analyse. Une note de MSIN montre bel et bien que le coût du risque du secteur s’est nettement amélioré après une longue période de détérioration. Il s’est allégé, selon les calculs de la société de Bourse, de 11,9%, pour revenir à un niveau de 11,6 milliards de dirhams.

Hausse des taux : les dégâts reportés à 2023

Autre élément qui explique cette performance bénéficiaire, comme tient à le souligner un analyste du marché : la non-absorption complète de l’effet de la hausse des taux en 2022.

"Les banques ont évité le pire en 2022, puisque l’effet de la hausse des taux n’a été réellement répercuté que début janvier 2023. Si la hausse des taux avait été appliquée de manière complète en 2022 sur les portefeuilles obligataires, le résultat des opérations de marché aurait été catastrophique et on n’aurait pas assisté à cette progression de plus de 20% des bénéfices", note notre source.

Mais malgré ce report de l’effet de la hausse des taux, le résultat des opérations de marché s’est inscrit en baisse, avec un repli de 22,3%, reflétant la baisse relative des valorisations des portefeuilles obligataires des banques. Si le krach des taux sur le marché des bons du Trésor du 6 janvier 2023 s’était réalisé fin 2022, la situation aurait donc été pire…

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Autre donnée à ne pas négliger : le bon dynamisme commercial des banques, qui n’explique pas à lui seul la progression de 20% des bénéfices, mais qui y est pour quelque chose.

Le PNB des banques cotées a en effet enregistré une hausse de près de 6% entre 2021 et 2022. Les deux principaux compartiments de revenus des banques ont carburé, puisque la marge sur commissions a bondi de 10,1% tandis que la marge d’intérêt a crû de 7,5%.

Résultat des courses : toutes les banques ou presque reviennent à des niveaux de progression normatifs, affichant des résultats en progression par rapport à la période d’avant-Covid et son année de référence 2019.

Ce que chaque banque a gagné en 2022

Attijariwafa bank reste ainsi le champion des bénéfices du secteur avec un RNPG de 6 milliards de dirhams, une première pour la filiale d’Al Mada, devenue en 2023 la première capitalisation de la Bourse de Casablanca. Entre 2021 et 2022, la banque a engrangé 920 millions de dirhams de bénéfices en plus.

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La BCP maintient sa deuxième position, avec des bénéfices nets de 2,7 milliards de dirhams, soit 980 millions de dirhams de plus qu’en 2021. Un niveau jamais atteint par la banque du cheval.

En troisième position, on retrouve Bank of Africa qui, après avoir franchi la barre des 2 milliards de bénéfices en 2021, poursuit son expansion avec un RNPG de 2,3 milliards en 2022.

Mention spéciale dans ce tableau pour le CIH, qui a réussi l’exploit de faire passer ses bénéfices à 669 millions de dirhams pour un PNB d’à peine 3,5 milliards de dirhams. Une performance que la BMCI, avec le même niveau de PNB, n’est pas arrivée à réaliser, comme le signale un analyste du marché. "La BMCI et le CIH ont pratiquement le même niveau de PNB (3 milliards pour la BMCI et 3,5 milliards pour le CIH, ndlr). Pourtant, le CIH arrive à générer trois fois plus de bénéfices que la BMCI, qui affiche une marge nette très faible à cause des lourds investissements qu’elle réalise pour sa restructuration."

Seule banque qui sort du lot avec des bénéfices en baisse par rapport à 2021 : le Crédit du Maroc, qui vient de changer de main après son rachat par le groupe Holmarcom. Le RNPG de la banque affiche en effet une baisse de 35% à 404 millions de dirhams. Mais cette baisse est "trompeuse", nous explique un analyste.

"Le Crédit du Maroc maintient un bon rythme d’activité, son PNB progresse de 4,4% à 2,5 milliards. Si ses bénéfices ont baissé, c’est à cause du retour à un niveau normal de provisionnement. En 2021, le coût du risque de la banque était ridicule, d’à peine 63 millions de dirhams. En 2022, la banque a renoué avec une politique de provisionnement normale, avec un niveau de coût de risque normatif de l’ordre de 309 millions de dirhams, d’où cette baisse comptable du RNPG."

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